L'avancée d'éléments de groupes armés contrôlant le Nord-Mali en direction de la partie sud du pays encore sous l'autorité de Bamako a offert à Paris l'argument de l'urgence pour rendre acceptable le déploiement au Mali d'une force militaire française. Il est incontestable que les autorités algériennes ont été prises de court par le développement des événements s'étant produits au Mali qui ont permis à la France d'atteindre l'objectif qu'elle s'est tracé pour le Sahel, celui de sa présence militaire dans la région. Il est clair qu'elles n'ont pas vu venir le coup que Paris a exploité pour réaliser son dessein. Leur imprévision se doublerait de naïveté s'il s'avère que les éléments armés qui ont ouvert les hostilités avec l'armée malienne dans la région de Kona appartiennent à Ansar Eddine.
Dans la crise malienne, Alger semblait avoir barre sur ce mouvement dont elle paraissait avoir convaincu les chefs d'opter pour l'option de la solution politique à la crise malienne prônée par elle auprès des instances régionales et internationales. Si ce même Ansar Eddine a créé la situation ayant rendu inévitable l'intervention militaire qui plus est française, à l'insu des autorités algériennes, comment ne pas conclure que celles-ci se sont lourdement trompées sur ses intentions et ses buts. En tout cas, Alger est placée devant un fait accompli qu'elle ne peut dénoncer car justifié par un enchaînement d'événements à la gravité incontestable autorisant une réaction militaire officiellement demandée par ailleurs par les autorités de Bamako. Son silence alors que l'intervention militaire française est chose faite en dit long sur l'inconfort de sa position face aux événements dont le nord du Mali est maintenant le théâtre.
Les autorités ne donnent pas l'impression d'avoir péché par naïveté sur l'influence qu'elles pensaient avoir sur le groupe armé Ansar Eddine. Leur naïveté s'est étendue à croire que les Etats-Unis dissuaderaient en tout état de cause la France de s'impliquer directement et militairement dans la crise malienne. Washington les a douchées en accordant son feu vert à Paris et en faisant savoir qu'elle apportera un soutien multiforme à la force militaire française qui se déploie au Mali. L'heure de la solution politique à la crise malienne est manifestement passée. La France qui n'y était pas favorable est maintenant maîtresse du jeu dans cette crise. La présence de sa force militaire au « front », mais à Bamako également sous prétexte de « protéger » les ressortissants français et étrangers, va étouffer au Mali la voix des partisans de cette option.
Comme ce fut le cas pour la Libye, Paris l'a momentanément emporté sur Alger qui a voulu empêcher la militarisation de la solution du conflit malien et qui plus est par une intervention dont la France aurait les commandes. Comme les premiers engagements le montrent, la force d'intervention française parviendra aisément à stopper « l'offensive » vers le Sud-Mali des groupes armés. Mais la France a mis le doigt dans un engrenage qui va l'entraîner dans une situation inextricable tant au plan militaire que diplomatique. Paris a pu rendre possible et acceptable l'intervention de ses militaires, il lui sera difficile de s'en dépêtrer sans « casse » pour ses intérêts stratégiques dans le Sahel. Car quelle que soit l'intelligence mise à légitimer l'intervention française, elle ne masquera jamais les relents de la politique « Françafrique » qui l'inspire au fond.
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Posté Le : 13/01/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kharroubi Habib
Source : www.lequotidien-oran.com