Algérie

Oui, pourquoi pas



Aujourd’hui même, une Algérienne doit prendre l’avion pour Paris. Puis, de là, un autre pour Helsinki d’où elle rejoindra Mourmansk, plus grande ville au monde au- delà du Cercle Arctique. Dans ce port de la mer Barents, un brise-glace de la marine russe la conduira à proximité du Pôle Nord avec une trentaine de personnes. Selon les conditions météo, l’expédition devrait parcourir quelques stations pour se rendre au point de jonction de tous les méridiens et fuseaux horaires de la Terre et vers l’archipel François-Joseph aux 191 îles inhabitées. Cette Algérienne ira plus loin que Mourad Raïs, qui, en 1627, conduisit d’Alger vers l’Islande une expédition, peu pacifique il est vrai, mais marquée par l’exploit maritime. Elle rencontrera peut-être ce compatriote, employé d’une base polaire, qui avait brandi, là, l’emblême national lors de la qualification au Mondial.
Jeune femme longiline au visage sans cesse éclairé d’un étonnement enfantin, elle se nomme Samiha Hali et, quand il ne lui prend pas l’envie d’aller taquiner le bout de la planète, elle exerce d’ordinaire en tant que coordinatrice de l’émission «L’histoire en marche» de la Chaîne III de la Radio nationale. Son voyage, qui fera peut-être d’elle la première femme arabe et africaine à se rendre si haut, l’anime d’une passion compréhensible. Mais, pour la connaître depuis longtemps, pas plus que tous les jours de la semaine, quand elle se rend, en bus ou en taxi, à son travail, au Boulevard des martyrs. C’est que la véritable passion ne peut être liée à un lieu, fut-il le plus mythique. On la porte en soi. Bien sûr, ici, s’ajoute une dose d’adrénaline, une sorte de vertige qui, d’ailleurs, transparaît dans son regard. Elle ressemble tout à coup à un personnage d’une bande dessinée de Hugo Pratt, habité par d’irrepressibles et étranges pulsions. Elle ressemble à l’esprit de Don Quichotte et du Petit Prince, œuvres universelles conçues en partie à Alger. Elle ressemble, en fait, simplement à une femme algérienne qui, d’une existence morose, peut entrer dans la légende, comme elle vous préparerait un bon repas avec trois fois rien.
Echapper au piège de sa condition, aller vers «l’inaccessible étoile», donner au rêve le courage d’exister, avoir le désir de se dépasser, c’est le message qu’elle semble vouloir transmettre. Un message compris par Slim Othmani, manager du groupe NCA Rouiba, qui, en mécène éclairé, a financé l’expédition. Un message qui, enfin, devrait parler aux femmes comme aux hommes de ce pays, dévorés par le quotidien. Un des pionniers de l’Arctique, J. B. Charcot, avait nommé son navire Le Pourquoi pas ' . C’est ce pourquoi pas que nous clame discrètement Samiha Hali (qui a pris une rose des sables de notre Sahara pour la planter au Pôle Nord géographique), comme pour nous dire qu’il ne faut jam-ais accepter la médiocrité. Bon voyage, sœur !


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