Algérie

Ouyahia : on ne peut rien contre les images



L'ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia a été autorisé à assister aux funérailles de son frère cadet, avocat de profession. Ce dernier est décédé après une attaque cardiaque en pleine audience dans un tribunal d'Alger où il devait assurer la défense de son aîné. Beaucoup a été dit sur la question. D'abord cette question à laquelle personne n'a répondu avec précision, sans doute parce que la fièvre suscitée par l'« événement » a empêché qu'on se penche d'abord sur les choses simples mais importantes : assister à l'enterrement des proches pour les prisonniers, est-il un droit ou une faveur ' Est-ce un droit soumis à conditions ' Si oui, lesquelles ' Est-ce que cela relève d'un pouvoir discrétionnaire et dans ce cas, de qui ' Viennent ensuite l'équité et l'égalité devant la loi. En l'occurrence, on n'a pas vraiment besoin de se perdre en recherches jurisprudentielles pour savoir qu'on est loin du compte : tous les jours que Dieu fait, des Algériens détenus dans l'un ou l'autre des pénitenciers du pays formulent des demandes de sortie pour accompagner un être cher dans son dernier voyage. Personne n'a encore songé à chercher les proportions de réponses positives ou négatives mais on sait que des refus, il y en a beaucoup. C'est humainement difficile à accepter mais on peut concéder que la loi puisse transcender le sentiment. À condition qu'il soit question de... loi, seulement de loi. Justement, allez expliquer aux Algériens ordinaires que dans le cas précis, comme dans d'autres moins médiatisés, ce n'est pas plutôt de faveur qu'il s'agit. Et aux vieilles certitudes, même érodées, de retrouver toute la splendeur de leur pertinence : il vaut mieux voler un b?uf qu'un ?uf. Parce que dans le cas de figure, les exemples ne manquent jamais et l'argument est imparable : de jeunes condamnés pour de menus larcins vivent, la mort dans l'âme, la... mort de leurs parents dans la terrible solitude de leur cellule. Certes, on n'a entendu personne s'indigner pour l'autorisation accordée à M. Ouyahia. Mais on ne peut pas reprocher à quelqu'un de déplorer le « deux poids, deux mesures », surtout qu'il est difficile de trouver moins excusable que ce qui est précisément reproché à Ahmed Ouyahia et tous ceux dans son cas, tellement les traumatismes causés aux Algériens sont profonds. Tout le reste tient de l'image et de ce qu'elle peut susciter comme émotions. Il est encore heureux que des Algériens puissent s'émouvoir à la vue d'un homme doublement meurtri, en dépit de tout ce qu'il inspire par ailleurs. On aurait pu lui éviter les menottes ' Peut-être, d'autant plus qu'elles sont inutiles. On aurait pu réduire la garde pléthorique qui l'entourait ' C'est aussi possible. Mais ce ne sont que des images et il y en a qui sont inévitables. Tout le monde le savait, Ouyahia en premier. Ce sont peut-être ceux qui les ont le plus déplorées qui les ont le plus relayées.S. L.


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