Ce n'est pas que le mot lobbying - qui n'a rien à voir avec notre classique ben-amisme - qui s'est perdu dans la translation vers l'algérien. Alors que la scène politique reste en position de stand-by rigide et n'a même pas été effleurée par des élections législatives, présentées comme aussi importantes que le 1er novembre 1954, les parties les plus intéressées - les plus motivées ou peut-être les plus autorisées - se remettent à parler de réformes économiques. Et elles ne tournent pas autour du pot : c'est de libéralisation économique dont on parle. Du mal du « trop d'Etat» qui, selon eux, ne donne pas un vrai Etat, mais une chose qui « bloque tout». Pourtant on a bien le sentiment que ces libéraux perdent aussi quelques mots au cours de la traduction. C'est ce qui arrive quand on critique une politique économique tout en affichant, la « main sur le c'ur», que l'on ne fait pas de politique, qu'on se contente de proposer quelques solutions.
Dans l'Algérie de l'été 2012, où des syndicalistes font grève de la faim dans le désert et où un vieux militant des droits de l'homme malade a été quand même embastillé, les patrons et leurs amis économistes font preuve d'une grande impatience à aller vers la conclusion. Vers les «bonnes décisions». Et ils ne font pas de politique ! Mais contrairement à d'autres qui pourraient penser que la libéralisation n'est pas la panacée, ils ont les moyens de se faire entendre et de faire valoir leur argument. Le tout sur fond d'une inquiétude générale au sujet de la faiblesse proverbiale de la croissance économique en Algérie rapportée aux investissements qui sont consentis. Inquiétude renforcée par la perspective qui n'est plus lointaine d'un tarissement des ressources fossiles qui font tenir les choses. On lira avec intérêt les propos d'un ancien ministre pour qui l'argument majeur pour aller vers l'exploitation du gaz de schiste réside dans le besoin de renouveler une capacité d'exporter dans le futur pour faire face au déclin des réserves. Ce choix est engagé et le « stand-by» politique ne l'a pas entravé. Mais pour toutes les autres possibilités qui se ratent, pour l'élan qui reste virtuel, pour les opportunités que Sonatrach rate peut-être dans une Espagne mal en point, il faudra bien admettre un jour, publiquement et pas en off, que le statu quo politique les rendait objectivement impossibles.
On parlera sans doute plus sérieusement d'économie - et pas seulement du point de vue des patrons ou des experts qui leur sont liés - quand on n'occulte pas le grand besoin de changement politique. Et qui peut être mené au moindre coût, aujourd'hui, dans l'aisance financière relative dans laquelle se trouve le pays et dans l'état de patience, encore plus relatif, dans lequel se trouvent les «classes dangereuses». Car elles attendent seulement le temps de reprendre du souffle. Peut-être que les experts et les «bourges» d'Algérie le sentent… ce qui explique cette impatience qu'ils expriment en omettant certains mots qui sont parfaitement traduisibles.
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Posté Le : 26/06/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salim Rabia
Source : www.lequotidien-oran.com