Ayant vécu les événements avant, pendant et après la guerre de libération de mon pays, je viens, par ce présent article, rappeler certains faits qui se sont déroulés depuis 1962 et essayer d'en tirer des leçons. Le premier communiqué du 1er Novembre 1954, date que tout le monde connaît, a appelé à la restauration de l'Etat algérien démocratique et social, dans le cadre des principes islamiques. Malheureusement, cet objectif a été dévié de sa voie et a été remplacé par un système anarchique constitué d'un mélange d'idéologies importées d'ailleurs et qui n'ont rien à voir avec les principes du peuple algérien.Ces idéologies socialo-communistes sont venues des pays du bloc de l'Est, sous prétexte que ces derniers nous ont soutenus matériellement et politiquement durant la guerre de libération contre la France et l'OTAN. Après l'indépendance, le pays, se trouvant en défaillance culturelle, fit appel à des enseignants de pays arabes venus en renfort enseigner dans nos écoles. Hélas, l'arabe injecté n'était pas celui répondant aux attentes du pays, mais un arabe issu du panarabisme. D'autre part, les éléments du FLN envoyés pendant la Révolution dans ces pays pour étudier ou pour d'autres missions sont revenus, après l'indépendance, pour prendre des postes de responsabilité et sont même devenus des guides du parti unique, mais ils sont revenus imprégnés des idéologies socialo-arabistes dont les concepteurs sont :- Le fondateur du parti Baath (1942), Michel Aflaq, dont la majorité du peuple algérien ignore l'existence et les idéaux. Il est né en Syrie, d'origine juive, d'opinion laïque, de religion chrétienne et de revendication nationaliste arabe. A cause de divergences avec le président Hafed Al Assad, il s'exila à Baghdad, où il trouva en la personne de Saddam Hussein un soutien. Ce dernier lui offrit un palais et fit de lui son penseur et conseiller en faveur du socialo-arabisme. Leur slogan trompeur, pour les non-éclairés, était l'arabo-islamisme.Ce leurre a été largement utilisé dans notre pays après l'indépendance. Rappelons que le président irakien a fait subir à son peuple, durant des décennies, toutes les affres possibles et imaginables qui l'ont mené vers la fin que nous connaissons tous. Quant à la Syrie, à cause des idéologies néfastes du panarabisme, elle est arrivée, actuellement, à une situation sans issue.- Djamel Abdel Nasser, ancien président égyptien, chef de la Révolution de 1952 des jeunes officiers libres, dont l'histoire est assez chargée, à commencer par l'accord qu'il a conclu avec les Frères musulmans pour détrôner le roi Farouk, mais cela ne dura pas longtemps puisque, juste après, il les trahit. Nul n'ignore combien de crimes ont été organisés par la suite par ce «grand leader arabe» de l'époque. Après l'indépendance de notre pays, l'Algérie se trouvant face à un vide culturel, fit appel à des coopérants venus d'Egypte, d'Irak, de Syrie et de la Palestine ; ces enseignants ont malheureusement injecté dans notre pays le virus de l'arabisme qui a tout d'abord engendré, pour un bon nombre de citoyens, le rejet de tout ce qui se rapproche de l'arabe, y compris l'islam, créant un amalgame avec la religion, surtout dans les milieux extrémistes berbère et francophone, passant outre l'origine musulmane des nobles traditions de la Kabylie et du reste des régions de l'Algérie profonde.Plus tard, le système qui nous a été imposé par le parti unique prit le flambeau du panarabisme et des idéologies du bloc de l'Est. En parallèle, les résidus que la France a laissés ne voulaient pas se détacher des idées coloniales et impérialistes de la France, faisant fi du million et demi de martyrs tombés au champ d'honneur en l'espace de sept années de guerre seulement. Il y avait, en plus, ces nostalgiques de la France qui ont eux-mêmes fait subir au peuple leur mépris et leur complexe de supériorité.Par conséquent, la majorité des Algériens se trouvaient entre deux feux, car durant les premières années de l'indépendance, il était plus aisé de parler, dans la rue et les administrations, en langue française (qui était considérée comme la deuxième langue nationale) plutôt que dans la langue maternelle, soit