Le nouveau PDG de Vimpelcom, Jo O. Lunder, a discuté
hier avec Karim Djoudi, ministre des Finances qui se
retrouve dans la mission de manager ce qu'il est convenu d'appeler «l'affaire Djezzy». Mis à part la lapalissade qu'ils allaient parler
d'Ota, les bribes de propos du ministre paraissent dans la «ligne» : on achète Djezzy. Il faut espérer qu'on fait bien les comptes et que
l'on n'est pas fermé au débat. Vimpelcom n'a pas
montré un attachement «passionnel» à Djezzy, ce n'est
que «business as usual». Ce que le groupe veut, tout
comme son associé Sawiris, c'est un «bon prix» dont
le niveau, de leur point de vue, est déjà fixé. On ne sait pas si le cabinet
mandaté par le gouvernement a fait son estimation, ni quand il la fera. Par
contre, les experts algériens ne cessent de poser la question basique : que
gagne l'Etat algérien à acheter et à nationaliser Djezzy
? Poser la question est déjà une réponse. Ces experts, pour une fois très
convergents, pensent que l'Algérie n'y gagne rien et que l'entreprise OTA
perdra de manière mécanique de la valeur, une fois achetée par l'Etat. Quand à sa gestion future sous la forme d'entité publique… Ils ne
se font pas d'illusion. Leur religion est faite. Même les défenseurs du secteur
pensent que l'environnement est dissuasif pour une gouvernance efficace d'une
entreprise publique. Mais le débat n'est plus là. Ce qui manque réellement
depuis que Djezzy est devenue une affaire contentieuse,
c'est l'argumentaire économique – et non pas politique – du gouvernement pour
justifier que des fonds important soient mis dans le rachat d'une entreprise
privée… Ce n'est pas une question secondaire, sauf si les réserves de change
deviennent une source d'aveuglement. Car, en définitive, ce qui compte, c'est
bien de gagner au change. Acheter Djezzy à un prix
élevé pour en faire la sÅ“ur de Mobilis, cela mérite, au
moins, un débat. Il y a peut-être d'autres domaines plus évidents à investir. Devenir
par exemple partie prenante du Fonds Ajyal en cours
de lancement en Tunisie. A l'heure où les placements présumés «prudents» dans
les dettes souveraines ne sont plus rentables, ni vraiment sûrs, il y a du
«sens» à prendre un «risque» mesuré en investissant en Tunisie. Au sens
économique comme au sens politique. Il y a aussi du sens à réfléchir par
exemple à des dispositifs d'accompagnement durables des PME. On le comprend à
la lecture d'un rapport, très officiel, de la tripartite. Mettre des ressources
dans des incubateurs d'entreprises – là où les choses se jouent et se joueront -
est un choix gagnant. Les Algériens ne manquent pas de rationalité économique. Si
des bureaux de change n'existent pas, ce n'est pas seulement en raison d'une
administration impotente, c'est aussi parce que l'investissement n'est pas
rentable. Les actions et décisions des pouvoirs publics doivent-elles échapper
à cette rationalité ? Les mettre en débat public n'est pas la moindre des
priorités. Pourquoi acheter Djezzy ? Pour en faire
quoi ? Ce ne sont pas des questions superflues.
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Posté Le : 18/10/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salim Rabia
Source : www.lequotidien-oran.com