Algérie

«Nous ne reculerons pas et le changement est inévitable»



- Comment est né le groupe du Mouvement du 20 février à  Marrakech '  
C'est une idée qui a émané d'un groupe sur facebook appelant au changement, et à  aller sur le terrain clamer et réclamer un nouveau Maroc, celui des libertés, de la démocratie, du partage équitable des richesses. Un Maroc Etat de droit, garantissant les droits politiques, économiques et sociaux pour un peuple libre de choisir ses représentants. Donc du débat sur facebook, nous sommes passés à  une déclaration, puis à  une plateforme de revendications et à  créer des groupes par région. A Marrakech, nous étions au départ une vingtaine, on ne se connaissait qu'à travers des pseudos sur internet. Il fallait qu'on se voie, ce fut chose faite le 20 février de la manière la plus discrète possible. On s'est juste donné rendez-vous quelque part sans qu'on se connaisse. On avait peur des infiltrations policières. Puis on a commencé à  tenir des réunions, d'abord dans un café où le propriétaire nous a demandé de partir de peur d'avoir des ennuis avec la police.
Ce qui nous fit penser à  chercher parmi les partis politiques, l'un des plus propres, avec lequel nous partageons les même idées, qui ne siège pas au Parlement et n'a pas de relais au pouvoir, de nous aider en nous garantissant un local pour nous réunir où nous n'aurons pas à  subir les contrôles policiers. Ce fut chose faite avec le parti socialiste, l'USFP. Mais je tiens à  dire que ce parti ne se mêle aucunement de nos décisions et n'interfère pas dans nos réunions. Le 20 février est un mouvement pacifique qui refuse toute forme de violence. Le 20 février à  Marrakech, on a voulu donner une belle image de la révolte pacifique des jeunes Marocains.  
- Vous avez commencé à  20 et vous àªtes combien, aujourd'hui '
Sur la seule page facebook, nous sommes 1060 à  Marrakech. Parmi nous, il y a des étudiants, des enseignants, des chômeurs, etc. Nous sommes une mosaïque de personnes qui ont des convictions, des jeunes qui veulent le changement et nous n'excluons personne.
- Vous revendiquez une monarchie constitutionnelle…
Une monarchie parlementaire à  l'image de ce qui existe en Grande-Bretagne, en Espagne ou ailleurs. Un roi qui ne gouverne pas. Un roi qui ne sera qu'un symbole d'union pour le peuple marocain et auquel personne ne touchera. Mais la gestion des affaires publiques doit revenir au peuple à  travers les élus qu'il choisira démocratiquement et à  travers des élections transparentes et libres. Un gouvernement et un Parlement représentant réellement la volonté du peuple et qui devant lui seront comptables de leur gestion. Le plafond des revendications dans notre mouvement c'est la monarchie parlementaire. Nous sommes réalistes, il est inconcevable de demander une république après des siècles de monarchie. C'est irréaliste. Mais même si le roi est roi ça ne lui donne pas le droit de faire ce qu'il veut. Le budget du Palais et de l'armée doivent àªtre discutés.
- Que deviendra le makhzen '
Le problème aujourd'hui est que le roi intervient dans beaucoup de secteurs. Il n'est pas jugé pour ça parce que dans la Constitution actuelle il est sacré et ne peut àªtre jugé. Ce que nous disons est que s'il veut garder cette sacralité, il doit quitter et s'éloigner de la gestion des affaires publiques, car cette gestion doit àªtre soumise à  un contrôle et on doit demander des comptes à  ceux qui seront en charge des affaires publiques. Ce rôle-là revient au peuple qui dira à  chaque fois son mot à  travers les urnes.
- Que pensez-vous des réformes annoncées par le roi '
On peut dire que le discours du 9 mars a été porteur de signes positifs, mais il ne répond pas à  toutes nos revendications. Après le discours, d'autres signaux sont venus conforter cette tendance vers l'ouverture que ce soit du Palais ou du gouvernement pour répondre à  nos revendications. Parmi ces signaux, le Premier ministre qui assure vouloir quitter le gouvernement après le référendum sur la nouvelle Constitution. Aussi, la libération des 194 détenus politiques. D'ailleurs à  croire la presse, un autre groupe doit àªtre libéré prochainement parmi eux El Fizazi. Je crois que l'attentat d'Argana a retardé ces libérations. Nous avons d'ailleurs lancé un appel pour une marche aujourd'hui à  Marrakech pour dire que le peuple veut toujours le changement et dénonce le terrorisme.
- Le Mouvement du 20 février a accusé les ennemis du changement d'être derrière cet attentat. A qui pensez-vous '
Quelle que soit la partie qui est derrière cet attentat, elle est forcément contre le changement. Quelle que soit la source de cet acte terroriste, elle refuse le changement et la démocratie et un nouveau Maroc. Nous avions la crainte au départ que l'option sécuritaire après l'attentat bloque ou retarde les réformes, mais nous voyons qu'à l'heure actuelle, à  la différence avec l'attentat de Casablanca en 2003, qui a été suivi par une grande vague d'arrestations et d'interpellations et d'abus aussi, avec Argana ça n'a pas été le cas. Bien au contraire, l'enquête semble se dérouler dans le calme. Les services de sécurité ont réagi avec une certaine maturité. On peut dire que la conjoncture actuelle les a poussés à  avoir une telle attitude. Nous sommes convaincus que le chemin vers l'ouverture est inévitable ; nous restons déterminés à  mener jusqu'au bout nos revendications. Tel est le message de notre marche d'aujourd'hui à  Marrakech. Nous dénonçons le terrorisme quelle que soit sa source. Nous refusons la violence de quelque côté qu'elle vienne. On veut gagner sans pertes ni dégâts.
- Avez-vous été approchés par le pouvoir '
Le gouvernement et la commission de révision de la Constitution ont envoyé une invitation au Mouvement du 20 février pour prendre part à  la commission.
Le Mouvement a refusé, car nos revendications sont claires. De plus, personne ne représente le mouvement, nous n'avons pas de bureau central ou de direction. Nous sommes engagés dans une marche pour le changement de manière pacifique. Nous avons fort heureusement constaté les premiers fruits de ce combat, notamment le large éventail de libertés même au niveau des télévisions publiques.
On ose débattre pour la première fois du baisemain et de la monarchie. Une évolution palpable.

 


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