«Nous ne serons pas à l'abri des ruptures tant qu'il n'y a pas de changement dans la réglementation»

- La facture d'importation de médicaments a atteint 720 millions de dollars pour les quatre premiers mois de l'année. Comment expliquez-vous la pénurie sur le marché '
La facture d'importation annuelle a atteint 2 milliards de dollars en 2011. Les quatre premiers mois de l'année auraient donc dû représenter 666,67 millions de dollars si on la compare à cette année-là. Mais cette facture n'a été que 543,48 millions de dollars. Ce qui explique le retard dans la signature des programmes par le ministère de la Santé, comme nous l'avons tous constaté à travers les ruptures vécues en 2011. Les programmes ayant été signés dans des délais plus raisonnables cette année, les importations se rapprochent donc du tiers de l'année passée (667 millions de dollars), ce qui est tout à fait normal. Un travail d'analyse s'impose afin de vérifier ces chiffres et d'éviter un certain nombre d'errances, en veillant à ce que l'argent de notre pays soit dépensé de façon cohérente.
Dans tous les pays, le principal garant de la disponibilité d'un produit est la réglementation qui doit dicter des conduites à tenir en situation de rupture potentielle, en définissant les responsabilités et obligations de chacun. Pour cela, des mécanismes de veille consacrés par la réglementation doivent être mis en place et, en même temps, le respect de cette réglementation. Je peux vous citer plusieurs situations génératrices de rupture qui ne sont prises en charge par aucun texte réglementaire. Ceci entraîne donc une gestion par l'improvisation qui ne peut mener qu'à l'approximation et à la situation de rupture.
Anticiper au lieu de gérer l'urgence, tel devrait être le principal objectif de nos autorités. Pour illustrer la situation actuelle, nous pouvons faire un parallèle avec «le code de la route» : pour éviter les accidents, ce dernier prend en considération toutes les situations auxquelles peut être confronté un automobiliste, justement pour qu'il n'ait pas à improviser. De plus, les services de police sont là pour veiller au contrôle du respect de la loi. En fait, la réglementation qui régit la disponibilité du médicament en Algérie est totalement déficiente et les outils de contrôle sont complètement dépassés.
- Comment peut-on améliorer la situation ' Que propose l'UNOP '
Tant que notre réglementation demeure ce qu'elle est aujourd'hui, nous ne serons pas à l'abri des ruptures. Une situation inacceptable pour les patients algériens mais, en plus, dommageable pour l'économie de notre pays parce qu'il est clair que la gestion de l'urgence entraîne des surcoûts et des errements qui ne sont pas acceptables.
S'il y a une réelle volonté pour mettre un terme à cette situation inacceptable que nous vivons, il suffit de faire appel aux professionnels du secteur pour travailler sur une réglementation digne de notre pays, qui mérite mieux que les souffrances que vivent nos concitoyens et que subit en second lieu le corps soignant qui se retrouve désemparé et impuissant face aux malades.
Chaque jour qui passe, sans pallier à ces graves insuffisances, est un jour de perdu. Nous n'avons pas cessé de le répéter depuis de nombreuses années : il y a urgence à revoir notre réglementation dans sa globalité. Nous n'avons malheureusement pas le pouvoir de le faire. Que ceux qui ont ce pouvoir assument leurs responsabilités et le fassent. Nous avons, pour notre part toujours, exprimé notre disponibilité à travailler sur ce sujet de la plus haute importance. Malheureusement, nous en sommes même arrivés à nous demander si le mouvement associatif a sa place en Algérie tant les critiques constructives sont mal perçues et les stigmatisations de personnes monnaie courante...
La bonne attitude est d'assumer, de pallier, d'analyser, de corriger et de prévenir, non pas de nier, d'ignorer, d'accuser et de justifier !
Je le répète encore une fois : la santé des Algériens est trop précieuse pour être gérée par l'improvisation et l'approximation.