Algérie

Nuit de doute à In Salah



Nuit de doute à In Salah
Tout en annulant les marches prévues hier, les animateurs de la protestation à In Salah maintiennent leur sit-in permanent sur la place principale de la ville tant que le gel des explorations n'est pas annoncé officiellement.L'attaché de communication du comité de coordination de la protestation populaire d'In Salah, Hadj Mohamed, a annoncé la nouvelle, hier à la mi-journée. Il a déclaré à la foule, qui observait son sit-in permanent sur la place devant la daïra, baptisée «place de l'Union et de la Résistance» depuis trois semaines, qu'un coup de téléphone de la Présidence a annoncé qu'«une décision en faveur de la population d'In Salah a été prise par le président Bouteflika et que cette décision sera officiellement transmise par un émissaire de la Présidence dans les jours qui viennent».Le tapis rouge des délégations officielles est bien arrivé à l'aéroport pour être déroulé devant l'illustre envoyé d'Alger. La bonne nouvelle a plongé la population dans l'impatience, d'autant plus que des membres du comité ont donné plus de détails, en public, parlant carrément de «gel des forages du gaz de schiste» quand d'autres ont évoqué «un arrêt définitif».Une rumeur assumée par les meneurs, qui ont brillé par leur aptitude à mobiliser une population totalement acquise à la cause depuis le début des protestations, le 31 décembre dernier, et qui ont instauré une démocratie de l'information envers les manifestants et l'ensemble de la société. Une méthode selon laquelle toute information officielle doit passer par le canal du groupe de 22 délégués choisis par les manifestants, chargés de transmettre l'unique revendication aux autorités et assurer la médiation et le choix des personnes à impliquer dans le processus.Hadj Mohamed décrit une ambiance calme et sereine : «Les gens sont contents mais restent vigilants, ils craignent un revirement de situation de dernière minute.» Sur la place de la Résistance, le sit-in permanent ne sera pas levé avant l'annonce officielle de la décision de Bouteflika. «C'est irréversible, c'est le symbole de notre résistance.» La marche improvisée par un groupe de jeunes a été annulée par le comité de coordination «en signe de bonne volonté envers les autorités qui préparent une décision annoncée comme étant favorable pour In Salah».Autre signe de bonne volonté : après la reprise progressive des cours dans les établissements scolaires et l'ouverture partielle des commerces en soirée, l'activité administrative et commerciale devrait être normale aujourd'hui. La ville, encore paralysée par solidarité, retrouvera donc aujourd'hui son rythme : hier pas un kiosque pour envoyer un fax, jusqu'à 16h les gens étaient debout, attendant du nouveau.Gel ou arrêt définitifMohamed Djouan, président de l'association Shams, est confiant : «Le Président n'avait pas une idée précise et juste de notre revendication. Les politiques n'ont pas fait leur travail, certains ont parlé de main étrangère. On a bien compris qu'ils ne connaissaient ni le Sud ni les habitants d'In Salah, qu'on a traité de traîtres au début et jusqu'à il y a quelques jours.Ils ne connaissent ni notre histoire ni nos principes. Ils n'ont pas mesuré notre dévouement à la patrie.» Il aura fallu que le patron de la police vienne pour que le Président ait la bonne version des faits ' «Ecoutez, nous sommes les plus simples, les plus généreux, nous n'avons jamais rien demandé et si les responsables n'ont pas pu régler ce problème ou n'ont pas donné la bonne information, c'est qu'ils ne sont pas à la hauteur ! Et les pouvoirs publics doivent revoir leur copie.»Gel ou arrêt des forages de gaz de schiste ' Les gens semblent euphoriques tout en gardant à l'esprit que quelle que soit la décision du Président, elle devra être suivie de textes réglementaires. «Cette protestation a donné une leçon à tous : on peut arriver à ses fins de façon pacifique, en préservant les biens publics. Nous avons plus servi l'Algérie qu'In Salah», répète Hadj Mohamed.Le président de Shams estime, quant à lui, que «dorénavant, quand quelqu'un pointera un doigt vers nous, il faudra qu'il se rappelle que les autres doigts se retourneront contre lui», visant sûrement des élus du FLN froidement reconduits, la veille, après les déclarations du député de Tamanrasset et du secrétaire général du parti. In Salah a refusé la médiation des politiques. Certains n'ont trouvé personne pour les recevoir : venus jusqu'à l'esplanade, ils ont été reçus avec du thé et des cacahuètes, on leur a offert à manger, mais rien d'autre.Une médiation où les rapports de force de la ville ont été respectés, dit-on parmi les animateurs du mouvement. «Des personnes influentes, ayant des relais à la Présidence, ont bougé depuis quelques jours» et «quoique la décision vienne en retard, nous avons encore confiance dans l'institution de la Présidence comme dernier recours». Voilà donc ce qu'on pense à In Salah.Dernier point évoqué à la veille de cette annonce tant attendue : le manque de communication institutionnelle. Aucune équivoque à ce propos. «Nous avons envoyé des correspondances depuis plusieurs mois, la direction de l'environnement, le wali, les différents ministères n'ont jamais répondu. Tous les problèmes écologiques, des plus simples aux plus compliqués, ont été transmis par notre association, avec des rapports détaillés et des photos à l'appui», explique le président de Shams.Et d'ajouter : «Personne ne peut nous accuser d'avoir failli à notre mission de société civile. Notre association n'est pas dédiée à la danse ou à la fantasia, mais à la vulgarisation de la culture écologique et à la préservation de l'environnement, ce que nous assumons depuis plusieurs années.» Pour le reste, la société civile annonce que quand tout sera terminé, une grande campagne de nettoyage et d'embellissement de la ville sera menée. Histoire de montrer l'image réelle d'In Salah, qui a maintenant le statut de ville citoyenne.




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