Algérie

PARUTION DE “CONDAMNÉS À VIVRE” AUX ÉDITIONS TIRA Farid Abache renoue superbement avec la littérature



PARUTION DE “CONDAMNÉS À VIVRE” AUX ÉDITIONS TIRA  Farid Abache renoue superbement avec la littérature
La structure de Condamnés à vivre s’inscrit à mi-chemin entre le roman et le recueil de nouvelles. C’est un texte qui se lit comme une sorte de roman tissé de quatre nouvelles, le tout soutenu par un agréable fil littéraire.

Après une très longue absence, Farid Abache, auteur de la Camisole de gré, publie un roman chez Tira Éditions. Un livre, qui devrait faire date et avec un titre qui y invite aussi : Condamnés à vivre. Les passionnés de littérature se souviennent bien de ses belles chroniques littéraires qu’il publiait dans Le Matin et dans Ruptures. Le roman commence par un séjour que le narrateur fait dans son village natal en vue d’écrire une étude littéraire sur la littérature et l’errance. Quelques heures après avoir esquissé les grandes lignes de son projet, il décide d’aller faire un tour au café du village, question de revoir ses amis d’enfance. Il tombe pile sur quatre amis professeurs au lycée. Ils lui apprennent le suicide d’un autre ami, Ali, un personnage très mystérieux, un grand passionné de littérature... Le narrateur essaie en vain de pousser ses amis à lui révéler des choses de la vie d’Ali qui auraient pu l’avoir mené à se donner la mort. Du coup, le narrateur invente une astuce avec laquelle il incite ses quatre amis à pondre chacun un texte qui expliquerait les raisons hypothétiques du suicide… Chacun des textes est supposé être le legs confessionnel d’Ali… L’un des textes dénonce la propagation de la pensée extrémiste et l’aliénation qu’exercent les hommes sur les femmes. Dans un autre, le narrateur nous parle de sa femme, qui s’est suicidée parce qu’elle n’arrivait plus à supporter la déchéance qui a pris possession du pays. Le peuple est sous l’emprise de malfrats, qui se sont substitués au système colonial d’avant. Terrassée par cette désillusion, elle a préféré mourir… Son mari, le narrateur, plonge, lui aussi, dans ce désenchantement et finit par se résoudre à aller rejoindre son épouse dans un monde, qui serait sans doute meilleur. Ainsi, confie-t-il, “demain, je prendrai congé de cette vie qui ne me sied plus. À quoi bon vivre alors que la confiance en l’homme n’est plus de ce monde ?! Pendant les années de lutte, je croyais qu’une fois l’indépendance acquise, les citoyens se mettraient d’accord sur tout, rien qu’en clignant de l’œil. À présent, ils ne se saluent que par l’entremise d’une averse de balles… Au lieu de mourir enseveli sous ces balles, je préfère me diluer dans cette surface blanche et limpide. Adieu !”. Un autre texte vient prendre le relais. Une plongée au plus profond de l’enfance pour peindre les premiers frémissements du désir. Désir sensuel et sexuel, qui commence à germer dans le corps de l’enfant. Une fois adolescent, celui-ci subit une frustration qui déséquilibre et dénature son psychisme. Cette société encrassée de pharisaïsme empêche cet homme de vivre pleinement sa sexualité et se retrouve du coup entraîné vers des pratiques honteuses et perverses… Incapable de remédier à son mal et d’entretenir une relation amoureuse normale, il se résout à mettre un point final à cette existence, qui le martyrise… L’auteur de ce texte, fourni par l’un des quatre amis et censé avoir été rédigé et légué par Ali, s’exclame : “Comment résister à la démence lorsque l’on vit dans une société friande de paradoxes et de complexes ?! Une société qui pourchasse le naturel et s’affuble de déguisements et de masques. Une société qui fait de la privation l’honneur suprême et de l’assouvissement l’opprobre ineffaçable… Notre pays grouille d’hommes ratatinés et de femmes non moins racornies ; cependant, chaque sexe se cloître dans un enclos remâchant sa soif, refoulant sa libido, colmatant son orifice vital parce que d’absurdes et obscurs principes religieux font obstacle aux rassasiantes rencontres. Les hommes et les femmes s’ignorent mutuellement au même titre que chacun d’eux s’ignore lui-même.” La structure de Condamnés à vivre s’inscrit à mi-chemin entre le roman et le recueil de nouvelles. C’est un texte, qui se lit comme une sorte de roman tissé de quatre nouvelles, le tout soutenu par un agréable fil littéraire. Le style est irrigué de part en part d’un lyrisme de bon aloi et soutenu par une remarquable force métaphorique. La technique littéraire, la mise en abyme, utilisée par l’auteur avec délicatesse, où l’on assiste à l’enchâssement d’un récit dans l’autre et on voit l’auteur écrivant le texte dont il est question dans le livre même.




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