Mourad Beghoura du génie civil au génie de la pizza Ou le chemin prodigieux d'un algérien dans l'art de la pizza

Née vers la fin du 18ème siècle, la pizza a connu une évolution vertigineuse jusqu’à être l’objet en 2011 d’un projet de classification comme patrimoine universel immatériel de l’humanité. Et depuis, 30 milliards de pizzas sont consommées annuellement pour un chiffre d’affaires qui avoisine les 300 milliards d’euros dans le monde.

Considérée souvent comme un plat du pauvre, la pizza est, en effet économique. Mais elle reste d’un gout exquis et est indéniablement nourrissante. Un nombre incalculable d’ouvrages lui sont consacrés. Et pas seulement…Des compétions internationales sont organisées pour désigner et honorer le meilleur. Comme en sport, on connait et on célèbre annuellement le « premier mondial ». Cette année, l’Algérien Mourad Beghoura s’est distingué avec une très honorable 3ème place mondiale dans un concours où seuls les meilleurs du monde sont présents. Mourad, que rien ne destinait à ce monde de la cuisine, lui, un diplômé en génie civil d’une université française.

C’est avec fierté qu’il arbore le drapeau algérien après sa consécration en tant que 3ème mondial pour l’année 2016.

Mourad Beghoura est né le 8 octobre 1983. Il fait l’école primaire en Algérie. Le collège, le lycée et l’université en France. Ses études supérieures seront couronnées par un diplôme en génie civil.
Après ses études, il part en Chine où il apprend le mandarin. Pendant ses études, il travaille dans un restaurant français.
Après l’obtention de son diplôme de chinois, il rentre en Algérie.
TM: Comment es-tu arrivé à la cuisine et à la pizza en particulier ?
M Beghoura: Je suis un grand passionné de cuisine. Dés mon retour de Chine, J’ai fais une formation accélérée pour apprendre les bases de la cuisine dans une école à Alger, et plus exactement à Kouba.
Mes voyages, ma curiosité pour la cuisine, m’ont irrésistiblement porté à choisir ce métier. Il y a aussi la maman qui a contribué à me faire aimer la cuisine. Elle me faisait gouter de s plats et m’initiait à certaines techniques.
C’est comme ça que c’est parti.
Par la suite, je me suis intéressé aux différentes cuisines. Et la passion pour la pizza est née.
TM: Comment est née plus exactement cette passion ?
M Beghoura: C’est un ami français que j’ai côtoyé en Chine qui m’a intéressé à la pizza. C’est vrai que de prime abord, cela parait facile, mais en fait, non.
La base de la pizza c’est la pate. Et, pour la réussir, il y a des techniques.
Pour apprendre ces techniques, j’ai été encadré par un chef français, en l’occurrence, Rabah Zaoui, à Carcassone, en France, pendant 10 jours. Mr Rabah Zaoui, est un champion du monde de pizza. Par la suite, j’ai connu un autre grand chef, Thierry Graffagnino, un triple champion du monde (2011, 2012, 2013). Mondialement reconnu. Je l’ai connu en Octobre 2015. Dés notre premier contact, les choses ont marché. Il m’a invité à faire une formation dans tout ce qui est compétition. C’était en janvier 2016. Il m’a donc encouragé à me lancer dans les compétitions mondiales. Ce fut des mois de préparation. De janvier à septembre 2016.
TM: Quels sont les critères sur lesquels se basent les juges pour designer le lauréat ?
M Beghoura: 1/3 des point, c’est la pate, le gout de la pate, sa texture. Est-elle croustillante, légère, cuite de homogène.…Un autre tiers de la notation se base sur le gout, les produits utilisés et le reste c'est un questionnaire technique sur les différents produits utilisés, tels le blé, l’eau, la levure .
TM: Et la pizza qui t’a fait gagner ?
M Beghoura: Elle s’appelle la «pizza fritta».Un spécialité napolitaine. On enroule, ou plutôt on referme la pate, comme la calzone. Ensuite on la fait frire. Je mets des gambas, une sauce tomate, à l’algérienne et je rajoute la mozzarela. Les juges ont adoré.
TM: Parle-nous de ce concours …
M Beghoura: En Italie, il existe plusieurs fédérations et instituts qui sont derrière de nombreuses manifestations. Ce concours existe depuis 1996. Il est organisé par Alfredo Folliero. En fait, c’est la famille Folliero qui s’en occupe. Ce concours permet de valoriser la pizza et les pizzaiolos. Il permet de susciter une émulation entre les gens du métier. La compétition est importante pour s’améliorer.
TM: L’avantage pour les pizzaiolos ?
M Beghoura: Je pense qu’il permet de booster les ventes, d’encourager les pizzaiolos. Il n’y a pas de récompense matérielle. La récompense c’est le prestige.
TM: Et la pizza en Algérie?
M Beghoura: Je crois qu’on est bien loin de la bonne pizza. On fait de bonnes garnitures mais le problème c’est la pate. Pour moi, ici, la pate pose problème. On a de bons produits mais cela ne suffit pas pour avoir une bonne pizza. Il faut une bonne pate, ensuite il y a la technique. Il faut être très rigoureux dans son traitement, la température à laquelle elle est soumise, le dosage. Chez nous, la pate est souvent molle et pâteuse.
TM: Tes projets ?
M Beghoura: J’ai des projets dans le domaine du tourisme. Avec la wilaya de Souk ahras, nous envisageons de réaliser, dans un cadre familial, une maison d’hôte dans laquelle, nous ferons apprécier l’art culinaire algérien et , bien sûr…la pizza.
TM: Et pourquoi pas à Alger ?
M Beghoura: Si, nous avons un projet à Alger, mais les choses ne vont pas aussi rapidement que nous l’aurions souhaité. Nous sommes patients et nous y arriverons.
TM: Un dernier mot ?
M Beghoura: Je tiens à remercier mon coach, Thierry Graffagnino qui a été là pour moi pendant la compétition ainsi qu’Eric et Denis qui ont fait partie de mon équipe et qui m’ont soutenu.