Deux inscriptions la situent (696-1296 de J.-C.) et précisent qu'elle fut érigée en mémoire de l'émir Abou-Amer-Ibrahim, fils de Yarmorasen, en exécution sans doute de la volonté testamentaire de ce prince, On ignore encore pourquoi la mosquée, bâtie pour assurer au défunt émir les félicités éternelles, a changé de destinataire au cours des âges. La piété publique l'a vouée au vertueux, au savant AbouLhassen-et-Tenesi.
Salle de prières partagée en trois nefs par deux séries de colonnes d'onyx que relient des arcs outrepassés. Autour de la pièce, frise géométrique. Les arcades étaient autrefois décorées; les murs se peuplent encore çà et là de larges arabesques et de losanges lobés contenant des motifs. Le mihrab (fig. 47) sous coupole à stalactites, s'arque en plein cintre outrepassé; le fer à cheval est couronné de trois bordures, la première circulaire, les deux autres rectangulaires, avec arabesques et inscriptions en koufique. Au-dessus trois fenêtres plein cintre, ajourées d'une ténue dentelle de rosaces. Les chapiteaux, trop massifs peut-être pour les fûts, révèlent deux types: une zone inférieure de méandres sous un turban de palmettes entrecroisées - des feuillages pressant un court bandeau; - la facture en est un peu surchargée. Le minaret est illustré d'un réseau d'arcades et de céramique verte, brune et blanche.
La décoration. - Epigraphie d'un Koufique aminci plus élancé que le Koufique almoravide de la grande Mosquée. Il projette ses tiges, les termine en biseaux, en feuilles, en replis angulaires capricieusement noués aux motifs voisins. En même temps, les vides se comblent d'arabesques: c'est comme un lierre qui grimpe aux longues hampes des lettres. Modèle fréquent dans les inscriptions de l'époque. Le cursif, employé au mihrab sur une partie du cadre, emprunte les belles formes, courtes, grasses, mais ingambes, de l'Andalousie.
La géométrie a pris de l'importance. Elle use de l'étoile octogonale, de la rosace à seize pointes, de dodécagones qui se relient, se prolongent, se répètent en un délire linéaire d'une hallucinante obsession. La flore, nettement andalouse,
ne garde plus qu'une lointaine affinité byzantine. Elle jaillit avec une luxuriance de forêt vierge. La broussaille ornementale répète à l'infini un système de palmes, trèfle trilobé et acanthe. L'ensemble est saisissant: c'est un feu d'artifice d'arabesques qui éclatent et couvrent les panneaux de leurs gerbes étincelantes (fig. 48 et 53).
De tous les monuments de Tlemcen, la Mosquée de Sidi-Bel-Hassen est celle qui se rapproche le plus des chefs-d'œuvre espagnols. Avec son mihrab, véritable joyau d'une ciselure infinie, elle est un fleuron splendide de l'art musulman. Elle porte, disent MM. W. et G. Marçais, la trace d'une culture artistique qui ne sera guère dépassée.
Posté Le : 02/12/2006
Posté par : hichem
Ecrit par : L'Art Antique et Art Musulman en Algérie par A. BERQUE, Administrateur Principal de Commune Mixte détaché au Gouvernement Général de l'Algérie
Source : aj.garcia.free.fr