L'expert financier
Omar Berkouk évoque pour Maghreb Emergent et le
Quotidien d'Oran les différentes évolutions possibles de la crise de la zone
Euro. La sortie de la Grèce
de l'Europe est le scénario secrètement souhaité par les maîtres de l'Euro, pour
sauver la monnaie unique. La participation au Fonds européen de stabilité
financière (FESF) est en suspens pour les pays émergents. L'Algérie devrait, selon
l'expert, attendre une sollicitation politique pour y participer.
Sarkozy et Merkel ont quasiment contraint Papandréou à renoncer à son
référendum. Cela va-t-il changer l'attitude du marché vis-à-vis de la dette
Grecque et contenir le risque de contagion à l'Italie de plus en plus redouté ?
Sarkozy et Merkel ont contraint le Premier ministre grec Papandréou à
renoncer à son referendum en menaçant de suspendre le versement de la prochaine
tranche de 8 MDS au risque de mettre en défaut de paiement la Grèce. Le renoncement au
référendum n'a rien réglé parce qu' il a ouvert la
porte à une crise politique au sein du gouvernement grec. Le nouveau Premier
ministre et son Gouvernement devraient rapidement donner les gages de «bonne
conduite» pour recevoir l'aide de l'Europe et éviter le défaut total tant redouté.
Mais en dernière instance c'est le peuple grec dans la rue, à défaut de l'avoir
exprimé dans les urnes, qui nous donnera l'état de la crise et son risque de
propagation. En vérité, et en l'état actuel des choses, ce qui aurait arrangé
les Européens c'est une sortie de la
Grèce de l'Europe. Ce qui aurait pu circonscrire la maladie
de la dette au corps le plus faible de l'Europe et réserver les fonds du FESF -(Fonds
européen de stabilité financière)- à la recapitalisation des banques
européennes. Cela aurait permis de secourir l'Italie sans dramatisation. Cette
option aurait été suicidaire pour la
Grèce, mais tellement plus «pratique» pour Sarkozy et Merkel qui auraient versé des larmes de crocodile sur le
sacrifice de la Grèce
au sauvetage de la zone Euro !
La Grèce ne sera pas complètement tirée d'affaire
même avec l'acceptation des conditions de l'accord du 27 octobre, son peuple
doit se remettre au travail pour éponger une dette qui reste lourde même après
avoir été divisée par deux !
Rien ne dit, entretemps, que l'Italie sera épargnée. Politiquement, elle
est affaiblie par la permanence de Silvio Berlusconi à la tête de son
Gouvernement. Il en réduit la crédibilité. Son endettement, bien que détenu
principalement par des résidents, est très lourd à supporter avec une
croissance quasi inexistante. C'est donc une «proie» tentante pour les marchés
financiers qui se comportent comme les nuages de sauterelles qui se déplacent
d'un champ à un autre.
Pourquoi selon
vous un FESF élevé à 1000 milliards d'euros le 27 octobre dernier n'arrive pas
à calmer la spéculation sur les dettes souveraines européennes. Que manque-t-il
pour apaiser durablement cette fièvre, des émissions solidaires (eurobonds) ? Des mesures encore plus spectaculaires de baisse
des déficits ?
Les dettes
cumulées des principaux pays en difficulté ou qui risquent de l'être sont
largement supérieures aux 1000 milliards d'euros du FESF. Il faut donc montrer
une volonté farouche et une détermination sans faille dans le combat pour la
réduction des déficits budgétaires. Cela est aisément affiché aujourd'hui par
les différents Gouvernements .Pour preuve, l'Italie «invite» même le FMI à
venir inspecter son programme de réduction des déficits. Les marchés craignent
la résistance des peuples à la mise à la diète ! La solution des Eurobonds qui n'a pas eu l'adhésion des Allemands était la
seule susceptible de faire reculer les attaques des marchés parce qu'elle
aurait fourni des «munitions» sans compter à cette guerre contre la spéculation
mais en permettant peut-être de résorber les déficits «sans pleurs» elle aurait
provoqué à terme «l'hyperinflation» tant redoutée par les Allemands, mémoire
oblige.
Tout le monde
redoutait à l'occasion du G20 une OPA de la Chine et d'autres pays émergents sur une Europe
fragilisée. Finalement les engagements de l'épargne des émergents restent
prudents en Europe. Pourquoi ?
Il faut, pour
aborder cette question, distinguer deux catégories de pays émergents : la Chine avec ses énormes
excédents financiers et les autres (Brésil , Inde ,Russie….).
Ces deux catégories ont posé d'une part, des conditions communes à leur soutien
au FESF à savoir une mise en place rapide de solutions crédibles
d‘assainissement des finances publiques et de réduction des déficits budgétaires
des pays européens et d'autre part une condition propre à la Chine : que l'Europe
n'apporte pas son soutien à la pression américaine dans le cadre du G20 pour
une réévaluation du yuan.
Un pays comme
l'Algérie, qui a intérêt à diversifier les placements de ses excédents de
réserves de change doit-il prendre part au FESF ? Une autre opportunité
d'investir en portefeuilles s'est déclarée avec le lancement par la Tunisie du Fonds Ajyal destiné à soutenir la croissance des entreprises
tunisiennes et ouverts aux fonds souverains notamment
arabes. Qu'en pensez-vous ?
D'une manière
générale il ne faut absolument pas se précipiter pour acheter de la dette
gouvernementale à moyen et long terme que celle-ci soit émise par le FESF ou
directement par les pays à besoin de financement. A moins d'être sollicitée
«politiquement» et solidairement à participer au FSEF, l'Algérie doit consacrer
ses ressources financières de long terme au développement économique du pays. En
revanche la gestion tactique de court terme par la Banque d'Algérie des
réserves de change peut justifier l'achat opportun de «papier décoté». S'agissant
du Fonds Ajyal et avec tout le respect que l'on doit
à nos frères tunisiens, commençons d'abord par soutenir nos PME /PMI dans un
plan de relance de la production nationale et diversifier notre économie. Bien
sûr, ce propos n'exclut pas les rapports d'aide et de solidarité entre les deux
pays. En somme, nous sommes loin d'avoir bien investi en Algérie pour chercher
une diversification de portefeuille.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 08/11/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : El Kadi Ihsane
Source : www.lequotidien-oran.com