Ces deux mots
assemblés ou astucieusement réunis donnent du sens à la vie des êtres humains.
Si bien que la nature a toujours Å“uvré dans le sens de les rassembler, de les
faire fusionner et totalement confondre l'un dans l'autre ou inversement. D'où
d'ailleurs cette formule magique du « le pain de la dignité ».Ces deux mots
sont nés pour vivre ensemble, pour aller de paire, pour faire vie commune en
empruntant le même chemin de la vie et des êtres humains. La preuve : il ne
peut y avoir de pain sans dignité et réciproquement. Mais bien avant le bout de
pain, il y a bien évidemment cette toute nécessaire et vitale dignité à d'abord
préserver, ensuite au besoin la recouvrer, à tout prix et même au péril de sa
vie.
Le pain assure
dignité. Celle-ci est entière, ni acquise à moitié, ni marchandée contre
lingots d'or pur ou fafiots et pièces d'argent fin. Elle est à la base de la
personnalité de l'être humain. Elle est à la fois son âme et sa raison d'être
ou de vivre. Tout comme la dignité garantit le pain. Du bon pain, voulais-je
dire ! Sans problème ni le moindre pépin. Dans un environnement où tout est
clair sinon tout à fait transparent, comme effort à en fournir et relation à
tisser, entre producteur, prestataire de service et le client tout indiqué dans
sa position de locomotive commerciale et tout tracter de cette vie commerciale
à animer et pérenniser. D'où d'ailleurs son titre de roi, dont il
définitivement déchu dès lors que se termine la contraction de l'acte d'achat.
Souvent, par
dignité, l'être humain choisit de vivre d'une pitance « au pain sec et à l'eau
de source », plutôt que de tendre la main à autrui, calfeutré dans son orgueil
ou pelotonné dans son humilité. Excessive ou bien calculée !
L'équation la
plus connue dans la vie est bel et bien celle-là : la toute simple et la plus
ancienne. Sa combine faite entre les deux mots qui la composent, dans un sens
comme dans l'autre, à l'endroit comme à l'envers, démontre, à l'évidence, cette
solidarité agissante et cette parfaite symbiose, ainsi faite ou parfois réussie
à la perfection, dans une totale osmose.
Depuis la nuit
des temps, le pain noir ou tout à fait blanc, frais ou rassis, assure pérennité
à l'humanité au moment où la dignité lui garantit l'indispensable honneur. Pain
et dignité sont donc deux données très indispensables à la vie de l'être
humain. De fait, il est donc question de survie pour le premier, et de totale
indépendance et la plus étendue des libertés pour le second. Dans la pure
théorie, les choses se passent ainsi, se passant de tout commentaire.
Cependant qu'en
est-il de ce même problème dans le domaine de la pratique des faits et autres
évènements en milieu sociétal ?
Ainsi donc, bien
des choses théoriquement admises sont fondamentalement remises en cause, pour
amener le monde des êtres humains à rapidement refaire ses calculs.
La raison ?
Lorsque la politique s'en mêle, c'est tout l'arsenal de l'équilibre sociétal
qui prend un sacré coup. Du coup, les hommes politiques, dans la perspective de
bien asseoir leur hégémonique régime, sacrifient tout bonnement donc une donnée
au profit de l'autre. Ils font tout simplement commuer la dignité humaine en
cette seule « dignité du pain » afin de dépouiller le peuple de l'essentiel de
ses fondamentales libertés. Ils le font, convaincus par ailleurs, qu'en offrant
le seul morceau de pain à leurs populations d'affamés, ils auront droit à cette
paix sociale, longtemps recherchée par tous les pouvoirs autocratiques et
despotiques. Ils savent, par conséquent, qu'en aucun cas, ils ne peuvent toucher
à ce « pain- alibi politique », raison pour laquelle ils touchent à la dignité
de leur peuple afin que les préoccupations du citoyen se consacrent à sa seule
nourriture et tube digestif, oubliant le reste des aspects immatériels de la
vie en société. Les gouvernants actuels des pays sous-développés ont tous ou
presque à leur jeune âge étudié « Germinal » et savent tous de quoi il en
retourne. Pour eux, le peuple ne doit pas manquer de pain s'ils veulent avoir
la paix. Ce peuple-là n'a besoin que de pain, selon eux. Et c'est tout …! Le
reste des besoins, il ne faut pas en parler. Dans ce cas de figure, le
misérable ou miséreux peuple se préparera à tout le temps courir derrière les
nombreux slaloms que lui fera subir sa baguette de pain ou galette d'orge.
