Algérie

Omar, sera-t-il toujours un cancre ?


L'école coloniale en Algérie représentait hautement le sens de l'indigénat, dans toutes ses dimensions, amoindrissant, à telle enseigne que ses maîtres positionnaient les places des élèves, selon un ordonnancement de rangées de tables bien défini d'avance conjugué, en plus, à l'instauration d'une ambiance classificatrice à partir de critères de favoritismes affichés à ciel ouvert et, donc, jugeaient sans états d'âme des résultats scolaires, et subséquemment de leur avenir.

Le tout, à partir d'un système de « valeurs » coloniales bien ancrées, par la force des choses, dans les esprits des uns et des autres, en paroles, actes et comportements mortifiants ; alors que celles symbolisant la République française définies en liberté, égalité, fraternité, étaient censées s'appliquer puisqu'elles étaient apprises dans ladite école.

En réalité, un leurre abject ! Et c'est à partir de cet ordre de valeurs ainsi trompeur, car de typicité coloniale, faut-il le souligner, qu'elle puisait profondément sa nature ségrégationniste, dégradante et inhumaine, malgré les quelques bonnes volontés altruistes d'enseignants français mais isolés.

Rares sont les « indigènes » enjambant cette culture discriminatoire au-delà du primaire. Pour la plupart, ils en deviennent carrément des cancres avant la fin dudit cycle ainsi figé volontairement, à l'image de : « 0mar, va à l'école », comme s'il s'agissait d'aller vers la lune, répété à haute voix matin et soir, en début de scolarité, jusqu'à l'abrutissement voire la cancrerie, ou encore de recopier à titre de punition souvent expéditive, cent fois et même plus, en fin de cycle primaire : « je suis un âne », entre autres jolies phrases suggestives, avec tous les refoulements psychiques en la matière et impacts négatifs à long terme sur les caractères. Pourtant, elle avait formé quelques avocats, juges, médecins..., autres militaires et gardes champêtres d'extraction caïdale et assimilés mais restent, cependant, bornés et destinés à obéir les yeux fermés. Cette typologie caractérielle, nous a été prouvée en maintes occasions après l'indépendance. Brutalement. En vérité, cette école à surtout produit beaucoup de « traînards », conditionnés dans cette voie malgré eux, qui iront grossir, ainsi, les cohortes des champs aussi bien agricoles notamment - personnifiés en bêtes de traits dans certaines régions du pays - que de batailles des deux guerres mondiales et régionales du siècle passé, en tant que chair à canon. Et, par la suite, à la guerre de Libération nationale. Tout un retour de boomerang ! Après l'indépendance, donc, et dans la foulée de quelques amendements opérés sur les programmes scolaires de l'école dite indigène dans le cadre du plan de Constantine du général de Gaule, l'Algérie se retrouvait en face à un problème ardu à plus d'un titre. En plus des survivances des défigurations à partir de la fleur de l'âge, ci-dessus brièvement décrits, devenus ensuite des traits caractéristiques de ceux d'adultes dirigeants post-indépendants dans tous les domaines, avec tous leurs méfaits et bienfaits pratiqués à ce jour, la nation va se confronter, donc, à des obstacles de tout ordre. L'exode rural massif vers les villes et agglomérations champignonnes, conjugué à celui lié aux zones dites interdites de la période 1954/1962, en est la manifestation la plus représentative. Il fallait les désobstruer socio-économiquement et culturellement notamment dans les années 1960 et 70 avec leurs hauts faits dans certains domaines, et bas résultats dans d'autres dus à certains blocages politicaro-culturels. Faussement. Alors, durant des décennies, deux conceptions des choses vont s'entrechoquer : l'une considérant la langue française, comme un butin de guerre - dixit le défunt homme de lettres Kateb Yassine - à l'image de notre belle Mitidja, entre autres fleurons, bâtie par les mains noires de nos ancêtres sous la supervision, il faut bien l'admettre malgré l'exploitation hideuse coloniale, des pieds-noirs accaparant les meilleures terres et aliénant - excluant - massivement la population autochtone. Tandis que l'autre vision, elle aspirait à restaurer celle qui avait régné sur la terre d'Algérie voilà plus de 12 siècles et constituait l'un des fondements de la personnalité algérienne revendiquée, d'ailleurs, par la révolution novembriste. En essentialité surtout, pour ceux qui en saisissent sa longue portée de vue notamment mobilisatrice des diversités culturelles et, à partir de là, génératrice de progrès ainsi que de justice sociale multivalente. En effet, l'appel du 1er Novembre 1954 est, d'essence, libérateur de tout joug de quelque nature que ce soit. Y compris culturel ! C'est cet état d'esprit, qui a fait sa force par l'union de valeurs humaines aussi bien acquises dans le feu du combat libérateur, que reconquises pour l'établissement d'un Etat républicain ouvert sur son temps. Valeurs apurées, bien évidemment, des survivances et influences colonialistes négativistes et autres mystifications zaouistes rétrogrades embrigadant, à tours de bras, des prédisposés au fatalisme et donc au fanatisme voire le renfermement extrémiste sur soi pour les uns, de gains bien terrestres pour les « maîtres ». Malheureusement, ce dernier état d'esprit ressurgit de plus belle de nos jours car encouragé pour des buts sordides encore inavoués, et ce, malgré des débats contradictoires et argumentés, formels et informels mais tous enrichissants, souvent passionnés, ainsi que des « reformes » entreprises à ce sujet, depuis 1962. Hélas, tous ces efforts n'ont engendré que peu de choses en termes de grandes idées réformatrices courageuses et mises en mouvement rationnellement, dans la durée, assainissant ce double comportement absurde qui n'a que trop sévi. Pire encore, l'on constate aujourd'hui que chaque individu - ou groupes d'intérêts de tout bord - se sentant « menacé » ou déchu de son piédestal, se retrouvant en face d'une adversité souvent personnifiée, à tort, en ennemie culturelle, fit appel à la solidarité soi-disant linguistique et, de surcroît, animé dans un cadre de partisanerie liée aux ambitions inavouées fréquentant le surnaturel. C'est-à-dire acquérir coûte que coûte le pouvoir par toutes sortes de talismans dont le bulletin de vote traficoté.

