Algérie

«On cherche à impliquer davantage l'Algérie» Louisa Driss Ait Hamadouche au Midi Libre :


Les derniers évènements qui se sont produits dans la ville de Gao, au nord-est du Mali, avec l'enlèvement de sept diplomates algériens, jeudi, donnent lieu à des interrogations. L'Algérie qui se retrouve, encore fois, au milieu de ce tourbillon après la proclamation du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) de l'indépendance des territoires nord du Mali, vendredi matin.
La politologue, Louisa Driss Ait Hamadouche, nous fournit quelques éclaircissements sur cette situation et ses éventuelles répercussions sur l'Algérie dans cet entretien.
Midi Libre : Ce rapt, vient-il freiner le champ d'action de l'Algérie '
Louisa Driss Ait Hamadouche : Freiner ' Je le conçois difficilement. Un diplomate algérien et ses collaborateurs ont été enlevés. Parler de déclaration de guerre serait exagéré, mais cela reste un acte d'une exceptionnelle gravité. Je vois mal l'Algérie rester passive dans une situation aussi tendue. En fait, on aurait voulu pousser l'Algérie à s'impliquer davantage, qu'on ne s'y serait pas pris autrement. Veut-on pousser l'Algérie à agir de façon unilatérale, à corroborer les accusations selon lesquelles elle chercherait à devenir la puissance dominante de la région ' Face au risque d'embrasement et d'enlisement, mieux vaudrait jouer sur les dissensions observées au sein des mouvements touaregs, faire actionner les réseaux de la diplomatie parallèle et agir dans un cadre collectif. N'oublions pas que le Mali est pour ainsi dire sans gouvernants et qu'il est beaucoup plus difficile d'agir en l'absence d'interlocuteurs ayant un pouvoir décisionnel.
Quelles peuvent être les répercussions de ces derniers développements sur la politique de l'Algérie notamment dans la région après la proclamation du MNLA de l'indépendance des territoires nord du Mali '
Vous savez, quand les Occidentaux définissaient la crise comme une rupture d'équilibre porteuse de dangers, les Chinois la voyaient comme une opportunité. L'instabilité dans le flanc sud de l'Algérie n'est pas nouvelle. Le conflit actuel est le résultat logique d'un long pourrissement dans lequel les revendications des Touaregs ont été ignorées et minorisées sur l'autel de la lutte antiterroriste. C'est d'autant plus dommageable que l'Algérie développe traditionnellement une conception globale de la résolution du conflit. J'ai le sentiment que la mise en 'uvre de cette conception a manqué de stratégie en bonne et due forme, de volonté politique, de moyens ou des trois à la fois. Certains Etats se sont montrés beaucoup plus offensifs en termes de lobbying, d'investissements, d'aides au développement dans cette région qui manque cruellement de tout. Or, il faut sortir de la vision sécuritaire de la pacification pour l'aborder comme un véritable projet de développement régional. La paix, ce n'est pas l'absence de guerre, surtout dans cette région. Les Touaregs, dans leur globalité, ont une identité à défendre, des droits à faire valoir et des préjudices pour lesquels ils réclament réparation. Mieux vaut y penser avant d'atteindre le point de non retour.
Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a déclaré dans une interview au journal Le Monde, que «l'Algérie n'acceptera jamais une remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali». Pensez-vous que cette attaque ne viendra pas changer la donne '
A mon sens non. Elle aurait même tendance à conforter l'Algérie dans ses positions, d'autant que je ne vois aucun Etat qui pourrait soutenir cette déclaration. Le risque d'un effet domino est tellement grand ! Premièrement, l'indépendance de l'Azawad ne reflète qu'une petite partie du territoire touareg ; cela signifie que les autres parties situées dans les pays voisins pourraient penser à réclamer être tentés par un scénario identique. Ensuite, le Nord-Mali représenterait un Etat non viable en soit ; il serait donc obligé de chercher des soutiens à travers des solidarités ethniques qu'il pourrait effectivement trouver, encore une fois chez les voisins. Troisièmement, la rébellion n'a jamais constitué un bloc homogène et l'indépendance pourrait très vite tourner en guerre civile targuie dans l'Azawad. Une guerre aggravée par les connections avec des groupes criminels et terroristes. Aucun Etat de la région n'est prêt à accepter de prendre un tel risque. Par ailleurs, on pourrait même observer des alliances objectives entre des Etats qui connaissent des relations tendues. Je pense notamment à l'Algérie et au Maroc qui, pour le coup et pour des raisons différentes, s'opposeront à cette indépendance. Il n'est pas non plus exclu de voir un rapprochement entre l'Algérie et le CNT qui est littéralement menacé de dislocation avec les combats qui se déroulent dans le Sud.
