Algérie

Mourad Goumiri. Economiste : «Je n'ai jamais vu de pareilles marges même en jouant au casino»


Mourad Goumiri. Economiste : «Je n'ai jamais vu de pareilles marges même en jouant au casino»
-Vous assimilez l'affaire du rachat de Djezzy par l'Etat algérien à un hold-up, pourquoi '
Je n'ai jamais vu dans le monde des affaires de pareilles marges commerciales accaparées sur une seule transaction, même en jouant au casino ! Dès lors, il me paraît légitime que l'on se questionne sur les tenants et les aboutissants de ce dossier, en commençant par le début, c'est-à-dire lorsque «l'homme d'affaires international» Chourafa a introduit Orascom (qui est derrière cette firme) en Algérie. Pourquoi la licence a été bradée alors que le Maroc, par exemple, en a retiré plusieurs milliards, et enfin pourquoi cette volonté obsessionnelle de vouloir «récupérer» cette entreprise en payant plus de 7 milliards de US$. Il y a donc des zones d'ombre qui mérite investigations.
-Pour beaucoup de gens, la raison pour laquelle l'Etat veut racheter cette compagnie reste floue. Selon vous, quel en est le motif et pour quel objectif, étant donné qu'il possède déjà une compagnie publique de téléphonie mobile '
Les explications ne sont certainement pas d'ordre économique, technique, nationaliste, politique... Il faut donc rechercher une explication rationnelle à une démarche qui, de prime abord, n'a rien de logique. Dès lors, il faut explorer les zones grises, c'est-à-dire que cette transaction transpire des commissions et donc des commissionnaires (rétrocom), ce qui élargit la listes des affaires de corruption dans notre pays de manière significative. Le choix du groupe russe Vimpelcom est également intrigant compte tenu de la relation particulière que notre pays entretient avec ce pays (la Russie, ndlr) et notamment en matière d'armements. Enfin, personne ne comprend qu'après une période idyllique coupable d'ailleurs, Sawiris devienne l'homme par qui le scandale arrive. Que détient-il comme élément compromettant '
-La Banque d'Algérie et les autorités fiscales multiplient, ces derniers temps, les sanctions pécuniaires contre Djezzy pour «violation» de la réglementation. Le timing choisi a-t-il une signification particulière (par exemple volonté d'affaiblir la compagnie pour la dévaloriser) '
A l'évidence, il y a une volonté de faire pression sur OTH pour l'obliger à accepter le deal qui est programmé. Qui tire les ficelles de ce dossier ' Je trouve particulièrement hideux que l'on utilise des institutions de l'Etat (impôt, BA) pour instrumentaliser une affaire qui ne manquera pas un jour d'éclater en public, comme il me paraît irresponsable d'impliquer des fonctionnaires déguisés en ministres pour mettre en 'uvre un dispositif qu'ils ne maîtrisent même pas. Ils seront les futurs lampistes. Enfin, il n'est pas du tout sûr que le scénario retenu (par qui ') ne soit efficace pour les intérêts de notre pays, je pense très exactement le contraire.
-Le chiffre de 6,9 milliards de dollars vous semble-t-il justifié et pourrait-t-il être prohibitif pour l'Etat algérien jusqu'à le pousser à renoncer au rachat '
Le chiffre 6,9 milliards de dollars n'est pas en lui-même choquant ; sans entrer dans le détail, la capitalisation de cette entreprise peut être à ce niveau compte tenu du marché algérien et de son expansion projetée. Ce qui est choquant, par contre, c'est le niveau, ridiculement bas, du droit d'entrée sur le marché qui pose problème. Ce bradage ne nous dit pas tout sur le deal de départ. Plutôt que de débourser cette somme pour engraisser des hommes d'affaires véreux, l'Etat serait bien inspiré de renoncer à cette transaction (en attendant l'expiration de cette concession) et investir cette énorme somme dans AT et AP (les enfants abandonnés des pouvoirs publics) qui en ont bien besoin, comme vient de le dire son nouveau PDG, fraîchement installé et qui tire la sonnette d'alarme sur tout le secteur des TIC... Imaginons l'injection de 7 milliards de dollars dans les TIC pour développer le secteur.


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