Algérie

Oranitudes



Variations hivernales sous le ciel de Tlemcen La ville de Tlemcen, Perle du Maghreb comme le veut un mythe réduit à une peau de chagrin, est réputée être peu publique, sauf les cafés maures et les mosquées aux heures de prière (comme partout ailleurs) et donc plutôt intimiste et où la vie est feutrée et calfeutrée. Belle et bien mieux conservée que la plupart des autres villes du pays. Jalouse de son passé, semble t-il, un passé bien éloigné dont témoignent des sites que l’on tente de préserver, de restaurer plus ou moins bien. Déjà peu productive en activités culturelles, sauf la musique traditionnelle, elle-même souffrante, les autres saisons de l’année, en hiver, c’est quasiment le vide. Bien sûr ailleurs, ce n’est pas forcément mieux, n’eusse été cette aubaine circonstancielle procurée par l’événement «Alger 2007, capitale de la Culture arabe», en voie de clôture. Mais cet événement est exclusivement tourné vers la capitale, justement, et l’intérieur du pays a été simplement appelé en catastrophe pour pallier à une insuffisance du plan de charge, constatée à la veille de l’ouverture de cette grosse manifestation; quoiqu’on en dise dans les bilans officiels élogieux auxquels nous sommes tellement habitués. Et donc, les semaines de wilaya qui ont été injectées de toute urgence, vont être bouclées avec celle de Tlemcen et Constantine, jumelées pour la circonstance. Depuis toujours, dans un étrange imaginaire, ces deux villes sont associées. Cette semaine culturelle finale a été reportée à deux reprises et puis, finalement, elle a eu lieu du 3 au 10 janvier en cours. En ce début janvier, froid, pluie et vent se sont concertés pour s’emparer de la ville et ses environs. Cela donne, pour les mélancoliques et les amoureux des couleurs sombres, de beaux tableaux et une atmosphère propice à la création et la méditation. Mais ça rétrécit encore plus le peu d’espace de vie culturelle. Quelques artistes s’accrochent quand même, dans le seul établissement voué a cette dimension de la vie sociale, si l’on excepte les quelques Maisons de jeunes excentrées et périphériques: c’est la Maison de la Culture Abdelkader Alloula qui a l’air d’avoir repris un peu de vie. Même si, comme l’ensemble des institutions étatiques, la lourdeur et la pesanteur bureaucratique collent à la peau, comme une maladie chronique, incurable. Les Maisons de la Culture auraient été inspirées, à l’époque de Boumediene, sur le modèle initié en France par André Malraux. Sauf que nous ne sommes pas la France et que nous n’avons jamais eu l’équivalent d’un André Malraux. Alors, parmi la poignée de vie qui a repris dans cette Maison de la Culture, il y a un peu de musique qui s’y fait, quelques groupes qui viennent y tenter des expériences diverses. Pour combien de temps? Dieu seul le sait. Les Send Roses, une formation de 5 musiciens, fait des reprises de Rock; les Rocket Boys font dans les ballades et la musique Pop des années 60. Comme dit le leader de ce groupe, le claviste connu Salim Kara, c’est un retour des vétérans. Et pourquoi pas, tant mieux pour tout le monde. D’ailleurs, y aurait-il des «vétérans» dans l’univers musical? De nombreux exemples à travers le monde sont là pour prouver qu’il n’y a pas d’âge pour la musique, la création et, après tout, la vie tout court. Enfin, il y a aussi un groupe récent, l’ensemble Zarka (c’est le nom d’un mode musical local), dirigé par le violoniste Khalil Baba Ahmed. Comme plusieurs autres musiciens, il vient du milieu associatif de la musique andalouse. C’est un ensemble nouveau donc et qui n’a eu l’occasion de donner que 2 galas à la Maison de la Culture. Après être passé par une phase de reprises, comme tous les autres, il est entré dans une expérience de création et de compositions propres, dans cet esprit du métissage qui est dans l’ère du temps. Il est composé de 10 musiciens. C’est cette audace d’aller vers l’aventure de la création, avec ses risques, qui attire déjà l’attention. Et Zarka va à Alger, dans le cadre de la semaine de Tlemcen. Il se produit normalement ce soir, à la salle Ibn Zeydoun. C’est le baptême algérois. Il faudra attendre le reste de l’année, que le printemps revienne et que les fleurs renaissent, pour voir si quelque éclosion culturelle fasse jaillir une… toute petite perle. Brahim Hadj Slimane


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