Algérie

Moussaka algérienne



Ils ont sans doute raison, les députés du RCD à l'APN, d'interpeller le Premier ministre sur les motivations qui ont poussé le gouvernement à revoir à la hausse le montant du plan quadriennal 2010-2014 de 150 à 280 milliards de dollars. En catimini et sans la moindre explication, la dotation initiale destinée aux investissements a été augmentée de 130 milliards de dollars par rapport au montant avancé en mai 2009 par Ahmed Ouyahia. Les contribuables que nous sommes sont en droit de se demander, à l'instar des parlementaires du RCD, à quoi sera destinée cette « rallonge » budgétaire et où trouvera-t-on les ressources nécessaires.Cet étonnant renchérissement de « l'enveloppe » des investissements en cours d'exécution du plan en question a de quoi susciter les interrogations les plus légitimes sur le comportement de l'Exécutif, d'autant que les deux précédents plans n'ont fait l'objet d'aucune évaluation ou d'un quelconque bilan devant l'Assemblée nationale. Le sort qu'ont connu certains projets inscrits dans ces plans, comme l'autoroute Est-Ouest dont la conduite et la gestion ont été perverties par une corruption à grande échelle engendrant surcoûts et préjudices en centaines de millions dollars, accentue les craintes de voir l'argent public détourné vers la constitution de fortunes personnelles, le versement de pots-de-vin à des intermédiaires et autres marchands d'armes sans vergogne, dont les noms reviennent régulièrement à travers des scandales judiciaires des deux côtés de la Méditerranée.Les inquiétudes sont encore plus fondées, quand on sait que depuis l'arrivée de Bouteflika à la présidence, en 1999, tous les organes de contrôle des dépenses publiques ont été mis sous l'éteignoir, à l'exemple de la Cour des comptes. Et que la disposition constitutionnelle du règlement budgétaire par l'APN, pour chaque exercice voté par les députés, n'a été mise en 'uvre qu'une seule fois depuis que l'assemblée législative existe. Une situation qu'accentue l'absence d'un véritable programme de relance économique et où sont privilégiées improvisation et gestion à courte vue. Cette « rallonge budgétaire » de dernière minute du gouvernement Ouyahia, outre sa singularité, n'est pas sans rappeler par son manque de transparence que si un pays comme la Grèce traverse aujourd'hui une crise budgétaire majeure, c'est parce que des gouvernements qui ont précédé celui du socialiste Georges Papandréou ont tripatouillé les chiffres du déficit budgétaire de la même façon qu'on prépare la traditionnelle moussaka, menant ainsi le pays au bord de la banqueroute. Une leçon à méditer.


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