L’art romain a trouvé en la mosaïque une de ses meilleures expressions. Le Maghreb, plus particulièrement l’Algérie et la Tunisie, en possèdent une très riche collection. Récemment, une des plus importantes mosaïques et non des moins belles, découverte à Sétif, est venue enrichir ce patrimoine. Elle représente le retour triomphal de Dionysos de son périple légendaire. La légende précisément nous apprend que la divinité avait entrepris ce périple en Inde et nombreuses sont les représentations graphiques de ce voyage. La mosaïque de Sétif nous apprend, pour la première fois, que ce périple fut entrepris en Afrique. En effet, nous constatons que les captifs ramenés dans son cortège, naguère Indiens, sont Africains dans ce tableau : un couple et leurs deux enfants, mains liées derrière le dos et juchés sur un dromadaire. Au milieu du cortège, nous remarquons d’abord l’énorme tête d’un éléphant africain aux oreilles déployées en éventail, ensuite la présence d’une girafe, animal exclusivement africain. Autrement dit, si on peut douter de «l’africanité» du dromadaire, on se l’interdit pour le cas de la girafe dont l’espace naturel était circonscrit en terre africaine en ces temps-là. Ainsi sommes-nous sûrs qu’il y a là transposition du thème du triomphe de Dionysos de l’Inde à l’Afrique. L’étude du décor, de la technique et de la richesse de la composition, d’une part, et l’étude du quartier où elle a été découverte, d’autre part, nous permettent de dater la mosaïque vers la fin du IIe siècle ou au début du IIIe siècle de l’ère chrétienne. Or, l’iconographie et les textes, surtout Apologétique de Tertullien, témoignent d’une résurgence du paganisme en cette période où s’ouvre l’ère des persécutions antichrétiennes en Afrique. C’est ce qui explique, sans doute, cet épanouissement de l’art païen dont la mosaïque dionysiaque de Sétif est l’un des reflets. Elle est également le reflet d’un art particulièrement raffiné, celui d’artistes itinérants venant d’Alexandrie reconnaissable au réalisme du dessin, de l’utilisation précise de prismes fins (2 mm parfois) du choix des couleurs. L’ampleur, l’état de conservation, l’intérêt historique et artistique font de la mosaïque dionysiaque de Sétif une des pièces maîtresses du patrimoine culturel national et universel.
Posté Le : 13/03/2022
Posté par : patrimoinealgerie
Source : poste.dz