Alors que le dossier est entre les mains de la justice algérienne, Paris se mêle de l'affaire de la petite Safia. L'objectif du Quai d'Orsay : exercer une pression politico-médiatique sur les autorités algériennes, afin de les amener à rendre la fillette à son «père», Jaques Schabook. Ne se laissant guère impressionner par ces manoeuvres, Alger préfère, à juste titre, faire la sourde oreille et laisser la décision à la justice algérienne, qui tranchera dans quelques jours. Par la voix de son porte-parole adjoint du Quai d'Orsay, Frédéric Desagneaux, Paris a réclamé hier, que «l'enfant soit rendue à son père». Cité par l'Agence France Presse (AFP), le ministère français des Affaires étrangères français a affirmé que la situation juridique de «Sophie Scharbook» est «clairement établie et la France continue de demander qu'elle lui soit rendue». «Tant par les actes d'état civil dont dispose Jacques Scharbook que par les décisions judiciaires rendues en Algérie, il résulte que Sophie Scharbook est la fille de Jacques Scharbook», a souligné le porte-parole adjoint du gouvernement français, interrogé sur une information de presse en Algérie assurant que ce dernier n'est pas le père de la fillette. «La Cour suprême algérienne a, dès le 13 février 2008, confirmé que la garde de l'enfant devait revenir à Jacques Scharbook. Nous continuons de demander la stricte application de cette décision de la justice algérienne, dans les meilleurs délais», a ajouté le porte-parole, en insistant sur un rétablissement des «droits de Jacques Scharbook à l'égard de son enfant (...), dans l'intérêt supérieur de la petite Sophie».
Ainsi, en mettant en avant l'acte civil de «Sophie Scharbook» et la décision de la Cour suprême algérienne confiant la garde de l'enfant à Jaques Scharbook, pour étayer la parenté de celui-ci, le porte-parole du Quai d'Orsay fait abstraction d'une bonne partie, voire essentielle, du dossier. Celle qui est en défaveur de son ressortissant. Tout d'abord, tient à souligner l'avocat de la famille maternelle de Safia, maître Rabeh Berbadj, contacté hier par nos soins, «il n'est pas besoin d'être grand clerc en droit pour savoir qu'un arrêt de la Cour suprême en matière de statut personnel n'est pas systématiquement exécutoire mais peut être remis en question en cas, par exemple, d'apparition d'éléments nouveaux». C'est le cas dans cette affaire, où l'on a un test ADN, à partir d'un prélèvement de salive, effectué au niveau du laboratoire de la police scientifique de Châteauneuf, à Alger, qui confirme que le père de l'enfant est un Algérien, en l'occurrence Yousfi Mohamed, le premier époux de la défunte mère, et non pas le Français Jaques Scharbook. Cette expertise scientifique, Frédéric Desagneaux n'en parle pas. Pourtant, il s'agit là d'une pièce clé du dossier. Mieux encore, l'on apprendra de source judiciaire près la Cour d'Oran, qui examine l'affaire, que le conseil de la belle-famille de Safia a déposé hier devant la Chambre du statut personnel une deuxième expertise basée sur l'analyse génétique relevant quatorze «points positifs» démontrant que le père de l'enfant est bel et bien Yousfi Mohamed. La sentence sera prononcée le 11 mai. La belle-famille de Safia ouvre un autre front de combat : elle entend, nous confie son avocat, démolir pierre par pierre la décision de la Cour suprême du 13 février 2008 qui a confirmé que la garde de l'enfant devait revenir à Jacques Scharbook. Pour ce faire, l'avocat compte interjeter appel contre la décision du juge du tribunal de première instance qui a régularisé, «à tort», selon lui, la liaison conjugale entre Jaques Sharbook et la mère de Safia, mariage par acte civil en France. Selon le même avocat, «ce mariage n'aurait jamais dû être validé» du point de vue de la loi algérienne, qui s'inspire de la «charia islamia». «Non seulement, le magistrat a validé cet acte civil établi à Var mais il a invalidé et annulé l'acte de réconciliation de la même femme avec son premier époux, du fait que ceux-ci avaient divorcé à l'amiable».
«Or, selon l'avocat de la belle-famille de Safia, le plus drôle et le plus agaçant à la fois dans cette affaire tragi-comique : le refus de Jacques Scharbook de se soumettre à des tests ADN pour nous prouver qu'il est le géniteur de Sophie».
Et l'avocat de déclarer sur son honneur, et de jurer aussi, que la petite la lui sera rendue volontiers, en main propre, par sa grand-mère dès qu'il nous apporte la preuve scientifique qu'il en est le père.
Il importe de rappeler que la Cour de justice d'Oran, qui était appelée à statuer sur l'affaire, et par-là même à fixer le sort de Safia, a mis en délibéré son verdict concernant la promulgation du premier test ADN pour le 17 mai. La décision faisait suite à la demande de l'avocat de Jacques Scharbook qui a réclamé un délai pour consulter le rapport d'expertise. Se refusant de se plier aux résultats des scientifiques, le ressortissant français, qui, autrefois, résidait à Arzew, bien avant qu'il n'ait été représentant de la maison Renault en Algérie, Jacques Scharbook clame toujours qu'il est le géniteur de «Sophie Scharbook» et n'a qu'une seule hâte : prendre «sa» fille entre ses bras et regagner la France, par le premier vol. Dans une déclaration à la presse française, Jacques Scharbook s'est dit prêt à s'enchaîner aux grilles de l'Élysée pour crier son désespoir. « Je ne veux plus me contenter de simples assurances. Je veux qu'on me rende ma fille. Que ce soit une décision algérienne, ce n'est pas mon problème. Sophie est Française et la Constitution de notre pays dit bien que l'État doit aide et assistance à ses ressortissants ». Son voeu est pieusement et énergiquement partagé par sa propre famille, sa mère et sa soeur notamment, dont «les corps sont à Seyne-sur-Mer, mais les coeurs sont à Oran». Mais, de l'autre côté, il y a la famille maternelle de «Bouabdellah Safia», solidement rassemblée autour de l'intraitable et infatigable grand-mère, qui n'est pas prête à céder leur enfant pour rien au monde. Pour la tante maternelle de Safia, il n'y a pas l'ombre du doute : «Safia est la fille de Yousfi Mohamed, le premier époux de ma défunte soeur (la mère de Safia décéda dans un accident de la route en mars 2005). Ma soeur a découvert que son deuxième mari, Jacques Scharbook, avait falsifié l'extrait de naissance de son nouveau-née Safia (venue au monde, à Var, le 10 décembre 2001)». En effet, Jacques Scharbook a, à l'insu de sa femme, enregistré à l'état civil de Var le nouveau-née sous le nom de Scharbook Sophie». Une initiative que la mère a si mal appréciée qu'elle a décidé de rentrer au bercail pour s'installer chez sa mère et demander le divorce, mais le divorce lui a été interdit, car c'était un mariage non valide en Algérie.
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Posté Le : 05/05/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Houari Saaïdia
Source : www.lequotidien-oran.com