Les derniers évènements qui se sont produits dans la ville de Gao, au nord-est du Mali, avec l'enlèvement de sept diplomates algériens, jeudi, donnent lieu à des interrogations. L'Algérie qui se retrouve, encore fois, au milieu de ce tourbillon après la proclamation du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) de l'indépendance des territoires nord du Mali, vendredi matin.
La politologue, Louisa Driss Ait Hamadouche, nous fournit quelques éclaircissements sur cette situation et ses éventuelles répercussions sur l'Algérie dans cet entretien.
Midi Libre : Ce rapt, vient-il freiner le champ d'action de l'Algérie '
Louisa Driss Ait Hamadouche : Freiner ' Je le conçois difficilement. Un diplomate algérien et ses collaborateurs ont été enlevés. Parler de déclaration de guerre serait exagéré, mais cela reste un acte d'une exceptionnelle gravité. Je vois mal l'Algérie rester passive dans une situation aussi tendue. En fait, on aurait voulu pousser l'Algérie à s'impliquer davantage, qu'on ne s'y serait pas pris autrement. Veut-on pousser l'Algérie à agir de façon unilatérale, à corroborer les accusations selon lesquelles elle chercherait à devenir la puissance dominante de la région ' Face au risque d'embrasement et d'enlisement, mieux vaudrait jouer sur les dissensions observées au sein des mouvements touaregs, faire actionner les réseaux de la diplomatie parallèle et agir dans un cadre collectif. N'oublions pas que le Mali est pour ainsi dire sans gouvernants et qu'il est beaucoup plus difficile d'agir en l'absence d'interlocuteurs ayant un pouvoir décisionnel.
Quelles peuvent être les répercussions de ces derniers développements sur la politique de l'Algérie notamment dans la région après la proclamation du MNLA de l'indépendance des territoires nord du Mali '
Vous savez, quand les Occidentaux définissaient la crise comme une rupture d'équilibre porteuse de dangers, les Chinois la voyaient comme une opportunité. L'instabilité dans le flanc sud de l'Algérie n'est pas nouvelle. Le conflit actuel est le résultat logique d'un long pourrissement dans lequel les revendications des Touaregs ont été ignorées et minorisées sur l'autel de la lutte antiterroriste. C'est d'autant plus dommageable que l'Algérie développe traditionnellement une conception globale de la résolution du conflit. J'ai le sentiment que la mise en 'uvre de cette conception a manqué de stratégie en bonne et due forme, de volonté politique, de moyens ou des trois à la fois. Certains Etats se sont montrés beaucoup plus offensifs en termes de lobbying, d'investissements, d'aides au développement dans cette région qui manque cruellement de tout. Or, il faut sortir de la vision sécuritaire de la pacification pour l'aborder comme un véritable projet de développement régional. La paix, ce n'est pas l'absence de guerre, surtout dans cette région. Les Touaregs, dans leur globalité, ont une identité à défendre, des droits à faire valoir et des préjudices pour lesquels ils réclament réparation. Mieux vaut y penser avant d'atteindre le point de non retour.
Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a déclaré dans une interview au journal Le Monde, que «l'Algérie n'acceptera jamais une remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali». Pensez-vous que cette attaque ne viendra pas changer la donne '
A mon sens non. Elle aurait même tendance à conforter l'Algérie dans ses positions, d'autant que je ne vois aucun Etat qui pourrait soutenir cette déclaration. Le risque d'un effet domino est tellement grand ! Premièrement, l'indépendance de l'Azawad ne reflète qu'une petite partie du territoire touareg ; cela signifie que les autres parties situées dans les pays voisins pourraient penser à réclamer être tentés par un scénario identique. Ensuite, le Nord-Mali représenterait un Etat non viable en soit ; il serait donc obligé de chercher des soutiens à travers des solidarités ethniques qu'il pourrait effectivement trouver, encore une fois chez les voisins. Troisièmement, la rébellion n'a jamais constitué un bloc homogène et l'indépendance pourrait très vite tourner en guerre civile targuie dans l'Azawad. Une guerre aggravée par les connections avec des groupes criminels et terroristes. Aucun Etat de la région n'est prêt à accepter de prendre un tel risque. Par ailleurs, on pourrait même observer des alliances objectives entre des Etats qui connaissent des relations tendues. Je pense notamment à l'Algérie et au Maroc qui, pour le coup et pour des raisons différentes, s'opposeront à cette indépendance. Il n'est pas non plus exclu de voir un rapprochement entre l'Algérie et le CNT qui est littéralement menacé de dislocation avec les combats qui se déroulent dans le Sud.
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