Algérie

Paris veut «modérer» le cinquantenaire de l'indépendance algérienne ! Etrange mission pour un ex-ambassadeur de France



Le cinquantenaire de l'indépendance algérienne semble donner quelques soucis au gouvernement français dans une année électorale où lui-même a tendance à flatter les différents lobbies électoraux, comme en témoigne l'adoption de la récente loi controversée sur la criminalisation de la négation du génocide arménien.

Mardi, M. Alain Juppé, qui avait ostensiblement marqué ses réserves au sujet de la loi sur le génocide arménien, avait exprimé le «souhait» que la célébration du 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie se fasse «dans un esprit de modération en essayant d'éviter les extrémismes de tous bords». Le ministre français des Affaires étrangères a même fait état d'un accord avec le président Abdelaziz Bouteflika «d'envisager la célébration du 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie dans un esprit de modération, en essayant d'éviter les extrémismes de tous bords». «J'espère qu'on va continuer sur cette ligne. Surtout, nous nous étions mis d'accord pour dire : Regardons l'avenir. Essayons de fonder la relation franco-algérienne sur l'avenir et pas sur le passé», a-t-il ajouté.

L'ancien ambassadeur français à Alger, Hubert Colin de Verdière, s'est ainsi vu confier par le président français Nicolas Sarkozy une «une mission de coordination des actions liées, en France, au cinquantième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie». Sa mission, a expliqué un porte-parole du Quai d'Orsay, est de «recenser les différentes initiatives et manifestations organisées ou envisagées par les institutions publiques nationales, notamment culturelles, ainsi que par les collectivités territoriales, et à les encourager». Il s'agit clairement de «cadrer» le cinquantenaire, la mission ayant ainsi pour but de «faire des propositions pour que les évènements qui accompagneront cet anniversaire contribuent au renforcement des relations et de l'amitié franco algérienne».

Il y a donc un volet franco-français sur lequel doit se pencher M. De Verdière et qui n'est pas le plus aisé. L'année du cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie tombe en pleine campagne électorale pour l'élection présidentielle, propice à toutes les surenchères électoralistes surtout entre les différentes factions de la droite française. Il y a un lobby de l'Algérie française qui pèse et dont on a pu mesurer l'influence avec la fameuse loi du 23 février sur les «bienfaits» du colonialisme qui a provoqué une grosse controverse.

UN VOLET ALGERIEN QUI INTRIGUE

On est quelque peu sceptique sur la capacité de «cadrage » des courants qui restent encore profondément Algérie française et qui ne se recrutent pas seulement parmi l'extrême droite. Il est probable que le gouvernement français parvienne à contenir les «excès » en France, lui-même ayant montré dans l'affaire du génocide arménien, qui dégrade sa relation avec la Turquie, qu'il est électoralement à l'affut des «aubaines ». Le cinquantenaire n'est pas propice à la «modération », surtout que l'on est en période électorale. Et on peut ajouter aussi qu'en Algérie, l'année 2012 est également électorale. C'est ce qui rend encore plus intriguant le volet «algérien » de la mission de M. De Verdière. Il existe, bien sûr, un accord tacite entre les autorités algériennes et françaises pour ne pas trop remuer cet aspect. Mais l'accord tacite né d'une impossibilité à s'entendre sur ces questions historiques semble vouloir laisser le temps au temps. C'est un accord minimaliste «d'abstention » et de «silence » qui, normalement, ne peut servir à mener des actions «communes».

D'où la question : de quoi va donc discuter Hubert Colin de Verdière avec les autorités algériennes ? La question est des plus polémiques. On a pu le mesurer avec l'intrusion très controversée de M. Ahmed Ouyahia dans la dispute entre la France et la Turquie au sujet du génocide arménien. En déniant, fort maladroitement, à la Turquie le droit de faire référence à l'histoire algérienne, le Premier ministre a donné l'impression de prendre fait et cause pour la France, ce qui a suscité des critiques qui ne se limitent pas aux islamistes. Le gouvernement algérien ne pourra pas lui aussi «cadrer» et «lisser» l'expression en Algérie autour du cinquantenaire. Avec un passif historique non traité dans un double contexte électoral, essayer de contenir l'expression et de la lisser pourrait être une mission impossible. A Alger comme en France. Même avec Ouyahia et De Verdière !




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