Et Carlos faisant irruption dans un cénacle de grands décideurs pour nous replonger dans l'ambiance des tensions politiques des années 70 sur fond de double confrontation Nord-Sud et Est-Ouest. Ilich Ramirez Sanchez ne vous dit rien peut-être, mais évoqué sous son surnom, il y a de quoi sursauter. Carlos ! Celui qui, à la tête d'un commando de six personnes, prit en otages onze ministres de l'Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) réunis à Vienne. Cheikh Zaki Yamani, très influent ministre du Pétrole de l'Arabie saoudite en faisait partie. Avec le recul, on s'aperçoit que la période, marquée notamment par la fin du pétrole bon marché, dans le sillage des deux guerres majeures du Moyen-Orient (1966 et 1973), fut d'une grande intensité dans le bouleversement des rapports entre les grandes puissances occidentales dominantes et les pays désignés sans euphémisme par ce qu'ils étaient : sous-développés même s'ils produisaient à profusion des hydrocarbures.À l'annonce, pas plus tard qu'hier, d'une nouvelle plongée du prix du baril, qui tend désormais vers les 80 dollars le baril après un court flirt de quelques jours seulement avec les 90 dollars, les nostalgiques de la décennie charnière 70-80 pouvaient rêver d'être en droit d'espérer, en accompagnement de la descente aux enfers annoncée, un retour du ministre et du célèbre «révolutionnaire terroriste», une résurrection du Chah d'Iran, de Houari Boumediène, Saddam Hussein, Maâmar Kadhafi... Ben quoi, c'est du vol, non ' Il y a à peine quatre-cinq mois, notre pétrole se négociait autour de 110 dollars le baril, puis subitement, sans crier gare (pour les endormis), ils vont nous l'acheter à 80 ou 90 dollars. Quels voleurs ! Des gens sans foi ni loi, on vous le dit. Ils se fichent comme de leur première chemise, naturellement en fil de soie, de savoir avec quoi on va payer nos fonctionnaires. Qui, il est vrai, ont bénéficié de substantielles augmentations de salaires ces dernières années, grâce justement à la manne pétrolière. Pour tout dire, les salaires versés par l'Etat aux improductifs (dans le sens où ils ne sont pas impliqués dans une production de richesse matérielle) représentent tout de même 12% du PIB et 38% des dépenses de l'Etat. Et les pensions des invalides de guerre, les retraites des cadres supérieurs et de la nation (caisse spéciale), les crédits irrécouvrables de l'Ansej... avec quoi sera payé tout cela ' Vrai problème où tout le fonctionnement de la machine étatique et de l'économie nationale repose sur un échafaudage à un pied (sic), le pétrole exporté. Mais il paraît que la dernière restructuration industrielle du secteur public, à coup d'injection massive de... pétrodollars, va inverser la donne. On verra.Bon, on ne va pas ressusciter les morts, ils ont fait leur part, mais qu'au moins les vivants se démènent et disent à tous ceux que le pétrole fait vivre, les jours sombres qui les attendent si jamais la tendance baissière de l'or noir, en devenant une tendance lourde, s'inscrivait dans la durée. Des experts préviennent qu'à 80 dollars, c'est intenable pour l'Algérie. Des responsables, suffisamment hauts pour qu'on les entende à défaut de les écouter, nous rassurent : ça y est, la production d'hydrocarbures a augmenté et elle va plus augmenter encore à l'avenir. Ils sont, concédons-le, dans leur rôle quand ils font des déclarations pour chasser la morosité. Encore faut-il qu'ils répondent aux graves questions qui se posent. Car en écho, des spécialistes reconnus disent, eux, que la demande n'augmentera pas de sitôt pour des raisons parfaitement connues de nos dirigeants. Plus grave, même si elle augmente, les prix ont peu de chance de retrouver de sitôt les seuils élevés d'il y a cinq mois. Quand on gère le pétrole ou qu'on s'intéresse un peu aux questions énergétiques, il faut faire un peu de politique. Et si on peut, de la géopolitique. Ou beaucoup si on s'inspire de l'exemple des Etats-Unis qui font de la politique (guerrière) au Moyen-Orient avec sous les yeux les courbes des prix de l'or noir. Et mon Dieu que se passe-t-il en ce moment dans cette région du monde ' Géostratégie et intérêts énergétiques mêlés, le pétrole y est le nerf de tout, des guerres, de leurs causes et de leurs conséquences. C'est le Wall Street Journal, quotidien de référence qui le dit : Washington et Ryad ont conclu un accord pour que la monarchie wahhabite casse les prix du pétrole (ce qui est fait) et se tienne prête à augmenter sa production pour consolider la tendance baissière. L'accord aurait été négocié par le secrétaire d'Etat John Kerry et Ryad a obtenu en contrepartie, entre autre, une relance des «efforts» pour hâter la chute du régime de Bachar al-Assad.Pourquoi se montrer surpris par la tournure prise par les événements ' Au fond, ce n'est qu'un retour aux fondamentaux, déjà, en dehors desquels tout effort pour comprendre les affrontements dans cette partie du monde serait ardu, voire impossible.A. S.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 14/10/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : A Samil
Source : www.latribune-online.com