Algérie

Participation des repentis aux élections



La charte est-elle un faux barrage ? Chasser le naturel, il revient au galop. Les échéances électorales en Algérie se suivent et se ressemblent avec leur lot de polémiques, de provocations voire de menaces proférées par ceux-là même qui en sont théoriquement et légalement exclus. En l?occurrence, d?ex-chefs terroristes et des repentis s?apprêtent, avec une sacrée dose d?arrogance, à se lancer dans la bataille des législatives. Comme si de rien n?était? Et c?est l?inévitable Madani Mezrag, l?ex-émir national de l?AIS, qui a sonné l?alerte il y a quelques jours à travers la presse, menaçant d?adopter « un autre discours » si jamais les autorités venaient à lui barrer la route des élections. Et on devine déjà la nature de cet « autre discours », dont parle l?ancien responsable de l?armée islamique. Mais si cet individu est à la rigueur dans son rôle de distiller ce genre de littérature, subversive aux entournures, au même titre d?ailleurs que Ali Benhadj, il est en revanche curieux d?entendre des responsables de partis politiques offrir publiquement leurs services à ces repentis. Bouguerra Soltani, président du MSP, a été jusqu?à soutenir que Ali Benhadj « est le bienvenu sur nos listes s?il le désire dès lors qu?il dispose de ses droits civiques ». Le néo-chef du MRN lui a emboîté le pas, avant-hier, dans sa conférence de presse en annonçant que les listes de son parti « sont ouvertes aux repentis » en prévision des législatives. Il se dit aussi que le fameux Mouvement d?espérance nationale (MEN) de Boukhezna devrait servir de réceptacle à tous ceux qui auraient de près ou de loin un quelconque lien avec la tragédie nationale. Ce fut d?ailleurs le cadre politique qui a été, un moment, proposé à Rabah Kébir avant d?être poliment invité à patienter, le temps que les Algériens oublient un peu la nébuleuse du parti dissous. Il est donc clair que les anciens du FIS et de l?AIS sont courtisés et racolés sur la place publique. C?est une sorte d?OPA que ces partis ou ces mouvements qui sont d?extraction politique islamiste lancent en direction de ceux qui sont, croient-ils, anoblis par la magie de la charte. Au grand dam des autorités qui croyaient en avoir fini avec ce genre de spéculations grâce justement aux dispositions de cette même charte. Or, il se trouve, apparemment, que la loi sur la paix et la réconciliation n?est pas suffisamment étanche pour parer à l?infiltration de ces individus dans l?arène politique. Si, fondamentalement, le texte présidentiel exclut expressément ceux qui sont « impliqués dans la tragédie nationale et ont abusé de la religion à des fins politiques », ce document pèche par son imprécision et sa duplicité. Le fait que le ministre de l?Intérieur, Yazid Zerhouni, a été appelé à plusieurs reprises à fermer la porte devant les Mezrag et consorts prouve que le dossier est loin d?être clos. A fortiori quand c?est le chef du gouvernement, lui-même, qui, consciemment ou inconsciemment, reste dans le vague et entretient le flou sur les limites d?application de cette loi. Incontestablement, la charte n?est pas claire ou à tout le moins sujette à moult interprétations en l?absence d?un texte d?application qui aurait tranché dans le vif. L?on se demande d?ailleurs pourquoi les autorités tardent à promulguer un décret d?application de ces mesures concernant les repentis pour en finir définitivement avec ce dossier qui rappelle le fameux feuilleton du retour du FIS. Sur ce plan, l?Etat doit urgemment tirer les choses au clair avant qu?il ne soit trop tard.


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