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Des nouveaux massacres ont secoué le Nigeria au début de cette semaine, ont rapporté les médias locaux qui ont fait état de la mort de plus d'une centaine de personnes, dans au moins trois villages du centre du pays. Des témoins, cités par la presse locale, ont indiqué que les villages qui ont été attaqués on été complètement rasés par les assaillants, dont l'appartenance n'a pas été communiquée par les autorités d'Abuja. Les massacres ont été perpétrés dans des villages habités par la communauté chrétienne dans le sud de l'Etat de Kaduna, qui n'a pas connu de telles atrocités depuis la présidentielle de 2011. Cette présidentielle a permis à un candidat de confession chrétienne et issu du Sud, Goodluck Jonathan, de se faire élire à la tête du pays, contre Muhammadu Buhari, un musulman du Nord. Mais depuis cette date, les violences ont augmenté d'un cran. La police locale refuse de donner des détails sur l'appartenance des hommes armés à l'origine de cet énième massacre, mais des sources affirment qu'ils sont issus de l'ethnie Fulani, de confession musulmane. Autrement dit, si l'on se fie seulement à ce qui est apparent, on conclurait à des violences à caractère confessionnel dans un pays où le nord du pays est à majorité musulmane, et le Sud à majorité chrétienne et animiste. Mais le problème est plus profond qu'il n'en a l'air et risque même de conduire, à long terme, le Nigeria à la sécession. Tous les ingrédients sont en fait réunis pour aboutir à un tel résultat. Le douloureux souvenir de la guerre de sécession du Biafra, dans le sud-est du pays, entre 1967 et 1970, est encore dans les esprits pour nous rappeler que le pays est assis sur un brasier. Il est vrai que l'on ne peut pas ignorer le caractère ethnique et confessionnel des violences intercommunautaires, qui ont fait plus de 10 000 morts en deux décennies, mais l'origine de cette instabilité est d'ordre social et économique. Le pétrole, exploité dans le sud chrétien, constitue une des principales sources de l'instabilité. Les populations du Delta du Niger ont perdu toutes leurs terres à cause de l'exploitation anarchique de cette ressource énergétique, sans pour autant bénéficier de la rente engrangée par l'Etat. Cette injustice sociale a donné lieu à une instabilité sécuritaire marquée par les sabotages récurrents des gazoducs et des accrochages avec l'armée régulière, qui ont fini par devenir une véritable guerre de rébellion entre Abuja et le Mouvement rebelle de libération du Delta du Niger où se concentre toute l'industrie pétrolière. Mais ce qui se passe dans le centre du pays est loin d'être causé par l'injustice sociale. Ce face-à-face, au caractère officiellement religieux entre la majorité musulmane et la minorité chrétienne, a pour origine la lutte autour du contrôle des terres fertiles dans le centre du pays. Ces terres appartiennent dans leur globalité à cette minorité chrétienne. Elles représentent toutefois autant d'enjeux économiques que le pétrole, qui profite plus aux multinationales qu'à la population nigériane. «A ces enjeux pétroliers, se superpose un second facteur de crise : les clivages Nord-Sud. Dans la capitale de l'Etat des plateaux, à Jos, les conflits opposent ainsi les Fulani musulmans aux Berom chrétiens, deux populations qui disposent de droits différents. Quant aux mouvances islamiques du Nord, elles sont plurielles (soufisme des confrériestraditionnelles, mouvements salafiste, maadhistes et chiites) avec 12 Etats(sur 36) qui ont instauré la charia. Les situations de grandes inégalités etexclusions des droits dans un pays où le partage de la rente pétrolière demeure inégal, constituent les principaux éléments expliquant la puissance des réseaux musulmans; certains responsables politiques voulant instrumentaliser les oppositions religieuses et étendre la charia dans l'Etat du plateau», estime Philipe Hugon, dans une analyse publiée par le site du Centre d'études et de recherches transnationales. «Les puissances extérieures sont aussi des acteurs déterminants. Notamment les Etats-Unis auxquels le Nigeria fournit plus de 40% de leurs importations de pétrole brut. Quant à la Chine et à l'Inde, elles cherchent à faire prévaloir leurs intérêts dans la zone», ajoute notreanalyste, qui ne croit pas à une éventuelle sécession à la soudanaise. La guerre du Biafra, la ressource pétrolière que les musulmans du Nord ne veulent pas perdre au profit des seuls chrétiens du Sud, et la concentration des fortunes issues du commerce entre les mains des habitants du Nord, sont autant d'éléments qui font penser à certains analystes à un autre scénario que celui de la sécession. Mais en attendant, les affrontements continuent et les divisions s'accentuent sans que le pouvoir d'Abuja puisse trouver une solution adéquate au chaos qui règne depuis des décennies dans le pays.L. M.




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