Le Premier ministre n'a pas occulté la fragilité de l'économie algérienneRemis en selle pour une mission de choc, le Premier ministre choisit de dire la vérité aux Algériens.
Ahmed Ouyahia n'est pas un rêveur! Ce diplômé de l'Ecole nationale d'administration a décidé de sortir de la langue de bois et d'adopter un nouveau discours, réaliste et pragmatique. Hier et lors de ses réponses aux patrons algériens, réunis à l'occasion de la tenue de la 3ème édition de l'université d'été du Forum des chefs d'entreprise (FCE), organisée sous le thème:«L'entreprise, c'est maintenant», le Premier ministre n'a pas eu peur de dire que le recours à l'endettement non conventionnel n'est pas un choix, mais une contrainte qui a évité «un arrêt cardiaque à l'Algérie». Ahmed Ouyahia a même reconnu que l'Algérie navigue à vue, non pas en raison d'une carence en compétences pouvant établir une politique économique à long terme, mais en raison de la fragilité de l'économie algérienne, dépendante actuellement des fluctuations du prix du pétrole. «La Chine peut se projeter sur 2050. Sauf cataclysme, elle maîtrise tous les paramètres de son économie. Très humblement, l'Algérie ne peut pas (le faire). Demain, s'il y a un conflit dans le monde, le prix du baril va augmenter et nous serons heureux, mais dans cinq ans quand les Américains feront débarquer'' le produit du schiste, Dieu seul sait à quel prix sera le baril de pétrole» a expliqué le Premier ministre avant d'ajouter: «A ce stade donc, nous sommes encore trop fragiles. Nous avons des visions mais nous ne pouvons pas et c'est ma conviction personnelle, faire une projection sur une vingtaine d'années.» Ahmed Ouyahia a ainsi donc, asséné ses vérités, sans aucune démagogie. Et ce n'est pas la première fois. Depuis son retour à la tête de l'Exécutif, Ahmed Ouyahia, connu pour son savoir-faire pour manier le verbe, a choisi de ne pas tamiser son discours en évoquant une situation économique du pays qui frise la catastrophe. Il avait alors brutalement reconnu «nous vivons l'enfer, nous n'avons pas d'argent. C'est pour cela que l'Etat n'a pas d'autre choix que d'aller vers le financement non conventionnel à travers l'amendement de la loi sur la monnaie et le crédit (...). Lorsque j'ai dit que nous n'avions pas d'argent pour payer les salaires du mois de novembre, je n'ai pas menti.». Il en voulait pour preuve qu'au 31 août de l'année en cours le Trésor public avait dans ses caisses 50 milliards de dinars. Au 14 septembre, celles-ci ont été renflouées par les impôts pour atteindre 350 milliards de dinars. Egal à lui-même, Ahmed Ouyahia et poursuivant un discours alarmiste, mais reflétant la réalité de la situation économique du pays avait même expliqué aux sénateurs que sans le recours à la planche à billets, leurs salaires ne pouvaient pas être payés. Hier, Ahmed Ouyahia et après avoir posé le diagnostic de l'état de santé du pays devant les représentants des deux chambres, se devait de passer à l'épreuve du terrain. Une épreuve nécessaire qui va lui permettre d'accéder à la phase d'administration de sa thérapie de choc et de mener à bien sa bataille sur le front économique. Cela passe forcément par un vrai dialogue avec l'ensemble des forces que compte cette équation, à savoir le patronat, l'Ugta et les syndicats autonomes. Le Premier ministre a choisi de débuter par les organisations qui ont déjà affiché leur adhésion à la nouvelle politique du gouvernement. Il lui a donc été facile d'exposer, en présence de quasiment tout le staff gouvernemental, les organisations patronales et l'Ugta, la démarche de l'Algérie permettant de surmonter la crise financière. Il a expliqué qu'en plus de la solution financière trouvée, à savoir le recours à l'endettement non conventionnel, l'Algérie se devait d'effectuer des réformes que le gouvernement mènera non sans une participation active des travailleurs, des entrepreneurs et de tous les citoyens aux côtés de l'Etat. «C'est là tout le sens de l'appel du président de la République, lors du Conseil des ministres de septembre dernier, aux partenaires économiques et sociaux pour mobiliser toutes les énergies et créer de nouvelles ressources complétant celles du pétrole, et ce, en vue de préserver à long terme l'indépendance financière de l'Algérie et sa souveraineté sur le plan économique», a expliqué celui qui occupe le poste de Premier ministre pour la quatrième fois. Et ce n'est pas un hasard. Ahmed Ouyahia qui, plus que toute autre personnalité de la classe politique, a cette faculté à adapter son discours aux circonstances, semble être le recours dans les situations critiques. Cela a été le cas en 1995 où le jeune diplômé en sciences politiques avait hérité pour la première fois de la chefferie du gouvernement sous Liamine Zeroual. A cette époque, l'Algérie vivait une situation politique et économique désastreuse: terrorisme, caisses vides, économie sinistrée, lourde dette extérieure.... Ahmed Ouyahia qui, faut-il le dire, a des connaissances certaines en matière de politique économique, a été remis en scelle pour une mission spécifique. Et pour l'accomplir, il a choisi une nouvelle approche: dire la vérité aux Algériens.
Posté Le : 19/10/2017
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Hasna YACOUB
Source : www.lexpressiondz.com