Abou Djamal se souvient encore du matin de septembre 1982 où des miliciens libanais alliés à Israël l'avaient réveillé, lui et les membres de sa famille, et les avaient traînés dehors jusque dans la rue. Les hommes en armes l'avaient contraint, lui et d'autres réfugiés palestiniens des camps beyrouthins de Sabra et Chatila, à s'aligner, avant de séparer les hommes des femmes. Puis ils avaient tiré des rangs les jeunes gens devant être tués. Le fils d'Abou Djamal, qui avait 19 ans à l'époque, fut parmi ceux choisis pour être liquidés."Il était en dernière année scolaire", raconte Abou Djamal, qui porte un badge avec la photo de son fils. "Il n'a jamais vu son diplôme".Les troupes israéliennes n'étaient pas intervenues durant le massacre, l'une des pires atrocités de la guerre civile libanaise (1975-1990). Ariel Sharon, qui est décédé samedi à l'âge de 85 ans après huit ans passés dans le coma, était ministre de la Défense d'Israël à l'époque et nombre de Palestiniens de Sabra et Chatila le tiennent toujours responsable des centaines de morts de ces massacres.Une enquête effectuée en 1983 en Israël par la commission Kahane a conclu qu'Ariel Sharon portait la "responsabilité personnelle" de ne pas avoir empêché le bain de sang, ce qui a provoqué sa démission du ministère de la Défense.Moins de vingt ans plus tard, Ariel Sharon se fit élire à la tête de son parti, le Likoud (droite), avant de devenir Premier ministre.Sans surprise, les survivants du massacre n'ont versé aucune larme samedi à l'annonce de la mort de l'ancien Premier ministre.Assise chez elle, dans la rue où s'élève un monument aux morts sur le site d'une fosse commune, Milani Boutrous Alha Bourje, qui a aujourd'hui 70 ans, s'est souvenue samedi du jour du massacre, au cours duquel son mari et son fils avaient été tués par balles. Pour elle, Ariel Sharon méritait bien pire que ce qu'il a eu."J'aurais souhaité qu'il souffre ce que nous avons enduré. Trente-deux ans que nous souffrons", dit-elle.Bourje, qui apparaît sur une photo célèbre du massacre où on la voit pleurant et agitant les bras devant une rangée de cadavres, déclare ne pas être plus optimiste quant à l'avenir, maintenant qu'Ariel Sharon est mort."Rien ne change", dit-elle. "La situation que nous vivons ne change pas".Quant à un autre rescapé, Youssef Hamzeh, né en 1947, un an avant la création de l'Etat d'Israël, il dit lui aussi avoir peu d'espoir de voir s'améliorer rapidement la vie des Palestiniens au Liban. Et selon lui, les négociations de paix en cours entre Israéliens et Palestiniens ne débouchent sur rien."Ces négociations sont vaines. Tout ce dialogue ne mène à rien, car la culture d'Israël, c'est le sang", affirme-t-il.
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Posté Le : 12/01/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Temps d'Algérie
Source : www.letempsdz.com