Algérie

«Nous manquons de circuits de distribution»



L'Expression:Depuis quelques années déjà, une flambée chronique des produits agricoles de large consommation, s' est installée dans le décor quotidien des consommateurs. Quelles sont, selon vous, les raisons de ces perturbations qui affectent sérieusement le pouvoir d'achat des Algériens'Akli Moussouni:Le pouvoir d'achat des Algériens a toujours été entretenu par la manne pétrolière, à travers les aides de l'Etat tous azimuts. Cela concerne les exonérations fiscales, parafiscales et douanières, le financement intégral des dispositifs d'emploi (Ansej, Cnac, pré-emploi...), ainsi que la quasi-intégralité des investissements non étudiés et non planifiés. Cela sans compter les subventions publiques qui touchent quasiment les produits alimentaires pour la consommation humaine et animale. Cette démarche dite «sociale» n'avait pas pour objectif d'actionner une dynamique d'économie, puisque 'aucun dispositif qui puisse s'inscrire dans cette logique n'a été mis en place, mais juste pour maintenir un certain équilibre socio-économique, en vue de maintenir la paix sociale. C'est une politique régulièrement mise à rude épreuve, des suites des retombées des évènements mondiaux sur un marché mondial, dont nous sommes totalement dépendants. Par rapport aux produits alimentaires en particulier, même la hausse fulgurante des cours du pétrole, liés à ces mêmes évènements, ne profitera pas à notre pays puisqu'elle ne servira qu'à compenser, à peine la hausse des cours de ces produits liée aux mêmes évènements, en l'absence totale d'une économie nationale qui aurait pût valoriser le potentiel dormant du pays. Il n'est pas évident, pour cette fois, que cette hausse des cours du pétrole puisse continuer à entretenir un pouvoir d'achat du citoyen au regard d'une dégringolade liée à une problématique multidimensionnelle qui a affecté l'agriculture algérienne.
L'inflation mondiale, la hausse des prix des intrants et les crises en chaîne dans les secteurs de la logistique et le transport, peuvent-elles justifier cette flambée chronique des produits de large consommation'
Absolument. L'analyse de l'évolution de la nomenclature des prix sur le marché national par rapport à celle du marché mondial, ne reflète pas une concordance, dès lors qu'une baisse importante du cours d'un produit alimentaire quelconque n'est pas répercutée sur le marché national, comme dans les marchés normalisés des pays développés. Aussi, l'exonération fiscale décidée dernièrement par les pouvoirs publics pour baisser les prix de certains produits, ne se répercute pas sur le terrain. Evidemment, en l'absence d'une planification des productions et d'un circuit de distribution y afférent, il ne peut y avoir de production conséquente pour plusieurs raisons d'ordre technique. Par voie de conséquence, l'essentiel des produits de large consommation est importé. Chose que les circuits de distribution existants ne peuvent assurer rationnellement. À titre d'exemple, un camion-livreur revient toujours vide sur des distances importantes au regard de l'étendue du pays. À l'importation, en l'absence de flotte algérienne et de pouvoir exporter, le transport est assuré par des compagnies maritimes étrangères qui imposent leurs prix, parfois jusqu'aux ports secs algériens, par rapport aux contenants.
Beaucoup de mesures ont été prises par l'Etat, en matière d'adaptation des lois, de mesures de contrôle et de veille du marché. Mais force est de constater que les perturbations subsistent toujours. Pensez-vous que l'Etat doit revoir globalement le schéma d'organisation du marché national des produits agricoles et redéfinir ses missions de régulation'
Si vous faites allusions à la succession de mesures prises par le ministère du Commerce, en vue de lutter contre la spéculation considérée comme étant à l'origine de ces perturbations, il y a lieu de savoir que ce ministère agit dans l'ignorance totale des causes réelles de cette anarchie, dont il ne fait que compliquer la situation. On ne peut apporter des solutions à une problématique dont on ne connait rien du processus qui l'a engendrée. Il faut retenir que le prix d'un produit sur le marché obéit exclusivement à «la loi de l'offre et de la demande», en vigueur dans le marché mondial et que chaque Etat intervient en interne, par rapport à des situations spécifiques, dans un cadre règlementé par des forums du marché mondial (OMC, Accord d'association avec l'Europe..etc.). Cela du fait d'une législation commerciale consacrant l'autarcie et l'exclusion de ces espaces. Le ministère du Commerce à qui incombe la mission de développement du secteur a, totalement investi dans le bricolage, omettant le rôle qui lui incombe dans la construction d'un marché universel pour le pays, à savoir: l'identification des besoins du marché et tout produit, la planification des productions en relation avec le ministère de l'Agriculture, la normalisation des productions et enfin, la mise en place d'un système de distribution approprié. On ne peut parler de régulation que par rapport à des perturbations liées au marché mondial des intrants dans la production nationale. À présent, les pouvoirs publics, à travers le ministère du Commerce ne font que gérer des importations dans la mesure du possible, comme les exonérations fiscales décidées dernièrement, dont les résultats ne peuvent être que mitigés.


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