Algérie

"Nous ne voulons pas de la justice des casernes"



Ils estiment qu'il faut continuer le combat pour démanteler tout le système et édifier un Etat de droit avec une justice indépendante.Tribune ouverte pour les Algériens qui ont voulu s'exprimer hier lors du 12e rassemblement parisien contre le système. Le collectif Libérons l'Algérie a dressé une estrade où se sont succédé plusieurs manifestants.
Parmi les personnes qui ont pris le micro, le père de Massinissa Guermah, assassiné par les gendarmes à Beni-Douala en avril 2001. "Je suis réconforté et soulagé de voir aujourd'hui que tout le peuple algérien est uni dans le combat contre le système qui a tué mon fils", a-t-il dit, très ému, rappelant que le régime a, de tout temps, joué sur la division entre les Algériens pour se maintenir.
Face au public qui l'a longuement ovationné, M. Guermah a évoqué le calvaire qu'il a vécu depuis la mort de Massinissa. "Cela fait 18 ans que je souffre", a-t-il dit, la voix étranglée par les larmes. Il a confié avoir été convoqué en 2007 par un magistrat qui lui a demandé de renoncer à demander justice pour son fils car l'Etat est plus fort et qu'il ne peut rien contre lui.
"Depuis le 22 février, je ne me sens plus seul. Je sais que tous les Algériens sont avec moi et, ensemble, nous pouvons casser ce système qui m'a broyé comme il a broyé tant d'autres", a poursuivi le père éploré, encouragé par la foule qui a repris en c?ur "Ulach smah ulach", l'un des slogans forts du Printemps noir de 2001.
"Le sang de Massinissa comme celui des 127 autres victimes dont mon frère ne sera pas vain. Justice sera faite et tous les responsables vont payer", a renchéri Hamid Tounsi, qui a pris à son tour le micro pour indiquer que le pouvoir algérien a commencé les assassinats avant même l'indépendance de l'Algérie. "Nous avons affaire à une bête à mille têtes. Il faut l'attaquer au c?ur pour la mettre hors d'état de nuire. Ne nous laissons pas distraire pas des arrestations spectaculaires qui ont tout l'air de règlement de comptes. Nous devons poursuivre notre combat pour que toute la mafia qui est au pouvoir soit dégagée", a expliqué Hamid Tounsi.
Une dame, très en colère, s'en est prise directement au chef d'état-major qui, dit-elle, s'est arrogé le rôle de justicier. "Gaïd Salah nous joue chaque mardi des pièces de théâtre pour nous endormir. Il fait partie de la mafia au pouvoir et il doit également partir", a-t-elle exigé, soulignant que les Algériens ne veulent pas de "la justice des casernes", sur le modèle égyptien.
Cette revendication a largement été relayée par toutes les autres personnes qui ont pris le micro. Certains ont qualifié de poudre aux yeux les arrestations de Saïd Bouteflika et des anciens responsables des services de renseignements, Toufik et Tartag. "C'est de la manipulation. On veut tromper l'opinion et lui faire penser que le changement a commencé. Alors que c'est faux. Une bande est en train de remplacer une autre. Voilà tout", a commenté un vieux monsieur, émigré en France depuis quarante ans.
Un autre manifestant a demandé aux Algériens de rester vigilants et de démasquer toutes les man?uvres qui visent à stopper leur révolution. "Le changement doit venir du peuple, des étudiants, des syndicalistes, des femmes. Nous devons persévérer dans notre combat et rester unis dans notre pluralité", a-t-il préconisé. Les tribuns ont insisté également sur la nécessité de poursuivre la lutte pour le changement démocratique de manière pacifique. Il est à noter que les rassemblements des Algériens sur la place de la République se poursuivront pendant le mois de Ramadhan. Un ftour collectif est notamment prévu.
S. L.-K.


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