Algérie

Oran : La ville aux deux lions renoue avec son passé hispanique



Oran : La ville aux deux lions renoue avec son passé hispanique
C'est comme si la Fontaine Cibeles s'était invitée à Oran, l'espace de la soirée de samedi, pour permettre aux milliers de supporters du Real Madrid de fêter l'historique victoire des protégés de José Mourinho à la faveur de multiples défilés et cortèges de voitures improvisés dans les différents boulevards, rues et artères de la ville dès le coup de sifflet final de ce Clasico qui, l'espace de quatre-vingt-dix minutes, a divisé El-Bahia en deux.
Le contraste est d'ailleurs ce qu'il y a de plus saisissant. Au vide sidéral et au calme plat qui a drapé Oran dès 19h et le début du choc entre le FC Barcelone et le Real de Madrid ont succédé des airs de fiestas comme les Oranais savent en créer lorsqu'ils célèbrent un heureux évènement. Et cet heureux évènement, c'était la victoire de la Casa Blanca dans l'antre même des Blaugranas, ce qui garantit au club royal un titre de champion d'Espagne qui n'a plus visité sa somptueuse et majestueusement garnie salle des trophées depuis 2008, soit quatre longues années assimilées à une éternité du côté de l'imposant Santiago Bernabeu. La plus hispanique des villes algériennes a, d'ailleurs, vécu ce Clasico comme elle en a l'habitude, avec ferveur, passion et enthousiasme. Déjà, dès les premières heures de la journée, au marché, comme à la poste ou dans les cafés maures, un seul sujet de discussion tenait le haut du pavé : le choc de la soirée, décisif pour la désignation du futur patron de la Liga.
En marge de ces discussions enflammées à l'issue desquelles aucun vainqueur langagier ne ressort, revient surtout 'le programme à établir entre potes, cousins ou voisins' pour tomber d'accord sur 'le lieu où on va suivre la retransmission télévisée du match de l'année'.
Sur ce point, deux catégories se distinguent assez clairement : les détenteurs des cartes d'abonnement aux bouquets satellitaires d'Al Jazeera ou de Canal Stellite qui affichent une grande sérénité née du fait qu'ils soient sûrs et certains de ne rien rater de la grande soirée de samedi et ceux qui se renseignent sur les 'tarifs', les 'adresses' et les 'caractérisiques' des cafétérias, pizzerias et autres salons de thé retransmettant le Clasico. La 'règle' est d'ailleurs la même dans pratiquement tous les quartiers et cités de la ville aux deux lions : un prix d'entrée à la cafétéria fixé entre 100 et 250 dinars par personne désirant suivre l'affiche qui tient en haleine toute la planète football, consommation non incluse mais néanmoins obligatoire. Par mi-temps, même, dans certains cafés 'chics'.
Barceloranais Vs Orano-madrilènes !
Au centre-ville, à Dar El-Beïda, aux Castors, à Es-Seddikia, à Médioni, à El-Hamri, à Delmonte, à Petit-Lac et dans tous les autres quartiers de la ville, les cafés maures affichaient d'ailleurs complet presque trois quarts d'heure avant le coup de sifflet initial de la confrontation entre le FC Barcelone et le Real de Madrid. Dans une ambiance souvent festive, enflammée et antagoniste, les Oranais ont ainsi suivi ce 219e Clasico comme de coutume : avec passion et presque sur les nerfs. Disputes, chamailleries, moqueries, chants à la gloire des uns et des autres, appels au calme, explosion de joie, déception et cris de colère à chaque ratage des coéquipiers d'un bien silencieux Lionel Messi ou de ceux d'un toujours provocateur Cristiano Ronaldo : les cafétérias de la ville, transformées, comme en pareille circonstance, en mini-tribunes de supporters, bouillonnaient, bourdonnaient.
Et si la mi-temps sifflée à 19h45 précises permit aux plus assidus de se diriger, le pas pressé, vers la mosquée la plus proche pour faire la prière et pouvoir revenir, encore plus rapidement, au café du coin pour réoccuper leurs places payantes, d'autres la mettront à profit pour refaire la première période à coup d'analyses superficielles, d'interprétations souvent hasardeuses et de commentaires des plus insolites !
L'animée fin de seconde période, l'égalisation du rentrant Alexis Sanchez ainsi que le but victorieux de Cristiano Ronaldo constitueront ensuite les séquences les plus à même d'avoir fait sauter l'applaudimètre, avant que la fin du temps additionnel ne confirme le retour en grâce du Real Madrid et ne donne aux supporters 'orano-madrilènes' l'occasion de narguer les vaincus 'Barceloranais' et de fêter, bruyamment, à coups de klaxons, drapeaux en main, la victoire des 'leurs'. Sans doute frustrés par la banalisation de 'leur' Mouloudia, relégué ces dernières saisons à un simple rôle de faire-valoir plus occupé à courtiser le maintien qu'à faire honneur à ses années et à ses aînés de gloire, et à la standardisation de l'ASMO qui traîne les rêves de ses inconditionnels dans les dédales de l'antichambre de l'élite, les Oranais ont ainsi appris à faire de chaque grand rendez-vous footballistique entre les deux monstres sacrés de la proche Espagne un moment de convivialité, de joie, de spectacle entre amis et de rivalité sportive de bon aloi.
Question d'extérioriser leurs frustrations tout en songeant au jour où ils pourront donner vie à leurs rêves de déambuler sur la fameuse Rambla de Barcelone où de fêter une victoire comme celle-ci du côté de la Fontaine Cibeles, la vraie, pas celle dont l'ombre s'était invitée, samedi soir à Oran'
R. B.




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