Cela constitue
parfois sa seule dignité, afin d'éviter de tendre la main ou d'aller faire la
manche. Ainsi donc, dans les pays sous-développés, la paix sociale se mesure à
la profondeur des silos de grains de blé. Et plus le stock est si important,
plus les troubles, émeutes et autres manifestations des pauvres administrés
sont de facto ou dans l'illusoire écartés.
La dignité du
pauvre citoyen ne vaut –aux yeux de ses opulents, repus et très méchants
gouvernants- que la contrepartie évaluée en paix sociale du poids de sa
baguette de pain ! Jamais l'effort que celui-ci fournit à la communauté, payé
d'ailleurs au rabais de sa réelle valeur.
De l'autre côté
de la barrière séparant les gens pauvres de ceux très riches et énormément
puissants, plutôt dans le clan de ces derniers, le prix de la dignité du peuple
est indexé sur celui de la baguette de pain ; d'où d'ailleurs ces salaires de
la misère, de la colère, de la honte, de la pauvreté, de l'humiliation et de la
haine, manifestés à l'égard d'un peuple jugé comme faible parce que démuni de
tout.
Tout à fait en
haut de la pyramide du pouvoir, on a tendance à toujours croire que la dignité
du peuple ne vaut absolument en dehors de la baguette de pain nécessaire à la
vie du citoyen.
En clair : le
morceau de pain, aliment indispensable à la vie ou survie de l'humanité,
conditionne à lui tout seul la dignité du citoyen. Pour le pouvoir autocratique
ou dictateur, il n'y a de libertés à revendiquer pour les peuples que celle
d'accéder à sa galette journalière !
Et pour l'ensemble
des dictateurs, les citoyens ne sont autres que des individus affamés et
ventrus qui n'ont besoin que de pain sec et d'eau du robinet pour vivre avec et
surtout continuer à travailler. La révolte pour l'honneur, la dignité, l'espace
de liberté et la démocratie, ils n'en ont jamais entendu parler.
Ce n'est qu'en
2011 que la rue leur montre cette autre vertu et qualité humaine chez leur
peuple dont ils n'ont jamais soupçonné sa réelle existence, puisque tout le
temps restés sourds à leurs doléances.
Et comme la
révolte prend désormais l'allure d'une vraie révolution, c'est le régime
lui-même qui se retrouve seul au banc des accusés ! Qui aura à répondre devant
ces manifestations de rue, plus importantes à mesure que le temps passe et plus
percutantes dans la revendication de leurs droits volés et spoliés.
La cause est bel
et bien entendue : le peuple n'est pas seulement un tube digestif pour ne
demander que du pain… ! Aussi, les grandioses manifestations, parées de leur
nombreux monde et ses subtils slogans, ne réclament pas, non plus, leur morceau
de pain quotidien.
Elles
revendiquent haut et fort, à cor et à cri, justice, liberté et dignité : ce que
les dictateurs arabes ont toujours tenté d'ignorer ! Il est donc bien dommage
que la démocratie dans ces pays-là se réalise sans eux
! Elle se fera sans le moindre doute sans eux, et surtout contre leur gré !
C'est le peuple qui en a ainsi décidé, après qu'il ait brillamment vaincu ces
dictatures du siècle dernier.
(*) Il est
l'auteur d'un ouvrage paru dernièrement chez Edilivre
ayant pour titre : «vrais échos et fausses résonances » dont le sujet constitue
un extrait.
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Posté Le : 04/08/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Slemnia Bendaoud*
Source : www.lequotidien-oran.com