Dans un entretien paru hier vendredi dans les colonnes du journal Le
Monde, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a défendu l'intégrité du territoire
du Mali. Il a déclaré que l'Algérie «n'acceptera jamais» la partition
géographique de ce pays entre le Sud livré au chaos politique et un Nord aux
mains de rebelles touareg.
Les indépendantistes touareg du Mouvement national de libération de
l'Azawad (MNLA) n'auront pas le soutien d'Alger ni la reconnaissance de leur
Etat proclamé vendredi dernier. C'est ce qu'a précisé le Premier ministre,
Ahmed Ouyahia, vendredi, au journal Le Monde. «L'Algérie, a-t-il affirmé,
n'acceptera jamais une remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali».
Elle Å“uvre pour une solution «qui passe par le dialogue» entre Bamako et les
indépendantistes touareg et par «le combat contre le terrorisme» et les groupes
d'Aqmi qui opèrent dans le Sahel.
Le propos de M. Ouyahia est clair. Il reprend la position officielle de
l'Algérie sur l'intangibilité des frontières héritées des mouvements de
décolonisation. Il rappelle que l'Algérie a eu raison de s'inquiéter de la
guerre en Libye et des effets qu'elle a eus sur la circulation des armes dans
la région. Enfin, il s'inscrit en cohérence avec le courant des réactions
officielles des grands acteurs africains et internationaux qui condamnent le
putsch du capitaine Sanogo et ne souhaitent pas une partition du territoire
malien.
Déclaration mesurée, donc, mais au ton quelque peu vindicatif. Son accent
tranché peut ne pas heurter le MNLA qui, bien qu'ayant proclamé unilatéralement
l'indépendance de l'Azawad, n'exclut probablement pas d'autres formes de
positionnement. Paris, dont le ministre des Affaires étrangères a jugé la
proclamation de l'Etat de L'Azawad «nulle et non avenue», semble l'encourager
dans cette direction. Il n'est pas risqué, cependant, d'y voir un signe de
grande irritation à l'égard d'un mouvement nationaliste dont la dynamique
actuelle semble avoir échappé à Alger. Cette donnée importante, si elle vient à
être vérifiée sur le terrain, risque de rendre moins audible le point de vue de
l'Algérie auprès d'un interlocuteur, le MNLA, dont le projet d'Etat ou
d'autonomie lui dicte justement de se retourner indistinctement vers l'Algérie
dont la position historique, politique, économique, bref stratégique, en fait
un médiateur voire un soutien de choix dans le cas où le scénario de la
partition prend malgré tout davantage d'ampleur. Certes, on n'en est pas encore
là. Sur le terrain, l'option la plus lourde qui se dessine est celle d'une
guerre contre l'Aqmi dans laquelle Alger peut peser de son poids. M. Ouyahia a
dit la souhaiter mais sans l'intervention d'acteurs extrarégionaux. Ce qui
semble pour le moins irréalisable. Car même si des puissances clés comme la
France vont dans le même sens que l'Algérie et ne parlent que de «soutien
logistique», trop d'inconnues obèrent l'espace sahélien pour ne pas envisager
une intervention étrangère plus large contre des groupes islamistes traqués par
le contreterrorisme international.
BOURBIER ET RISQUES DE DERAPAGES
Cela est d'autant plus probable que les pays de la région, ceux inscrits
à l'initiative de l'Algérie dans la stratégie dite des «pays du champ», ne
semblent pas réussir dans leur entreprise. Dans son entretien au journal Le
Monde, M. Ouyahia a bien évoqué la tenue prochaine d'une réunion du Centre
d'état-major commun antiterroriste (Cemoc) en Mauritanie. Le ministre délégué
aux Affaires africaines, M. Messahel, se rend ce dimanche dans la capitale
mauritanienne. Mais il n'est pas sûr que de telles actions, tardives par
ailleurs, suffisent à faire avancer les choses et à trouver une solution rapide
au bourbier du Sahel. A aucun moment depuis que l'on parle de leur stratégie
commune et depuis la crise au Mali, les «pays du champ» n'ont semblé
convaincants ni convaincus de leur déploiement pour éviter, comme dit M.
Ouyahia au quotidien parisien du soir, le «dérapage programmé, immédiat ou six
mois plus tard» de l'intervention des Occidentaux. Il est, donc, à espérer
qu'ils trouvent dimanche prochain à Nouakchott une solution pour éviter un tel
scénario. Tout échec pourrait, pour l'Algérie, s'ajouter à celui essuyé en
Libye, un pays avec lequel on a aujourd'hui les plus grandes difficultés de
voisinage. Tout ratage pourrait inciter des puissances internationales
actuellement en position d'attente et d'observation à passer vers une «gestion
opérationnelle» du conflit.
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Posté Le : 07/04/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Kader Hannachi
Source : www.lequotidien-oran.com