Charles Pasqua règle ses comptes post- mortem et accable l'ancien Premier ministre, Alain Juppé, ainsi que l'ancien président de la République, Jacques Chirac.L'ancien ministre de l'Intérieur se montre grinçant vis-à-vis de ses compagnons politiques, dans un documentaire de Daniel Leconte, diffusé par France 3 mardi soir, au lendemain de la mort de l'homme clé de la Ve République, depuis son soutien à Charles de Gaulle en 1940, puis lors de son retour aux affaires le 13 mai 1958, jusqu'à ses hautes responsabilités politiques.Pasqua accuse Alain Juppé (qui tente actuellement d'être candidat de la droite à la présidentielle de 2017) d'avoir torpillé les tentatives secrètes de sauver les moines de Tibhirine, en avril mai 1996. Cela, on le savait déjà, avec d'autres versions et d'autres témoins. Là, on entend celle de l'homme qui à la tête de l'Intérieur en décembre 1994 avait mené à bien le sauvetage de l'Airbus d'Air France sur le tarmac de Marseille. Pour éviter la menace des terroristes d'exploser l'avion sur Paris, il avait ordonné la mission casse-cou du GIGN, finalement réussie.Au moment de l'enlèvement des moines en mars 1996, Charles Pasqua n'est plus ministre, mais il est encore au fait de ce qui se jouait en Algérie. Son exclusion politique avait une raison. A la présidentielle précédente en 1995, il avait soutenu non pas Jacques Chirac, qu'il avait conseillé, encouragé et porté à bout de bras depuis 1974, mais son concurrent direct, Edouard Balladur. Lors de l'enlèvement des moines, loin de la décision politique, Pasqua avait mis en branle ses réseaux.Ainsi, son plus proche collaborateur, Jean-Charles Marchiani, devenu préfet du Var, s'était envolé pour Alger : «Il a les éléments qui auraient conduit à la libération des moines de Tibhirine», dit-il d'une voix assurée dans le documentaire. Il continue : «Il y a eu un écho dans la presse qui disait que Marchiani se trouvait à Alger. Juppé rentre dans une colère folle. Chirac affirme ne pas être au courant. Bien sûr qu'il était au courant.»PifferCharles Pasqua développe alors son propos devant le journaliste qui l'écoute médusé : «Marchiani avait gardé un certain nombre de contacts (on ne saura pas lesquels, ndlr).» Pierre Pasqua, fils de Charles et son conseiller, décédé en février 2015 précise : «Des éléments écrits avaient été transmis à Chirac. Il n'y a rien de mystérieux là-dedans.» Le père explique l'affaire : «Juppé fait un communiqué disant que le préfet du Var n'a rien à faire en Algérie et il est prié de revenir à son poste dans le Var dans les plus brefs délais, ce qui est interprété par les islamistes comme le refus de toute négociation.»Et de préciser : «Juppé ne peut pas piffer Marchiani.» Un extrait d'un documentaire sanctionne alors la conclusion macabre : «Le 21 mai, les corps sont découverts.» Pasqua filmé alors qu'il se sait en fin de vie, en 2014, n'ignore pas que le documentaire sera diffusé après son décès. Il martèle clairement : «Je l'ai dit à deux ou trois reprises : Juppé a été le responsable dans un certaine mesure de l'assassinat des moines.» Au journaliste qui réagit en disant : «C'est très grave ce que vous dîtes là», Pasqua persiste et agrandit le cercle des responsabilités : «Bien sûr. C'est très grave et c'est très grave aussi pour Chirac.»Walid Mebarek
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Posté Le : 03/07/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : El Watan
Source : www.elwatan.com