Que des complexés qui, d'une parole et acte saugrenu à un autre, ne font pas seulement de la peine, de par cette indigence intellectuelle manifeste, mais nuisent à la cohésion sociétale déjà au sommet de la désagrégation, voire de déflagration, en terme de développement humain non réfléchi rationnellement en face à des enjeux mondiaux aux antipodes du nombrilisme culturel lié au maraboutisme. Ce qui est sidérant, c'est à partir de quelle assise - permissivité - ces gens-là, se donnent libre cours à leurs lubies ? Oui, d'où ? Et jusqu'à quand ? Pour le moment, des étrangers ont compris ces étrangetés et s'en servent - surfent en paroles et actes - à merveille à tous les niveaux. A nos dépens bien entendu !

Après-demain, plus du quart de la population algérienne vont rejoindre les bancs d'écoles - dont des centaines de mille pour la première fois - collèges, lycées.

Une actualité chargée de significations profondes et d'espoirs, pour des meilleurs lendemains, cultivés par les millions de familles humbles, que par l'Etat proprement dit.

L'école d'aujourd'hui a enjambé un parcours important. Le nombre d'instruits, ne cesse de grandir au fil du temps mais dans un état d'esprit d'indigence intellectuelle, ravivant les deux syndromes, parmi d'autres, ci-dessus mentionnés, au début de notre contribution, avec des manifestations différentes, certes, mais plus dangereux et touchant de larges pans d'étudiants à tous les niveaux, et ce, malgré la démocratisation du savoir mais, hélas, butant notamment au niveau supérieur de l'enseignement, sur toutes sortes d'impasses dont les sorties de promotions de cadres sans avenir car souvent, faut-il le souligner, formées sans être aiguillonnées afin d'acquérir, dès l'école primaire, l'esprit d'imagination recentré en autonomisation décisionnelle bâtie sur le revendicatif existentiel rationnel.

