Algérie

Otages et monnaie de singe



Otages et monnaie de singe
Est-elle réellement crédible la version fournie par les autorités françaises quant à la libération des sept otages enlevés et détenus par Boko Haram depuis des mois et consistant au dénouement du drame vécu par les membres de la famille sans que l'Etat français n'ait eu à monnayer leur libération '
La réaction des officiels, à leur tête le président français, et les affirmations péremptoires tenues ici et là par l'ensemble des membres du gouvernement et obligatoirement des cadres du parti socialiste, relève d'une logique qu'il aurait été malvenu de contrarier au regard de la tacite et surtout immuable connivence politico-politicienne majorité/opposition. Peu importe alors qui détiendrait le rapport de force à l'instant «T», car tout cela n'exclut pas le souci de se voler dans les plumes une fois l'évènement consommé. Ainsi et pour rappel, tant qu'il s'était agi de libérer Florence Aubenas ou encore Ingrid Betancourt, l'opposition socialiste, dans la forme, a respecté les codes établis, s'est serrée les coudes avec la majorité en place pour, ensuite, monter au créneau et appeler à connaitre la vérité sur les conditions ayant prévalu dans l'une et l'autre affaire. Laquelle affaire, par ailleurs, n'a livré ses secrets que bien plus tard en confirmant toutefois qu'une rançon avait effectivement été versée non pas par l'Etat français mais par un ou des Etats intermédiaires et, selon d'autres informations, par de grands groupes industriels.
La libération des sept otages tombe à point nommé compte tenu des inextricables difficultés intérieures dans lesquelles se débat le gouvernement Ayrault et, par extension, François Hollande, lequel, est-il besoin le rappeler, avait salué l'attitude des Algériens dans la gestion de l'attaque contre le site de Tiguentourine en laissant entendre que dans un tel cas de figure il ne fallait surtout pas céder aux terroristes en accédant à tout chantage de nature matérielle et/ou financière. Et si la présidence française déclare que «nous ne changeons pas notre principe qui est le non versement par la France de rançon», toute la nuance est dans «le non versement par la France», ce qui n'exclut pas celui-ci (le versement) par une autre partie, comme cela a été souvent le cas un peu parmi les pays européens dont des ressortissants ont été victimes d'une prise d'otage. Pour rappel, une ancienne ambassadrice américaine au Mali a clairement évoqué le payement indirect des rançons au gouvernement du pays où seraient détenus les otages. L'ambassadrice, aujourd'hui en retraite, ajoutant : «Les rançons, comme toutes les rançons, étaient payées indirectement. Elles ont terminé entre les mains du gouvernement ensuite elles sont retournées, du moins une partie aux salafistes.»
Les dirigeants français auront donc beau faire les louanges du «travail remarquable de renseignement au Nigéria grâce à la DGSE», il parait pour le moins farfelu que les terroristes de Boko Haram aient eu à concéder au nom de l'honneur la libération d'otages qui constituent leur chance de survie. Quoiqu'il en soit et si l'avenir ne dément pas la version officielle de cette libération, autrement dit qu'il n'y a pas eu versement de rançon, celle-ci pourrait néanmoins avoir consisté en un troc humain grâce auquel les ravisseurs auraient gagné à obtenir la libération de membres de leur faction et certains membres de leurs familles détenus dans les geôles nigérianes et camerounaises. Le résultat des courses demeurant forcément le même, c'est-à-dire une sorte de capitulation du Droit et de la Raison face au chantage.
A des milliers de kilomètres de cette scène de crime située en Afrique, les hommes de l'oncle Sam, en ce qui les concerne, s'évertuent à démêler l'écheveau dramatique du marathon de Boston et, apparentement terrible, là également, il pourrait s'agir d'une piste dès lors que les deux présumés auteurs de l'attentat seraient d'origine tchétchène, même s'il risque de s'agir d'un raccourci superbe de faire la relation de cause à effet tant que les conclusions de l'enquête ne sont pas définitivement établies. Cela étant, les Américains continuent d'apporter la preuve, en vertu de valeurs républicaines d'abord et de résolutions irréversibles prises au nom de la lutte contre le terrorisme depuis le 11 septembre 2001, que la seule négociation avec les terroristes consiste dans le meilleur des cas en leur légale neutralisation et peu importent les moyens ou sinon dans le pire des cas en leur élimination' là également, peu importe les moyens et la manière. Une manière comme une autre de leur rendre la monnaie de leur pièce.
A. L.


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