le berbère (le kabyle de par la situation géographique de la Kabylie par rapport à la capitale, le chaoui, le M'zab ou le targui). Sachant que l'officialisation de la langue berbère, sous ses diverses formes, a été, durant des décennies, l'une des revendications d'une région spécifique de l'Algérie, qui demandait à ce que la langue berbère soit officiellement la deuxième langue nationale.Comme on le sait, à cause de ce problème, il y a eu beaucoup de morts et de handicapés dans cette région qu'est la Kabylie. Sans pour autant que ce problème soit réglé à ce jour. Malgré toutes ces idéologies imposées au peuple algérien depuis l'indépendance, nous continuons de subir l'échec de toutes les révolutions : culturelle, agraire, industrielle et de santé publique :1- Révolution culturelle : en nous imposant l'arabe à outrance à l'école, du primaire au secondaire, le système éducatif se retrouve en panne au cycle universitaire, puisque la plupart des filières sont dispensées en français, laissant l'étudiant confronté à la situation de transition d'une langue à une autre totalement opposée, engendrant ainsi le niveau médiocre que nous connaissons de nombreux universitaires victimes de ce système. Quant à l'islam, que nombre de profanes rejettent, c'est une religion qui a combattu le racisme, car il respecte toutes les races et les nations avec leurs différentes coutumes et leur diversité linguistique, comme indiqué dans le verset coranique suivant : «Parmi Ses signes la création des cieux et de la Terre et la diversité de vos langues et couleurs.Il y a en cela des signes certains pour les gens qui savent», chapitre 30, verset 22. L'islam prône la liberté de l'individu. Dieu, notre créateur, considère que l'être humain est la meilleure de Ses créatures et a envoyé les Prophètes et messagers (Que le Salut soit sur Eux) pour faire sortir l'Humanité de l'adoration de fausses divinités à la croyance unique en son créateur. De plus, il ne faut pas oublier que l'islam est ancré depuis des siècles dans la Kabylie et l'Algérie profonde et que, même avant l'islam, nos ancêtres avaient déjà le sens de l'honneur, de la pudeur et du combat pour la liberté.D'ailleurs, il y a encore moins d'un siècle en arrière, «tajmaât» (lieu de concertation des villageois) était dotée de la morale islamique, et quiconque voulait y prendre la parole, du chef du village au simple citoyen, se devait d'abord de saluer le Prophète (QSSSL), faute de quoi il aurait à payer une amende. De nos jours, on constate une anarchie totale lors des assemblées dans quelques-uns de nos villages kabyles où :- ni le ridicule ne respecte le sage, - ni l'illettré ne respecte l'intellectuel,- ni le jeune ne respecte le plus âgé,- ni le vieux ne respecte le jeune.J'attire l'attention de mes compatriotes kabyles que les Chaouis, Mozabites et Touareg sont plus éclairés que nous sur la religion, car leur niveau cultuel est bien plus élevé que le nôtre. Quant à nos leaders des partis dits laïques ou des mouvements berbéristes, ils se leurrent sur la laïcité qui était de conception française (1905) concernant la séparation de la religion et de l'Etat, contraire aux principes algériens, négligeant le fait que le système est lui-même loin des principes islamiques dictés par la plateforme du 1er Novembre 1954.D'autre part, j'attire l'attention de mes compatriotes que pour la majorité des leaders berbères s'adressant à travers l'audiovisuel il leur est impossible de tenir une discussion dans une seule langue, surtout en kabyle, mais se trouvent dans l'obligation d'utiliser la langue française dans 90% de leurs discours, sachant que les téléspectateurs qui les suivent sont, pour la plupart, des gens qui ne comprennent pas très bien le français. Je pense, pour ma part, que ces interlocuteurs devraient être plus concrets. Chaque Berbère doit savoir que s'il est Berbère ce n'est pas parce qu'il l'a choisi, mais que c'est Dieu qui l'a voulu.2- Révolution agraire : alors que l'Algérie a été un grenier des peuples occidentaux pendant des siècles (d'où son surnom de «grenier de Rome»), la réforme agraire des années 1960 a été un échec total. Cette politique d'organisation