Net d'impôt

Un taux de participation de 42%, une victoire écrasante du FLN qui s'adjuge 48% des votes exprimés et un boycott-abstention, encore plus écrasant, de 58%. Tels sont les trois principaux chiffres à considérer pour une première évaluation du scrutin, si l'on veut se contenter des résultats officiels des élections législatives du 10 mai, sans prêter attention aux accusations de fraude et de bourrage des urnes.
Que nous disent donc ces chiffres ' Pour le pouvoir et ses affidés, ils expriment une réussite à même de les dispenser de l'obligation de changement. Il est peut-être trop tôt de l'affirmer, mais ils semblent déjà oublier que cette élection devait être, selon eux, un 1er Novembre, donc le déclenchement d un processus révolutionnaire'. Car, pour l'heure, il nous est donné de voir et d'entendre leurs seules jubilations. En revanche, pas un mot sur ce que cette 'réussite' devrait impliquer comme actions nécessaires et immédiates à engager. Et quand, vendredi, le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, a parlé d un vote-refuge' succédant au 'vote- sanction' de 1991 pour expliquer les résultats qu'il venait d'annoncer, il exprimait un sentiment de satisfaction absolu, 'net d'impôts'. 'Cette victoire m'oblige', disait un certain Jacques Chirac, le soir même de la présidentielle française de 2002, qu'il venait de remporter à plus de 80%. 'Ce succès nous exonère de tout', semblent nous dire le pouvoir et ses affidés au lendemain de ce 10 mai 2012. En plein Printemps arabe, c'est sans doute un peu grisant d'annoncer une participation de 5 points supérieure à celle de 2007. Encore plus enivrant de dire au monde entier, en parlant qui plus est sous le contrôle d'une observation internationale, que le Printemps arabe et l'islamisme qu'il a porté au pouvoir chez nos voisins ne sont pas une fatalité en Algérie.
Il y a pourtant cet autre chiffre : 58% de boycott-abstention. Ils sont 12 millions d'électeurs sur les 21 millions inscrits à n'avoir pas glissé de bulletin dans les urnes du 10 mai. Beaucoup s'y sont refusés par égard au 1er Novembre. Mais leur voix porte visiblement moins que celle des 7,5 millions qui ont voté pour l'une ou l'autre des listes en lice. Normal, puisque d'après 'une analyse' de M. Ould Kablia qui déclasse définitivement les lectures 'lumineuses' de son prédécesseur, les abstentionnistes sont moins patriotes que les votants. Tant pis pour les' votants.
S. C.