Algérie

Ombre américaine sur Tunis


Une «issue» que beaucoup de capitales européennes, et surtout Paris, n'ont pas vu venir tant la confiance dans la stabilité du régime mis en place après la destitution du Père de l'indépendance, Habib Bourguiba, était absolument acquise au régime de Ben Ali. Il suffit de se rappeler les propos de la ministre française des Affaires étrangères proposant «le savoir-faire sécuritaire français» à  la police tunisienne pour éviter les morts parmi les manifestants. Mais ce qui est encore plus édifiant, ce sont les «révélations» faites par Mme Alliot-Marie devant les parlementaires français, à  travers lesquelles elle avouait que la chancellerie française était loin de se douter de ce qui se «tramait en Tunisie» au nez et à  la barbe de l'ancienne puissance «protectrice».
Un hebdomadaire français a même affirmé que l'ambassadeur de France à  Tunis était carrément «out» de ce qui déroulait dans les coulisses du pouvoir en place et était plus préoccupé par ce qui se passait ailleurs. Le journal rapporte que la ministre des Affaires étrangères a reproché aux Américains de ne pas avoir informé Paris de la solution qu'ils auraient concoctée avec les militaires tunisiens face à  la colère de la rue de «débarquer» Zine El Abidine Ben Ali. L'Administration américaine aurait donc coupé l'herbe sous le pied de la chancellerie, des services et autres observateurs officiels français dans l'évolution de la situation en Tunisie ces dernières années. Le «mea-culpa» tardif du président Sarkozy, réitéré une fois de plus lundi dernier, ne suffira sans doute pas à  laver la complaisance manifestée à  l'égard de Ben Ali jusqu'à son départ précipité, le 14 janvier dernier. C'est dire qu'ils en ont peut-être fini de la «complicité entre amis» qui existait entre Paris et Washington, sans doute parce que les Américains font preuve de plus de pragmatisme dans l'appréciation de l'évolution de la situation au Maghreb et en Afrique.
C'est aussi ce que nous apprennent les câbles secrets révélés par WikiLeaks. La tournure prise par ce que l'on qualifie de «révolution» pourrait laisser croire que les Américains ont préféré devancer les événements avec les militaires tunisiens –beaucoup d'entre eux ont été formés aux Etats-Unis – au regard de la tournure prise par la colère populaire en Tunisie depuis l'immolation du jeune Bouaziz à  Sidi Bouzid. Il est d'ailleurs tout à  fait significatif que le général Rachid Ammar ait choisi de sortir de sa «réserve» pour s'adresser aux manifestants, les exhortant de lever le siège autour du Premier ministère, ce même chef d'état-major qui a refusé l'ordre de Ben Ali de réprimer la rue, ce qui lui avait valu son limogeage, temporaire certes, par l'ex-homme fort de Tunis.
L'ombre de Washington était encore présente, hier, avec la venue dans la capitale tunisienne du sous secrétaire d'Etat américain pour le Proche-Orient, Jeffrey Feltman, première personnalité occidentale à  se rendre à  Tunis depuis la chute de la dictature Ben Ali. Le haut diplomate a eu des consultations avec le gouvernement et d'autres personnalités tunisiennes et a fait des déclarations, hier, qui ne souffrent d'aucune équivoque. Il doit s'envoler aujourd'hui pour Paris pour informer les «amis français», suite sans doute aux reproches fait par la ministre des Affaires étrangères.    
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