Algérie

Moumen Khalifa impute la responsabilité à Bouteflika et Djellab



Le procès de Khalifa Bank s'est ouvert, hier, au tribunal criminel de la Cour de Blida avec l'audition du principal accusé Moumen Rafik Khalifa qui comparaissait aux côtés d'une dizaine de prévenus pour un décompte exhaustif de chefs d'inculpation à savoir, "association de malfaiteurs", "vol qualifié", "escroquerie", "faux et usage de faux en écriture bancaire", "trafic d'influence", "corruption" et "banqueroute frauduleuse".L'affaire est réexaminée après la réponse favorable de la Cour suprême au pourvoi en cassation du verdict prononcé en 2015. Même salle d'audience, mais nouvelle version du procès. Moumen Khalifa s'est présenté à la barre avec la conviction que la situation pourrait tourner en sa faveur. "L'Algérie a changé depuis l'instruction sur cette affaire.
Les témoins vous diront cette fois-ci tout", répète-t-il inlassablement à la magistrate et au procureur de la République, à chaque fois que ces derniers le confrontaient aux procès-verbaux à charge. Moumen Khalifa nie catégoriquement être responsable de la banqueroute frauduleuse.
"Quand j'ai quitté Khalifa Bank, j'ai laissé dans les caisses plus de 90 milliards de dinars. C'est Abdelaziz Bouteflika et l'ancien ministre des Finances et administrateur de Khalifa Bank, Mohamed Djellab, qui sont responsables de la faillite de Khalifa Bank.
Il faut ouvrir une enquête approfondie pour découvrir la destination de cet argent", commence-t-il par charger. Et d'insister : "Avant 2003, aucune entreprise ne s'est plainte d'avoir perdu de l'argent lors de ses transactions avec Khalifa Bank. Quand il a été nommé liquidateur, Djellab a fait le sale boulot et il a été récompensé par la suite par sa nomination au poste de ministre.
Les choses sont claires. Il faut appeler un chat, un chat. Les déclarations qui faisaient état d'importants trous financiers dans les caisses des agences de Khalifa Bank étaient dictées par l'ancien système". La magistrate rétorque que les expertises ont démontré que les caisses de Khalifa Bank étaient vides au moment du lancement du mandat d'arrêt à son encontre."Quel crédit accorder à des experts qui ont comptabilisé dans le lot le mark finlandais et le franc français qui n'étaient plus en circulation en 2003 '", ironise Moumen Khalifa.
Le prévenu dément également avoir fui le pays pour échapper à la justice. "Je suis parti aux Etats-Unis pour assister à une rencontre internationale et à mon retour, j'ai été arrêté en Grande-Bretagne à l'aéroport". S'enclenche alors une série de questions-réponses sur le capital de Khalifa Bank. Moumen Rafik Khalifa affirme avoir déposé au niveau du Trésor public 125 millions de dinars, alors que le procureur donne le chiffre de 85 millions de dinars versés après l'accomplissement des formalités administratives dont l'acte notarié.
"J'ai bien déposé un quart des 50 milliards de centimes de capital nécessaires pour la délivrance de l'acte constitutif de la banque, sinon le Trésor public ne m'aurait pas délivré une quittance. Même le notaire, le défunt Rahal l'a confirmé lors du premier procès", rappelle l'accusé, précisant que les "85 millions de centimes appartiennent à d'autres filiales.
C'est une erreur d'interprétation". Moumen Khalifa répond par la suite au chef d'inculpation de fraude dans le contrat de crédit de 95 milliards de centimes pour l'achat d'une villa sise au Paradou (Hydra), un R+1 et le magasin de Chéraga et un R+2, auprès de l'agence bancaire BDL de Staouéli.
Le juge le ramène à ces contrats citant la déclaration de l'ami d'enfance de l'accusé, Idir Isir, qui aurait affirmé que ces deux contrats ont été établis chez Me Rahal, le notaire de la famille Khalifa. Khalifa Moumen affirme que dans l'acte, il est écrit que le crédit était destiné à une entreprise de distribution et non pas à son entreprise Sarl KRG Pharma. "J'avais juste des facilités de caisse et non pas de crédits à la BDL de Staouéli". Et d'ajouter : "Il n'y a rien qui me lie à ces contrats".
L'interrogatoire tournera par la suite autour du changement des statuts de Khalifa Bank, suite à la démission de Kaci Ali en tant que P-DG et son remplacement par Abdelmoumen Khalifa sans autorisation préalable et sans informer la Banque centrale. L'accusé n'éclaire pas vraiment le tribunal sur cette violation de l'article 139 de la loi sur la monnaie et le crédit.
Sur les MasterCard et billets gratuits qu'ils auraient donnés aux hauts responsables, il tente cette explication : "Cela rentre dans le cadre des cartes de fidélité. Ce ne sont pas des billets gratuits. Lors de l'instruction, on s'est trompé.
Si vous faites cinq fois Alger-Tunis, vous avez un billet gratuit Alger-Constantine. On ne peut pas donner des billets gratuits parce que l'aéroport prélève 20% du billet en guise de recouvrement de frais de prestation". Le golden boy algérien à l'ascension fulgurante admet avoir consacré une caisse de 300 millions de dinars pour sponsoriser des clubs de football.
"C'est une simple aide, sans plus", dit-il niant avoir donné des enveloppes de 5000 francs français à des journalistes invités à l'époque à assister au match amical Algérie-Olympique Marsaille. "Le groupe Khalifa lui a assuré seulement la prise en charge du séjour". L'ensemble des points concernant les avantages accordés aux hauts responsables de l'Etat pourtant ? dûment cités dans le dossier judiciaire ? ont été aussi survolés, sinon occultés.
Pourtant Aiouaz Nadjia, qui se présente comme sa secrétaire particulière, avait affirmé, lors de l'instruction que des pontes du système, des directeurs d'entreprise qui ont déposé leurs fonds chez Khalifa Bank, des artistes, des responsables du secteur du sport et des enfants et proches de hauts responsables défilaient dans le bureau de Moumen pour obtenir des MasterCard, des lignes de crédit et des cartes de gratuité de voyage sur les lignes Khalifa Airways. "Ça, c'était le dossier de Fakhamatouhou", répond simplement l'accusé. Le tribunal ne le relance pas sur ce point précis.

Nissa HAMMADI


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