L'info est passée presque inaperçue de ce côté-ci de la Méditerranée. Le portail d'information online Algérie360° a publié récemment un câble faisant part de l'arrestation au large des côtes oranaises d'un groupe de «harraga» espagnols. La dépêche, brièvement reprise par un nombre restreint de sites électroniques français, sera vite noyée dans le tintamarre de la course électorale au Palais de l'Elysée. D'ordinaire, les réseaux de l'immigration clandestine empruntent plutôt le chemin inverse. Fuyant l'insécurité et la détresse sociale, ou cherchant les fortes émotions d'une aventure extrême, de jeunes Maghrébins et Subsahariens jettent leurs pirogues à la mer pour rejoindre l'autre rive dans l'espoir de s'y établir si affinités. L'Europe des 27 se plaint constamment de cet interminable «flot de misère» accostant sur les rives italienne, espagnole et grecque. Tous les gouvernements de l'UE multiplient les pressions sur leurs partenaires de la rive sud et dressent d'infranchissables obstacles pour freiner cette «ruée» qui donne des ailes aux ultranationalistes de l'extrême-droite. Le racisme et la xénophobie ont atteint un seuil intolérable. Insultes raciales, rafles, entassement dans des ghettos de rétention, reconductions humiliantes aux frontières, violences et homicides sont le lot quotidien de ces immigrants non-désirés et non-choisis, accusés de tous les torts des politiques libérales et antisociales des régimes en place. Cette fois, la situation s'est curieusement inversée. En effet, des gardes-côtes algériens ont récemment accosté au large des côtes ouest un groupe de migrants ibériques à bord d'une embarcation de fortune qui comptent chercher du travail en Algérie. Selon les déclarations faites à la police, ces jeunes Espagnols auraient perdu leur travail après que leurs sociétés eurent déclaré faillite. Faute d'une réponse positive à leur demande de visa d'entrée en Algérie, ils décident de rallier clandestinement Oran dans l'espoir de trouver du boulot dans les entreprises espagnoles installées sur place. Le ralentissement de l'économie mondiale, qui frappe sévèrement la zone euro, a précarisé des milliers de salariés, froidement mis à la porte pour réduire les déficits. La Grèce, l'Espagne, l'Italie, le Portugal et même la France sont affectés de plein fouet par la crise. En l'absence de solution immédiate, ces pères de familles ont donc choisi, comme leurs prédécesseurs maghrébins et subsahariens, de braver la mer pour échapper à la précarité. Le retour à la croissance étant difficile en raison des règles iniques du capital et du profit, les victimes de la mondialisation courent dans tous les sens pour fuir le naufrage programmé. Les pirogues qui montent comme celles qui descendent dans ce grand bassin de la Méditerranée, sont porteuses de la même détresse et de la même misère, induites par le même libéralisme sans foi ni loi. L'économie mondiale doit impérativement revoir ses règles pour replacer l'humain et l'environnement au centre de ses préoccupations. Le FMI, la BM et les établissements financiers multilatéraux sont aujourd'hui incapables de redresser la barre. Leurs recettes d'ajustement ressemblent à de simples palliatifs qui traitent les symptômes au lieu de s'attaquer à la vraie pathologie. De nombreux leaders, à travers le monde, plaident depuis très longtemps pour un nouvel ordre économique mondial qui serait un peu plus humain et plus solidaire. Désormais, il ne s'agit plus d'une revendication, mais plutôt d'un impératif pour le salut de tout le monde. A l'évidence, on ne peut faire l'économie d'une telle cure sans courir le risque d'une grande instabilité qui emporterait, alors, et les riches et les pauvres.
K. A.
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Posté Le : 24/04/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kamel Amghar
Source : www.latribune-online.com