Algérie

«Nous voulons notre part de la rente»



Durement affectés par la cherté de la vie, ils ne veulent renoncer à  leurs revendications sous aucun prétexte, surtout pas celui du manque de liquidités. «On ne veut plus attendre la tripartite. Y' en a marre des promesses sans lendemain. Eux se servent à  volonté et nous imposent une politique d'austérité à  nous seuls. Notre pays n'a pas d'économie productive. Il vit de l'argent du pétrole qui appartient à  tous les Algériens. Nous voulons notre part de cette rente nationale», tonne Slimane Bouaza, un retraité qui en a gros sur le cœur. Ils réclament un dispositif capable de protéger leur pouvoir d'achat en chute libre à  cause d'une dérégulation et d'un manque de contrôle du marché national. Un manque de contrôle qui favorise des augmentations généralisées des prix des produits de consommation. «J'ai pris ma retraite en 1995 avec une pension de 9000 DA en tant que chef de section garde et sécurité de l'aéroport international d'Alger. Aujourd'hui, le salaire de celui qui occupe le même poste dépasse largement les 45 000 DA. Et moi, je perçois à  peine l'équivalent du SNMG. L'écart est flagrant. Ma pension ne suffit même pas à  subvenir aux besoins alimentaires », lance Mohamed Zyada, 76 ans, dont le désespoir le pousse à  implorer Dieu pour qu'il le rappelle à  sa dernière demeure. «J'aimerai bien que le président de la République nous explique pourquoi nous vivons dans la pauvreté au moment où l'Etat baigne dans les pétrodollars. Qu'il nous dise clairement si nous sommes Algériens ou pas», peste M. Zergade, qui regrette ce qui «arrive» dans ce «pays des 1,5 million de chouhada».
Couverture sociale insuffisante
Un retraité soulève l'insuffisance de couverture sociale dont souffre cette frange vulnérable d'Algériens. «Je suis malade chronique, ma femme aussi. Et j'ai du mal à  faire face aux frais de nos soins. La sécurité sociale ne rembourse pas tout, même pas 80% de ce que je dépense. Cela à  cause notamment du tarif de référence et du prix des consultations très élevé chez le privé et que la CNAS ne rembourse pas», dénonce Salah Mergui, 66 ans, retraité de l'éducation, qui réclame carrément la révision du système de sécurité sociale. Pour lui, chaque retraité doit bénéficier des mêmes augmentations appliquées au secteur dans lequel il travaillait. «Chaque année, ils nous augmentent de 4%. Mais les prix de tous les produits connaissent des hausses vertigineuses au point où nous ne pouvons plus subvenir à  nos besoins les plus élémentaires. C'est intenable», lâche M. Bourahla, 59 ans, qui a encore à  sa charge 7 enfants. «C'est le ministre du Travail qui bloque nos revendications, dont le Premier ministre n'est même pas au courant. Qu'il en prenne toute la responsabilité», clame Aïssa Boudjourine, un retraité souffrant d'une maladie chronique, dont la pension est de 17 000 DA. La Fédération nationale des travailleurs retraités (FNTR) a, avec le concours de la centrale syndicale, fait des propositions pour une actualisation conséquente des pensions de retraite.
Deux jours de salaire pour un kilo de viande
«Sait-on que ces retraités sont sortis, à  l'époque, avec des salaires de base supérieurs à  5 fois le salaire minimum national garanti (SNMG) qui était alors de 4000 DA ' Comparées au salaire minimum actuel, ces pensions représentent aujourd'hui moins de deux fois le SNMG. Il n'y a pas si longtemps, le prix d'un kilo de viande représentait deux heures de travail. Aujourd'hui, il faut débourser le salaire de deux journées pour ce kilo de viande», relève la FNTR dans son rapport remis au ministère du Travail. Un rapport qui démontre, chiffres à  l'appui, l'érosion du pouvoir d'achat des retraités. «Dans ce panorama qui comporte beaucoup d'inquiétudes, le système de protection sociale algérien a montré ses limites à  atténuer les effets de la crise. Il n'a amorti que faiblement les conséquences sur les ménages en général et sur la frange des retraités en particulier», souligne-t-on dans le même rapport. La FNTR relève, entre autres, le grand écart existant entre les revenus perçus par les travailleurs salariés et les retraités. Mais si la plupart des protestataires accusent le gouvernement de les avoir délaissés, certains reprochent à  la centrale syndicale de n'avoir pas suffisamment défendu leurs revendications.
 


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