La confusion régnait hier autour de l'état de santé du président déchu Hosni Moubarak donné pour «cliniquement mort» - c'est-à-dire sans activité cardiaque et respiratoire - avant que l'information ne soit démentie. Un élément, secondaire, de plus dans une Egypte sur un volcan après le collapsus dans la transition suite à un coup d'Etat larvé des militaires.
L'ex-Raïs, transporté de la prison vers un hôpital militaire au sud de la capitale égyptienne serait dans «le coma» et a été placé sous «appareil respiratoire». Les informations sur l'état de santé de l'ex-Raïs sont rares malgré la promesse de la publication d'un «communiqué officiel» sur son état de santé. Les malheurs de Moubarak ont suscité de la sympathie chez un petit groupe d'Egyptiens qui se sont rendus devant l'hôpital. Mais pour la majorité des Egyptiens, la longue agonie de l'ancien président déchu est secondaire devant les nuages qui s'accumulent sur un pays en plein collapsus politique. Alors que l'armée a mis la transition politique dans le «coma» en reprenant la totalité des pouvoirs après avoir obtenu la dissolution du Parlement élu, la tension monte de plus en plus dans l'attente de l'annonce officielle du vainqueur de la présidentielle. Les deux camps en lice, celui du candidat des Frères musulmans Mohamed Morsi et son rival, le dernier Premier ministre de M. Moubarak, Ahmad Chafiq, se sont proclamés chacun vainqueur.
UNE PRESIDENCE SANS POUVOIR, MAIS PAS SANS ENJEU
Pour de nombreux Egyptiens, une victoire donnée à Ahmed Chafiq serait l'apothéose d'un coup d'Etat rampant entamé par la décision de la Haute cour constitutionnelle d'invalider le résultat des législatives deux jours avant la présidentielle qui s'est tenue samedi et dimanche. Un vide institutionnel créé de toute pièce qui a permis à l'armée de s'arroger le pouvoir législatif. Des manifestations ont été organisées Place Tahrir pour contester la dissolution du Parlement. L'armée a poursuivi la man'uvre en publiant une Déclaration constitutionnelle qui réduit le futur président à faire de la figuration. Pourtant, même si ses pouvoirs sont vidés par l'ukase de l'armée, le nom du vainqueur officiel de l'élection est attendu, normalement pour aujourd'hui, avec appréhension. Les Egyptiens - et ce n'est pas excessif de le dire - retiennent leur souffle. Le journal Al-Ahram résume bien les choses en écrivant que «ce sont les 48 heures les plus critiques de l'histoire du pays». Même si cela peut sembler paradoxal pour une fonction présidentielle déjà fortement limitée par les militaires, il y a encore un enjeu politique important qui se joue. Une élection du général Ahmed Chafiq serait perçue, et à juste titre, comme la mise à mort d'un processus politique qui est déjà dans le coma. L'élection du candidat des Frères Musulmans - même si elle ne change pas la donne dans l'immédiat en termes de pouvoir - éviterait le verrouillage total de l'Egypte par les militaires. Cela signifie que les batailles politiques resteront de mise.
LE RETOUR DE PLACE TAHRIR
Au verrouillage institutionnel mené par les militaires, les militants politiques de divers horizons tentent de réinstaller Place Tahrir comme espace politique de contestation. Les Frères Musulmans qui se sont mis à contester de manière plus offensive la décision de dissolution du Parlement pourraient trouver intérêt à relancer une Place Tahrir qu'ils ont essayé de contenir et de snober. Ils étaient nombreux parmi les milliers de personnes rassemblées Place Tahrir pour dénoncer le «coup d'Etat constitutionnel» de la junte militaire. Ils ont également dénoncé la dissolution de la Chambre des députés, et célébré la victoire, selon eux acquise, de Mohamed Morsi à la présidence.
La grande question est de savoir si cette bataille qui s'annonce va rester sur un terrain purement politique avec des mobilisations citoyennes. La grande appréhension des Egyptiens est de se voir happer peu à peu dans un «scénario algérien» qui est devenu l'anti-exemple. Les dérapages hors du terrain du combat politique risquent d'être lourds de conséquences.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 21/06/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com