agraire, copiée sur le modèle de l'Est occidental, a non seulement détruit ce que la France a laissé derrière elle, mais a même désertifié le pays.Actuellement, à notre grand malheur, l'Algérie importe 70% de sa nourriture. Où va-t-on '3- Révolution industrielle : l'industrialisation a elle aussi été un échec pour notre pays. Le système exigeait de ses cadres, au départ, pour diriger ses administrations et ses usines trois critères : compétence, intégrité et surtout engagement politique. Au fil des années, les usines fermaient les après les autres à cause du laxisme, de l'incompétence et de la non-intégrité de ses cadres et dirigeants, ces derniers ne gardant que leur engagement politique. Voilà qu'à présent l'Algérie se retrouve avec des centaines de milliers de chômeurs. Où va l'Algérie '4- Révolution de santé publique : la médecine gratuite des années 70', qui a été conçue préalablement pour les citoyens nécessiteux, est devenue au fil des années une médecine au service des gens aisés et des passe-droits, transformant ainsi, pour les gens sans moyens et connaissances, les hôpitaux et centres de santé en lieux de misère gratuite. En effet, les services de soins de certains établissements sanitaires reflètent l'image de la santé publique. Le simple citoyen y rencontre des difficultés en se présentant pour des soins ou une intervention, à commencer par le mauvais accueil jusqu'à la consultation où il est confronté au manque de matériel ordinaire et d'hygiène. Jusqu'à l'hospitalisation et l'intervention, s'il y survit, vu l'échéance des rendez-vous concernant surtout les malades lourds.Sans oublier le manque d'organisation dans beaucoup de blocs opératoires de certains établissements hospitaliers publics ou privés. Je parle en connaissance de cause. Actuellement, les abattoirs, dans certains pays qui se respectent, sont mieux structurés et organisés que certains de nos blocs opératoires. C'est pourquoi les dirigeants de notre nomenklatura, du plus petit au plus grand, se déplacent à l'étranger pour se faire soigner sans aucun complexe. Parmi les autres méfaits du système, on compte aussi le problème de l'alcool et de ses dérivés, surtout en Kabylie qui a été considérée par le système comme une région de pervers et d'anti-islamiques.Dans les années 70', un certain wali zélé prit la décision unilatérale d'interdire l'alcool dans sa wilaya (Tizi Ouzou). Ceci fut pour les consommateurs une provocation semblable à celle d'un nid de guêpes et eut pour conséquence la vente clandestine de l'alcool qui fit encore plus de ravages, à l'image de la prohibition des années 30' aux USA. Plus tard, l'interdiction fut levée et les voraces de biens illicites, profitant de l'encouragement du système et de l'inconscience de la population propagèrent à grande échelle les débits de boissons alcoolisées et même de drogue. Ceci provoqua des problèmes énormes dans des familles en détresse dans la région ainsi que la détérioration de l'environnement due aux jets de bouteilles en verre et de canettes dans les fossés de nos routes.Révolte du peuple, 1988A cause de toutes les injustices subies par la population depuis l'indépendance, il y a eu un ras-le-bol qui a engendré la révolte du 5 Octobre 1988. Le système a réagi férocement contre le peuple, faisant des centaines de morts et de blessés suite aux tortures de toutes sortes. La réponse du système fut semblable à celle du colon lors du soulèvement de décembre 1960. Juste après, le système s'est trouvé dans l'obligation d'ouvrir un espace de démocratie en permettant la création de plusieurs partis et en officialisant d'autres qui agissaient dans la clandestinité. Je tiens à rappeler que ces derniers ont pris le train en marche en essayant de récupérer le mouvement de révolte.Ce fut une récréation pour le peuple qui était assoiffé de liberté d'expression.Arrivèrent les élections des APC. Le FIS fut choisi par le peuple en grande majorité, certains ayant agi non pas par conviction mais plutôt pour sanctionner le parti unique. Hélas, ce dernier avait déjà vidé les mairies de ses biens, y compris les lots de terrain qu'ils a distribués à ses adhérents avant les élections, laissant