La toponymie, cette science qui s'intéresse à l'origine de noms de lieux, a fait l'objet d'une conférence débat au pavillon central de la Safex en marge de la quatrième journée du Salon international du livre (Sila). Cette rencontre a été organisée en hommage à Mostefa Lacheraf. Dans une grande partie de sa dernière ?uvre intitulée « Des noms et des lieux », parue chez Casbah Editions, affleurent ses souvenirs d'enfance et de jeunesse. Tout un chapitre est, notamment, consacré aux noms et lieux qui reflètent l'âme et l'histoire de l'Algérie. Ces dernières années, de nombreuses thèses sur le sujet, dont celles de Farid Benramadane et Fodil Cheriguene, ont suscité de l'intérêt et une curiosité justifiés. Considérée comme patrimoine utile et nécessaire pour conserver la mémoire des peuples, la toponymie a été présentée et expliquée par Ibrahim Atoui, directeur de l'unité de recherche sur la toponymie. Il a expliqué qu'« elle est le reflet de l'histoire et de la culture de notre pays ». Selon le conférencier, « il est plus qu'important de la normaliser, car c'est une valeur culturelle immatérielle inestimable ». Remontant à l'époque précoloniale, Atoui a précisé « que les noms des lieux s'effectuaient de façon spontanée, en fonction de l'emplacement ou d'un repère ou selon l'usage de l'intérêt de la région et non pas baptisé par une commune ou une préfecture. On trouve surtout des odonymes (noms de rues) comme « zenka, derb, rahba, bir... ». Pendant la période coloniale, a précisé le spécialiste, « sur les 225 odonymes que comptait la ville d'Alger, il n'en reste que 12 depuis 1830 ». « Ils ont été remplacés par avenues, boulevards et rues » a-t-il constaté. « C'est un signe de cette brutale appropriation administrative de l'espace », a-t-il précisé. « La France avait ainsi effacé toute référence à un passé d'où pourrait surgir des sentiments nationalistes, des souvenirs religieux ou militaire puissants » a-t-il ajouté. « La France n'a laissé que 450 noms de localités administratives et a introduit des toponymes qui ont été effacés ». « Depuis l'indépendance, l'Algérie a nommé peu de rues en l'absence d'une politique toponymique », a regretté le conférencier. « Les noms et les lieux n'ont pas fait l'objet de discours politique ou d'une revendication clairement énoncée », a-t-il fait remarquer. Seule action notable, les noms de villes et de villages ont été remplacés, selon lui, « grâce à des textes relatifs à la gestion de toponymes en Algérie d'où le premier décret portant sur les hommages publics dans le domaine odonymique promulgué en 1963 ». L'exposé de Atoui a fait ressortir que sur 676 communes laissées par la France, 114 seulement ont changé de nom en 1965. Un autre texte gérant les toponymes est apparu ensuite en 1977. Il sera suivi par un autre texte en 1981 portant « lexique national des noms de villes, villages et autres lieux ». En janvier 2014, un nouveau texte est venu enrichir cette armature législative et réglementaire. Installée, une commission nationale de baptisations se réunit au siège du ministère des Moudjahidine. Selon des statistiques présentées par Atoui, Alger compterait, actuellement, 2.800 toponymes et 40.000 rues ne portant pas de nom. « A la suite de ce nouveau texte, une grande opération de baptisation des rues est en cours dans la capitale », a-t-il annoncé. A partir de demain, une journée d'hommages sera dédiée à des hommes de culture. Elle s'ouvrira en matinée (11h-13h) avec le rappel des parcours d'Emmanuel Roblés, l'ami de Mouloud Feraoun, et de Jean Louis Hurst, un des « porteurs de valise » qui nous a quittés il y a quelques mois.
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Posté Le : 03/11/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Rym Harhoura
Source : www.horizons-dz.com