Algérie

Moubarak, ses deux fils et son ministre de l'Intérieur jugés: Des puissants dans la cage



Les Egyptiens et des millions de personnes dans le monde arabe ont vu, hier, en direct, Hosni Moubarak sur une civière, ses deux fils, Alaa et Gamal, l'ancien ministre de l'Intérieur Habib El-Adli, ainsi que six hauts responsables de la police dans la cage en fer d'un tribunal où l'on a l'habitude de ne voir que des opposants. Même si certains suspectent les militaires, peu désireux de hâter le démantèlement du régime, d'offrir du « spectacle » aux Egyptiens pour faire oublier la réforme, l'image est très forte. Le puissant clan Moubarak est en cage et mis en demeure de s'expliquer sur les 840 morts officiellement constatés lors de la révolte populaire qui a entraîné sa chute le 11 février. Même si le soupçon reste fondé que le système offre en pâture son chef, il est difficile de nier l'impact symbolique de cette scène encore impensable il y a six mois. En Egypte - et dans le monde arabe -, le sentiment d'impunité des dirigeants doit avoir rudement baissé après la séance d'hier. Hosni Moubarak, dictateur arrogant, a tenté, apparemment sur mise en scène orchestrée par son avocat, d'apitoyer les gens en arrivant au tribunal dans une civière. Un message subliminal contre une révolution qui jugerait un président vieux et malade. Il s'agit d'essayer de faire oublier ce que les Egyptiens savent d'un raïs au pouvoir depuis près de trente ans et qui considérait l'Egypte comme sa propriété au point de songer à la laisser en « héritage » à son fils. L'ex-« raïs », accusé d'avoir ordonné de tirer sur les manifestants, a plaidé « non coupable ». Ses deux enfants et les autres coïnculpés ont également décidé de plaider non coupable.

Après avoir écouté le procureur, les avocats des accusés et les représentants de la partie civile, le tribunal a fixé la prochaine audience du procès de l'ancien président et de ses deux enfants pour le 15 août 2011. Il a annoncé la poursuite aujourd'hui de celui de Habib El-Adli et de ses six collaborateurs. Le tribunal a également ordonné, à l'issue de ses délibérations, le placement de l'ex-« raïs » au Centre médical international, plus près du Caire, au lieu de l'hôpital de Charm El-Cheikh, dans le Sud-Sinaï, où il était détenu sous surveillance médicale depuis sa démission forcée il y a près de six mois.

Les militaires sous pression

Techniquement, il ne s'est pas passé «grand-chose» dans cette première journée dans un tribunal aménagé au sein de l'académie de police pour des raisons de sécurité. Mais il y a eu cette image des puissants mis en cage qui relevait de la politique-fiction et que tous les Egyptiens ont dû voir avec le sentiment que les choses ont réellement changé. Certes, le régime est encore là. Le procès du clan Moubarak n'est pas encore celui du système. Il a été organisé sous la pression constante des manifestants de la Place Al-Tahrir qui ont souvent accusé les militaires au pouvoir de tergiversation. Le grand message provisoire de cette journée des « puissants en cage » est que les hommes en haut de la pyramide ne peuvent compter indéfiniment sur la loyauté du système autoritaire et finissent par en devenir le fusible. Il est intéressant de noter que les avocats d'Hosni Moubarak et de son ancien ministre de l'Intérieur, Habib El-Adli, ont par ailleurs demandé à entendre comme témoin le chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA), le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, qui a été pendant vingt ans le ministre de la Défense. Une exigence qui montre la situation paradoxale où le président Moubarak est jugé alors que ses collaborateurs sont toujours au pouvoir. La tenue de ce procès est en fait l'expression d'un rapport de forces. L'opposition égyptienne dans ses différentes variantes, notamment celles des jeunes, a exercé une pression permanente jusqu'à contraindre l'armée égyptienne à accepter que son ancien chef suprême rende compte à la justice.




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