Qu'est-ce que le
multilatéralisme en relations internationales, si ce n'est au moins
l'expression de toutes les unités du système avant la prise de décision qui
détermine les règles communes et l'avenir commun.
La «planète
foot», surprenante dès le commencement de ce Mondial, souhaite-t-elle nous
rappeler le rêve déjà poussiéreux des internationalistes, des non-alignés et de
tout partisan d'une réelle gouvernance mondiale ? Les petites nations
s'expriment, résistent face aux puissants, s'opposent à eux courageusement et
marquent les esprits et des buts par la même occasion... Surprise ? Contexte
exceptionnel ? Successions de coïncidences ? Rien n'est moins sûr...
Les petites nations s'expriment dans un
système qui leur est a priori défavorable, où les moyens déterminent pour une
bonne part la réussite. Elles tentent de tirer leur épingle du jeu, à l'image
de la Côte d'Ivoire face au Portugal (0-0), de l'Algérie face à l'Angleterre
(0-0) et de la Nouvelle-Zélande face à l'Italie (1-1). Les grands restent
perplexes, le Brésil accuse encore le coup face au résultat du match contre la
courageuse équipe de Corée du Nord (2-1) et l'Allemagne voit sa mine
complètement défaite dans sa défaite contre la Serbie (0-1). Amusant, n'est-ce
pas, que deux pays autant marginalisés sur la scène internationale se décident
à défier les pronostics des spécialistes...
Les petites
équipes rentrent dans le stade le regard humide, mais décidées à s'affirmer. La
tête haute tels des gladiateurs, ou mieux tel « l'homme du stade » de Théodore
Roosevelt1, car les joueurs n'ont pas de César à saluer, ni d'hégémon d'aucune
sorte, mais uniquement leurs peuples et leurs supporters. Une seule ambition :
rendre hommage à leur hymne, leur drapeau et leur peuple.
Cette Coupe du
monde est-elle celle des petites nations ? Est-elle le prélude, l'évènement
précurseur d'un nouvel équilibre sur la scène internationale déjà secouée par
une crise économique et financière dont l'ampleur est sans précédent ? Est-elle
le début d'une refonte, sinon de modifications du système international, ce
système très critiqué où les réformes de l'ONU sont attendues, où les
conventions sur l'environnement n'aboutissent pas, où certains conflits connus
de tous ne se résolvent pas dans la torpeur des grands et dans l'indignation de
tous...
Ce serait
malheureusement s'avancer que de répondre positivement à ces questions. Les
rouages ne sont pas aussi aisément modifiables et cette mécanique mondiale si
imparfaite est trop complexe pour être remise en cause par les résultats
surprenants de quelques équipes de football. Ne nous leurrons pas.... Il s'agit
de garder la tête sur les épaules et de ne pas oublier que les attributs de
puissance des grands ne disparaissent pas d'un claquement de doigt. La sévère
défaite de la Côte d'Ivoire face au Brésil nous le rappelle (1-3).
Cependant, les
petites nations s'expriment, ballon au pied ou non, elles s'expriment ! Le
transfert de technologie, de savoir-faire est faible mais est là ! La recherche
d'une constance, la quête d'une cohésion et surtout le pouvoir de l'audace
seront les éléments déterminants des bouleversements au sein de la « planète
foot » et les changements significatifs sur la scène internationale.
Reprenons la
citation célèbre de l'éloquent Danton sans hésiter : « Il nous faut de
l'audace, encore de l'audace et toujours de l'audace (...) ».
L'incertitude
considérée par Clausewitz dans les éléments déterminant la stratégie se taille
une belle part dans ce Mondial et dans une scène internationale où les acteurs
transnationaux, où le « monde multicentré » de Rosenau (2) rendent plus
complexes les interactions entre unités du système.
Quelle est alors
la stratégie à adopter pour les décideurs à l'heure où la météo semble
impossible à prévoir, où le temps est bien incertain ? Sans doute, doivent-ils
rester rationnels en considérant tous les acteurs du jeu - quel que soit le jeu
en présence - et en se remettant constamment en question...
*Etudiant en
Relations internationales, Paris, France
1) Lire Théodore
Roosevelt, The man in the Area, discours du 23 avril prononcé à la Sorbonne.
Notes
1 Lire Theodore
Roosevelt, The man in the Arena, discours du 23 avril 1910 prononcé à la
Sorbonne.
2) Lire James Rosenau, Turbulence in world politics :
a theory of change and continuity, Princeton University Press,990, 480 pages.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 24/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Adib Benchérif *
Source : www.lequotidien-oran.com