Algérie

Mother India



C?est une femme qui préside, depuis avant-hier samedi, aux destinées de l?Inde. Prathiba Devisingh Pratil, une avocate de 72 ans, a été largement élue pour la première fois dans l?histoire de son pays à ce poste qui n?est pas totalement honorifique. Le collège électoral indien, constitué de représentants des Parlements national et locaux ? l?Inde est une République fédérale ? a accordé ses suffrages dans une proportion de 66% à cette candidate qui avait mené une campagne très combative et émaillée d?attaques très dures de la part de ses adversaires. Prathiba Patil a particulièrement axé ses thèmes de campagne sur la discrimination dont souffre la femme en Inde. Ce pays, réputé être la plus grande démocratie du monde, accomplit ainsi une véritable révolution tant la mainmise des hommes sur les institutions politiques était avérée, si l?on excepte les figures emblématiques d?Indhira Gandhi, Premier ministre, et de Sonia Gandhi, qui préside le Parti du Congrès au pouvoir. Sonia Gandhi a d?ailleurs vu dans la victoire de Prathiba Pratil un message d?espoir. Il est attendu de la nouvelle présidente de l?Inde qu?elle use de l?influence que lui confère sa fonction éminente pour redonner plus de chances de s?affirmer aux femmes de son pays victimes encore du poids de la tradition et des préjugés. Car Sonia Gandhi, et avec elle Prathiba Pratil, n?ignore pas que l?émancipation des femmes ne se mesure pas à l?aune du retentissement médiatique de quelques têtes d?affiches qui font les gros titres des médias. Le président sortant, Abdul Kalam, bien qu?issu du puissant Parti du congrès, s?était borné à inaugurer les chrysanthèmes. Le statut de la femme indienne n?a pas varié d?un iota durant son mandat bien que l?Inde soit en passe de devenir une puissance économique mondiale. Avec une population dont le nombre dépasse largement le milliard d?habitants, l?Inde a besoin de toutes ses élites pour tenir son rang et les femmes sont très largement présentes dans la sphère des têtes pensantes et pas seulement dans la catégorie des vedettes de cinéma. C?est donc un choix politique que vient de faire le collège électoral indien et on peut en déduire qu?il exprime un pas significatif dans l?avancée de la société indienne dont le système complexe a des millénaires d?ancienneté. L?Inde, qui fêtera le 60e anniversaire de son indépendance le 15 août prochain, est un colosse né de la volonté inébranlable de celui qui avait été l?artisan de la liberté de son pays, le mahatma Gandhi. Même lui n?avait pas eu le temps de consacrer sa phénoménale énergie à la réforme d?une société où les contrastes sont en grandeur nature et les cloisonnements d?une épaisseur d?airain. Il conviendra d?évaluer l?action de la nouvelle présidente pour déterminer si elle est la femme de tête qu?ont cru voir en elle les membres du collège électoral indien ou si au contraire elle n?arrive aux responsabilités que pour enjoliver le décorum et donner un coup de jeune à la fonction présidentielle en Inde. Le rival malheureux de Prathiba Pratil, vice-président sortant, avait allégrement entamé ses 84 ans. Un âge qui, en Inde, n?est pas celui de la retraite.


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