En d'autres termes, l'apparition massive de fortes personnalités estudiantines intergénérationnelles fondatrices des noyaux d'élites d'avenir productrices du bien-être sociétal. En effet, le grand danger menaçant notre jeunesse, dans son ensemble, c'est celui de l'assèchement volontaire ou non de cet état d'esprit pourtant encouragé dans d'autres pays, les ayant mené ainsi à plus de progrès humain. Aujourd'hui, pour le motif d'une soi-disant qualité, certes profitable à plus d'un titre, mais justifiant certaines lacunes incompressibles des méthodes d'enseignement en vigueur et, donc, sans objectifs clairs pour le développement multivalent du pays, l'on assiste à une charcuterie - le mot n'est pas gros - « popularisée » insidieusement, comme une fatalité, à tous les niveaux notamment en début et fin de parcours universitaire, et ce, malgré tous les débouchés en présence. D'après un sondage effectué dernièrement par le CREAD au sein des jeunes, il ressort que prés de 70 % des consultés ne font aucune illusion sur l'issue de leur parcours éducationnel et de là, à celui professionnel. Un chiffre avertissant des plus inquiétants ! Que des cancres pour toute la vie, alors que l'école coloniale l'initiait pour un certain âge ainsi happé par l'école dite buissonnière, avec tous ses attraits pratiques, continuant - prenait le relais - dans un certain sens pour une autre formation dite en contact avec la réalité. Hélas, pour les oisifs d'aujourd'hui, il y'a d'autres « buissons » mais ne les instruisant point. Bien au contraire ! En principe, les enjeux majeurs de ce siècle seraient assurément d'ordre humain, en plus des menaces naturelles et existentielles, de toutes sortes se profilant aux horizons. Par conséquent, l'éducation, dans le sens élargi du terme, serait le creuset déterminant dans lequel s'affronteront ces défis d'une façon accentuée que par le passé. Inévitablement.

Un ministre aussi ancien dans le secteur, et, dont ses connaissances, en la matière, ne souffrent d'aucun doute, ne devrait pas hésiter à promouvoir - ou du moins proposer avec panache sinon démissionner le cas échéant - une réforme de fond en comble de la mission combien noble dont il à la charge. De longues années d'expériences dans le département du savoir, c'est historique pour un responsable politique. Alors qu'il finisse sa carrière dans l'apothéose. Et qu'on finisse enfin, nous aussi, avec une l'école formant de plus en plus des cancres et autres écervelés avec ou sans bac ! Pour ce faire, il serait salutaire de procéder à une grande réforme courageuse d'une situation qui a cumulé tant de travers et ne cesse de se dégrader sur tous les plans, et ce, malgré les multiples réformettes - comme réaménager le temps d'enseignement ou d'alléger les programmes certes profitables aussi bien pour le corps enseignant que du crâne des élèves - mais à effet de feu de paille et, donc, sans aucun impact notable prévisible encore moins durable.

C'est là où se trouve la priorité des priorités et non à une révision constitutionnelle ou, encore, comment investir rapidement l'argent issu des hydrocarbures, entre autres exemples d'immédiateté conjoncturelle. Tout le monde le sait, le sent et le désire, du simple fait que ce secteur absorbe près de 40 % du budget de l'Etat pour des résultats mitigés traduits en chiffres et impacts souvent authentifiés par ledit secteur. Alors, pourquoi ne pas engager cette réforme salvatrice dès la première année de la prochaine mandature présidentielle avec un objectif inébranlable aboutissant à un assainissement radical de ce secteur déterminant d'ici 2015 ? Et ce, pour le seul intérêt du pays. Une vision de sagesse à plus d'un titre. Entreprenante, certes, mais combien indispensable et historique.




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