Sur demande des avocats de la défense, le procès de détournement de fonds
à partir de la recette de recouvrement des factures téléphoniques, à l'unité
d'Oran d'Algérie Télécom, prévu hier devant le tribunal correctionnel d'Oran, a
été renvoyé au mardi 5 avril. Aussitôt l'affaire appelée, une nuée de robes
noires s'est mise à solliciter à l'unisson la présidente pour l'ajournement de
l'audience, arguant que le dossier n'était pas prêt à être jugé en l'état
actuel car, d'une part, nombre d'avocats n'en ont pris connaissance que récemment
et, de l'autre, des «témoins-clés» parmi des responsables de AT à la période
des faits étaient défaillants.
Après un petit break, le tribunal a accédé à la demande de la défense, à
qui il a accordé un délai «suffisant» de 35 jours. La salle s'est quasiment
désemplie en une poignée de secondes. En fait, des dossiers empilés sur la
table de tribune, celui d'Algérie Télécom en était le plus épais, le plus en
vue. La tension était palpable sur les visages des employés d'AT (une douzaine)
mis en cause dans cette affaire de «détournement de deniers publics et faux en
écriture comptable». Même leurs anciens collègues cités comme témoins, qui
serraient les rangs derrière, laissaient transparaître des signes d'inquiétude.
Il faut dire que pour une bonne partie d'eux, il s'en est fallu de l'épaisseur
d'un cheveu pour se retrouver de l'autre bout de la barre, eux qui ballottaient
entre «mis en cause» et «non-lieu» au fil de la procédure. Enfin, la 3e
catégorie, une dizaine, prend son mal en patience en attendant le verdict de la
Cour suprême quant à leur pourvoi en cassation contre l'arrêt de la chambre
d'accusation ayant annulé les ordonnances de non-lieu du juge d'instruction.
Dans les faits, tout a commencé le 19 décembre 2009, lorsque la direction
de l'unité opérationnelle d'Oran de AT reçoit une correspondance du directeur
de l'Actel «Abane Ramdane», agence commerciale située à Front de mer et qui
fait office de centrale de comptabilité, faisant état d'un manque à gagner de
556.589 DA dans la comptabilité relative à la journée du 9 août 2005 (soit cinq
années auparavant), écart mis en évidence par la différence entre la pièce
comptable dite dans le jargon interne «A-37» et la quittance de payement émise
par la recette principale RP (la Grande Poste, sise au centre-ville). Aucune
trace de cette A-37, censée être au niveau de la RP, ne sera trouvée.
L'inspection détectera par la suite une autre anomalie similaire pour la
journée du 10 août 2005, avec cette fois-ci un trou de 667.151 DA. Dans les
deux cas, des ratures, des biffures et des rajouts au stylo seront relevés.
Une investigation administrative est déclenchée visant tout le personnel
du circuit, avec comme montant dévalisé estimé à 1.223.741 DA. Une plainte est
déposée auprès de la BEF du commissariat central d'Oran pour détournement de
fonds et falsification de documents comptables contre une liste nominative de
fonctionnaires de l'Actel Abane Ramdane et de la RP. Au total, 101 entre agents
de comptabilité et de saisie ainsi que des abonnés «complices» passeront tour à
tour dans les locaux de la BEF puis au bureau du juge d'instruction de la 9e
chambre du tribunal d'Oran. Un non-lieu sera prononcé contre les mis en cause
en bloc.
Dossier classé ? Non, la chambre d'accusation a un tout autre avis.
L'affaire est relancée, des non-lieux sautent, un autre juge d'instruction (la
6e chambre) prend le relai. Et, surtout, un expert-comptable est désigné. Ce
commissaire aux comptes va bien au-delà des deux journées signalées, il balaye
la comptabilité de tout l'exercice 2005, en puisant ses informations dans les
registres d'AT. Il clôt son rapport très concis avec deux conclusions: un
préjudice se chiffrant à 56.762.226 DA et des parts de responsabilités
visualisées par un graphique rond divisé en secteurs par taux en pourcentages.
Les avocats des 101 employés, suspendus à ce jour, y compris ceux ayant
bénéficié d'un non-lieu, battent en brèche cette expertise, en lui reprochant
plusieurs griefs: «Quel est le procédé adopté pour éplucher la comptabilité ?
Quelles sont les sources d'information exploitées ? Pourquoi limiter
l'investigation au seul dernier maillon de la saisie et de la comptabilité et
passer outre les autres maillons de la chaîne ?…», autant d'interrogations
posées par la défense avant la tenue du procès.
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Posté Le : 02/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Houari Saaïdia
Source : www.lequotidien-oran.com