ainsi une anarchie totale et un vide juridique dans les mairies. L'Algérie entra alors dans une euphorie. Le parti majoritaire (le FIS) compta sur le nombre de ses adhérents. La majorité d'entre eux n'ont pas adhéré par conviction mais par intérêt, souhaitant ainsi arriver au pouvoir. Pour eux, l'aspect physique et vestimentaire était plus important.Concernant leurs agissements et comportements dans les entreprises étatiques, par les vols à outrance et les sabotages, sous prétexte de servir un Etat laïque, ils étaient loin d'être conformes aux règles de l'islam. En effet, profitant du laxisme du système, certains imams, limités dans leur vision et connaissance de l'islam, ainsi que leurs disciples, notamment la branche «El Hidjra oua Takfir», dérivé d'une des branches des Frères musulmans d'Egypte apparue en 1975, firent des prêches rétrogrades et virulents, allant même jusqu'à recommander le djihad contre le système qui était laïque et altérant même des éléments sérieux et compétents qui aimaient leur pays.Ce discours ne tomba pas dans l'oreille d'un sourd, puisque tous les marginaux, bras cassés et analphabètes y trouvèrent leur compte. Prétextant la répression du système, ils finirent par plonger le pays dans un chaos dont les conséquences ne finissent pas de s'en faire ressentir. On compta des milliers de morts, blessés et prisonniers et même des disparus pour lesquels le sort est toujours inconnu. Sans oublier la faillite dans laquelle s'est retrouvée l'Algérie. Beaucoup de personnes qui étaient sincères ont même payé de leur vie ou de leur liberté un fort tribut.La majorité des marginaux ont repris leurs anciens comportements juste après la répression. Je tiens à rappeler que dans les années 80', certains imams prônaient un islam imbibé de charlatanisme, importé de certains pays arabes féodaux et d'Afghanistan, laissant de côté tout ce que nous ont légué, sur l'islam, nos anciens et contemporains oulémas et penseurs algériens tels qu'Ibn Badis et ses compagnons et Malek Bennabi, penseur dont les conceptions d'organisation de la société ont été adoptées par certains pays non arabes et intégrées dans leur système de gouvernance.ConclusionLes gens du système qui prônaient les principes fondamentaux du 1er Novembre 1954 ne les ont pas respectés, puisqu'au lieu d'?uvrer pour l'intérêt de leur peuple, ils servaient leurs propres intérêts, plongeant ainsi le pays dans un marasme qui a duré plus d'un demi-siècle. C'est pourquoi je pense qu'il est temps de se réveiller et d'?uvrer pour le bien de notre pays :1. En respectant la liberté d'expression et non la liberté bestiale.2. En respectant les bonnes initiatives venant de chaque citoyen sincère qui veut apporter un plus à son pays, basées sur les principes fondamentaux de notre peuple pour lesquels sont tombés au champ d'honneur un million et demi de martyrs en l'espace de sept années de guerre seulement.3. En se mettant sérieusement au travail et en développant la notion de travail bien fait.4. En entreprenant le changement de notre comportement dans le sens de l'amélioration.En effet, le Prophète (QSSSL) a dit à ses compagnons après leur victoire contre les Arabes pervers de La Mecque : «Nous avons terminé le petit combat (djihad), mais il nous reste maintenant le Grand combat qu'est la révolution de la transformation de soi-même». Ce que nous avons malheureusement négligé juste après l'indépendance en nous noyant dans nos passions, peuple, en général et nombre d'anciens combattants (moudjahidine) en particulier. D'autre part, Dieu dit : «Dieu ne change l'état d'un peuple que s'il change ce qu'il y a en lui-même (chapitre 13 verset 11).Lutter contre ses passions est assez difficile pour l'être humain, mais que chacun de nous fasse un effort pour y parvenir, et ce, dans l'intérêt de la société, car, à mon humble avis, c'est l'une des meilleures solutions qui nous mèneront vers le progrès et qui nous sortiront de la médiocrité dans laquelle nous vivons et qui n'a que trop duré.
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Posté Le : 02/11/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Oumehdi Hanafi
Source : www.elwatan.com