Algérie

Openfield : Salut l'artiste



Petit bonhomme s’il en est, notre Allilou n’en était pas moins doté d’une très grande force. Son métier : portefaix. il était caractéristique : un petit homme d’environ un mètre cinquante, allez ! jusqu’à soixante, pas plus ! Bas sur pied, avec un fort torse, des bras costauds, il tirait une petite charrette. C’était son outil de travail. Deux brancards lui permettaient de tirer cet engin aidé en cela par une sangle qu’il passait sur sa poitrine, sangle fixée de part et d’autre des brancards. Deux bras pour tirer, le torse pour aider. Il connaissait le tout Alger et toutes les heures d'arrivée et de départ des trains ainsi que des autocars. Il était à l’affût de toutes les arrivées, proposant ses services à ceux qui avaient de lourds chargements, ou de grosses valises. Les valises elles-mêmes étaient très souvent faites en bois, les autres, celles que nous connaissons de nos jours n’existaient pas… D’autres temps.  Aussi avions-nous recours à ce brave homme qui se chargeait de porter pour nous. Il avait une énorme qualité, c’était sa confiance. Extrêmement honnête, il portait sur le bras droit une plaque qui mentionnait simplement : «Alilou homme de confiance.»  Ces lettres ressortaient sur la plaque de cuivre toujours astiquée. La mention était hautement méritée, car certains allaient même jusqu’à lui confier des courses qu’il faisait seul, toujours avec beaucoup de sérieux. Il avait aussi un certain humour qu’il mettait en pratique lors des fêtes foraines. Ces magnifiques poneys qui tournaient autour du Square Port Saïd à la grande joie des chérubins. Cela valait tellement le déplacement. Et notre brave Hamouda dans tout cela ' Il avait simplement imaginé «le monde à l’envers». Nous étions tous groupés face à l’opéra à admirer les interminables processions de baudets. C’était presque la bousculade et tout le monde se penchait pour voir arriver le suivant. Nous étions là, et dans le sens d’arrivée du peloton, une immense clameur s’élevait. Des applaudissements se multipliaient et nous étions tous curieux de savoir pourquoi ! Notre curiosité fut de courte durée, lorsque nous vîmes arriver derrière un grand char fleuri, notre Allilou et son âne ! Quel âne ' Me direz–vous, puisque c’est lui qui tirait la charrette de portefaix. Il avait simplement imaginé «le monde à l’envers» en mettant dans sa charrette un âne ! Le baudet  portait chapeau de paille, et lunettes fabriquées avec du fil de fer. Il avait autour du cou un gros chiffon rouge qui lui servait de foulard, et des roses sur la queue, bien ficelées ! Notre Allilou, très digne, tirait l’âne et avait une pancarte sur laquelle il avait écrit : le monde à l’envers.


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