Algérie

Moussa Djafer et la poésie face aux épreuves et au temps


Par Lounès GHEZALI*
Nous savons que l'exil peut nourrir l'inspiration pour écrire ou faire un travail dans l'art en général. Nous savons que tout homme sensible, livré aux vicissitudes de l'existence, criera son rêve tôt ou tard, d'une manière ou d'une autre. L'homme ne peut rester longtemps dans le silence, pourvu qu'il ait cette capacité à agrémenter son travail de choses édifiantes et belles, que ce soit du point de vue esthétique ou d'une tout autre valeur. C'est le cas de ce poète nommé Moussa Djafer, qui vient de publier un recueil de poésie intitulé «Tiqqad» (Cautère en français), chez les éditions «Tumast Tazrigt Amazighe». Docteur en biologie, rien ne le prédestine à la poésie, sinon toutes les résonances de la vie et les fluctuations de son coeur. Comme d'un souterrain longtemps fermé, soudain, des poèmes jaillissent de l'intérieur effaçant peu à peu ses multiples silences. Des poèmes qui frisent la révolte, ne serait-ce que par le ton, un peu comme des cris qui refusent une existence plate et sans aspérité. Des poèmes qui chantent la liberté, l'amour, l'exil. Exaltant la culture de ses ancêtres, Moussa Djafer chante tutlayt-iw (ma langue). Comme un chant du printemps, il rythme son coeur à tous ces mots qui ont bercé sa tendre enfance et qui, dans l'exil, deviennent du coup des repères incontournables. Des repères que la mémoire avec toutes ses fluctuations ne peut malheureusement tenir indéfiniment. D'où cette envie de faire vivre ou de faire durer tout ce temps ancien, tous ces mots qui lui font emprunter les dédales menant vers son enfance, sa jeunesse du temps où il vivait en Algérie. Ce recueil intitulé «Tiqqad» ou Cautère, cet instrument d'une pratique ancienne chez nous qui consiste à bruler des tissus organiques chez l'être humain pour le guérir des maladies, sonne comme un voeu de résurrection d'un temps révolu. Une métaphore de pouvoir guérir du mal de perdre toutes les valeurs du passé; de pouvoir éviter le naufrage dans une modernité qui efface la mémoire. «Tiqqad» est un petit échantillon d'humanité évoquant la langue, l'amour, l'olivier... Au-delà des tourments personnels, cette poésie annonce des messages allégoriques, oriente le lecteur vers de multiples rivages où la douleur intérieure n'est autre que le déracinement et tout son corollaire de mots et de signes. L'olivier ne symbolise-t-il pas toutes les promesses justement de l'enracinement' N'est-il pas là, stoïque face aux épreuves et au temps'
*Ecrivain
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