Algérie

On achève bien les martyrs



On achève bien les martyrs
«La haine injustifiée que l'on porte à certains grands hommes est souvent interprétée comme un hommage involontaire.» AnonymeUne révolution se donne comme première tâche de renverser l'ordre en place et de le remplacer avec un autre dont les valeurs et les références sont diamétralement opposées à celles du premier. Elle doit pour cela «du passé faire table rase» afin que le nouvel ordre ne rencontre point des obstacles qui atténueraient son efficience. Une révolution prolétarienne va plus loin quand il s'agit de mettre en place tous les éléments qui donneraient la plus fidèle image de ses buts: dans son historique exposé sur la Commune de Paris, Karl Marx n'a pas manqué de mettre en relief le caractère universaliste de cette insurrection qui était farouchement opposée à la paix humiliante (pour la France) signée par le gouvernement bourgeois de Thiers et les Prussiens, en invitant un ouvrier allemand à faire partie du gouvernement de Paris en colère. C'est pour montrer que la classe ouvrière parisienne faisait la différence entre le pouvoir bourgeois allemand et les masses populaires. Dans ce même ordre d'idées, il faut se souvenir que le testament adressé par Missak Manouchian la veille de son exécution par les Allemands (L'Affiche rouge), chef du réseau de résistance parisien, section arménienne, à sa compagne Mélinée, contenait cette phrase qui montrait sa maturité politique: «Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand.» Faire la différence entre ceux qui oppriment et leurs victimes est la principale caractéristique, une qualité qui honore les militants, d'effacer et de tenter de supprimer les lignes de démarcation artificielles confectionnées par ceux qui veulent exercer le pouvoir en semant les germes de la division par le chauvinisme le plus étroit: l'origine ethnique, la religion, la langue usitée sont souvent les critères utilisés par ceux qui veulent arriver par les chemins détournés. Seuls des hommes qui ont une grande ouverture d'esprit et une vision large de l'avenir, Abane Ramdane et Larbi Ben M'hidi, ont su combattre l'esprit de clocher qui mine certaines luttes. On ne manquera pas de relever que durant la lutte de Libération, les plus fidèles élèves à Messali ont créé l'Ugema (Union générale des étudiants musulmans d'Algérie) pour ne pas avoir affaire aux étudiants communistes qui avaient une autre analyse de la situation d'alors et aussi une pugnacité redoutable. C'est comme si la religion suffisait à elle seule à créer un consensus révolutionnaire. Actuellement, seuls deux Etats font de la religion le premier élément fondamental de leur existence: l'Arabie Saoudite et Israël. J'ai fait cette longue et laborieuse introduction à cause de ce malentendu lamentable qui a marqué les cérémonies du 19 Mars: l'APC d'El-Madania et l'Organisation des Moudjahidine avaient programmé une cérémonie à la mémoire de l'aspirant Henri Maillot, militant communiste qui a contribué à armer l'ALN en livrant un camion d'armes en 1955. Cet hommage devait être couronné par l'attribution du nom de ce valeureux patriote à un vague morceau de terrain bitumé prétentieusement désigné sous le vocable de place. Pour ce faire, des notabilités respectables sont venues pour assister à cette cérémonie qui devait réparer un oubli non dénué d'arrière-pensées partisanes: des généraux en retraite, le président du Cnes, d'authentiques maquisards comme Mustapha Fettal, des rescapés des maquis et des camps de la mort, la soeur du chahid, des intellectuels, des journalistes, la radio... Tout ce beau monde est reparti bredouille et amèremnt déçu: la cérémonie fut annulée pour de fallacieux et nébuleux prétextes. L'injustice faite à Maillot ne sera pas réparée! Rendez-vous au prochain 5 juin, date anniversaire de son martyre.PS: sa tombe se trouve au cimetière chrétien de Diar-Essaada, tout à fait en bas sur la droite, à côté de celle de Pierre Chaulet.




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