Algérie

Parcours atypique d'un enfant de Touggourt De Sidi Slimane à Tokyo



Parcours atypique d'un enfant de Touggourt                                    De Sidi Slimane à Tokyo
Abdelaziz Benzaoui. Ce nom ne dit peut-être pas grand-chose en Algérie, et pourtant ! C'est celui d'un «maître sayen».
Numéro un en arts martiaux en Suisse, et de par le monde, l'une des rares ceintures noires, sixième dan, en ce qui concerne l'aïkido. Cet homme, âgé aujourd'hui de 82ans, est né à Sidi Slimane, dans la daïra de Touggourt. C'est à l'âge de six ans que ses parents l'envoient au chef-lieu de la wilaya afin d'y effectuer sa scolarité. «Quand j'ai terminé mes études scolaires, et étant issu d'un milieu pauvre, il m'était impossible de poursuivre mes études, car il fallait que je travaille». Effectivement, à la fin des années 1940, ce n'était pas une sinécure pour les jeunes du Sud algérien d'effectuer des études en bonne et due forme. Il leur fallait «monter» au Nord, là où la vie était moins difficile. Mais pour cela, il fallait être muni de gros sous.
«Nous avions le choix entre devenir menuisier ou forgeron. Voilà à quoi se résumait notre avenir. J'ai choisi d'être forgeron !» Mais, nous explique-t-il «je n'ai jamais réussi à limer adroitement, même un bout de bois, il me fallait donc trouver autre chose.» C'est ainsi qu'il réussit à décrocher un job à l'hôtel Oued Riir, structure qui du reste n'existe plus à l'heure actuelle. Et c'est justement dans cet établissement hôtelier désertique et déserté qu'un jour la chance lui sourit : des touristes suisses, transitant par cet hôtel, lui ont fait la proposition de les accompagner là-bas, dans ce pays qui est aux antipodes du climat saharien et qui s'appelle la Suisse. Il accepte et l'aventure commence ! Il s'installe dans cette famille, où il devient «l'homme à tout faire», en échange de quoi on lui garantit le financement de ses études.
Tel était leur contrat, qui devait durer 5 ans, c'est-à-dire de 1950 à 1955. Arrive ensuite le temps des vaches maigres, où Abdelaziz, âgé alors de 26 ans, ne savait pas trop quoi faire de son avenir. Il fait des petits boulots, à droite à gauche, avant d'être accepté à l'hôtel l'Intercontinental de Genève, en qualité de comptable. «M'appeler Abdelaziz était trop compliqué pour les Suisses, du coup, ils m'ont surnommé Zizi , mais à cette époque, les gens n'avaient pas l'esprit tordu comme aujourd'hui», précise-t-il. Ce n'est que quelques années plus tard qu'il réussit à ouvrir sa propre société. Bien que peu d'Algériens aient été établis en Suisse à cette époque-là, Abdelaziz nous assure qu'un véritable mouvement de sympathie s'était installé en Suisse au profit de l'indépendance algérienne. «Dans les bars, nous buvions à la santé des fellagas !
Et nous, les quelques Algériens qui étions là-bas, nous payions notre dîme à la Révolution algérienne.» S'il est agréable de vivre à Genève, il n'en demeure pas moins que cela devient quelque peu routinier. Aussi, le jeune Abdelaziz décide de rompre ce ronron par le sport. Par le football et le basket pour commencer, mais sans grand succès, et ensuite par le karaté, et là il réussit, en à peine quelques années, à avoir la ceinture noire. La passion pour l'aïkido ne viendra qu'ensuite. C'est effectivement à l'âge de 30 ans qu'il décide de se consacrer à cet art martial, pour le moins méconnu en Algérie. Un art martial, du reste, qui n'a fait son apparition au Japon qu'à partir de 1925, et dont la traduction latérale signifie : «La voie de la concordance des harmonies». Doucement mais sûrement, il gravira les échelons dans ce domaine, dans lequel l'aïkidoka se doit d'utiliser la force de son adversaire pour son propre avantage.
Cette passion pour les arts martiaux en général et l'aïkido en particulier le mènera, en 1982, au Japon pour parfaire ses connaissances. «Lors de mon premier voyage au Japon, j'ai été si-dé-ré . Là bas, c'est vraiment un autre monde ! J'ai tout de suite été ébloui par les Japonais, leur mentalité et leur mode de vie». Par la suite, il sillonnera ce pays de fond en comble, faisant la «tournée» des temples. Jusqu'à ce jour, il ne manque pas de retourner au pays du Soleil-Levant, presque en pèlerinage, une fois tous les quatre ans, à l'occasion du Championnat du monde des arts martiaux. Agé aujourd'hui de 82 ans, il est considéré comme le maître de l'aïkido en Suisse, pays dans lequel il a beaucoup de disciples. Tel est le parcours, plus ou moins atypique, d'un jeune de Touggourt, qui, parti de rien est devenu un véritable «sayen», respecté aussi bien en Suisse qu'au Japon. Il a toutefois gardé un lien d'attache avec l'Algérie, puisqu'il vient tous les ans passer ses vacances d'été à Oran.


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