Algérie

«Mon arrestation en Libye restera gravée dans ma mémoire»



- Pouvez-vous  revenir  brièvement sur les circonstances de votre arrestation en Libye '
Nous avons été arrêtés mes deux collaborateurs et moi à  Misrata par les forces d'El Gueddafi qui nous ont soumis à  un long interrogatoire, avant d'être transférés à  Tripoli. Quand tu es arrêté à  l'intérieur du champ de bataille, tu as forcément peur pour ta vie. D'autant plus que les consignes des militaires étaient claires : «Au moindre geste n'hésitez pas à  faire feu», tels sont les propos d'un gradé à  l'adresse de ses subalternes chargés de notre surveillance. Franchement, j'ai eu très peur cette fois-ci. La mission en Libye a été à  tout point de vue éreintante et dangereuse à  la fois car le conflit entre l'opposition et le régime, utilisant l'armement lourd, est plus que fratricide. En 20 ans de métier, la guerre en Libye restera pour longtemps gravée dans ma mémoire. Dire que j'ai vu pire durant les guerres de Tchétchénie, Irak, l'Afghanistan et le Pakistan où j'ai été arrêté à  Queta (localité située à  la frontière de l'Afghanistan et le sud du Pakistan) dans les mêmes conditions. Contrairement aux Libyens qui ont tout pris (matériel et argent), les Pakistanais m'ont, au bout de quatre heures d'interrogatoire, laissé partir avec mes cassettes qui ont été  diffusées.
- On a comme l'impression que vous àªtes toujours sous le choc…
Je le suis effectivement, car j'ai non seulement frôlé la mort qui fait partie du risque du métier du journaliste qui n'est pas un criminel, mais je m'inquiète du sort réservé à  mes collaborateurs Mohamed Chouihed (26 ans) notre caméraman (libyen) et son assistant Madjdi Abderahim (Egyptien) qui habitent tous les deux Alexandrie. J'interpelle à  travers ces colonnes, les Nations unies, l'ensemble des journalistes de la planète ainsi que l'opinion publique mondiale pour faire libérer tous les confrères emprisonnés en Libye et dans tous les pays en conflit. Laissez moi ouvrir une parenthèse, c'est grâce à  ma nationalité algérienne que j'ai été relâché par les Libyens qui ont répondu favorablement aux sollicitations du gouvernement algérien, qu'il en soit remercié au passage.
- Si c'était à  refaire, referiez-vous le même parcours '
 Volontiers. Seulement, je vais cette fois-ci prendre plus de précautions pour ne pas tomber entre les mains des militaires et mieux informer les téléspectateurs qui ont droit à  une information fiable. Ceci  dit, actualité britannique oblige, je vais, à  partir du 27 avril, couvrir le mariage du Prince William qui est un événement planétaire. Car il concerne la vie du   futur roi d'Angleterre. Comme vous le savez, un journaliste qui n'est pas un homme de guerre, possède la faculté de passer d'une guerre vers un événement joyeux.
- La rue continue à  bouillonner en Syrie et au Yémen. Cela ne vous tente pas d'y aller '
Il est fort possible que je parte prochainement en Syrie et au Yémen, rien que pour montrer les souffrances de ces peuples, les premières victimes de sanglants conflits politiques. Mû par ses obligations professionnelles, un reporter digne du nom est constamment à  l'affût de la vérité qui dérange certains gouvernants.
D'autant plus que l'image, la voix et le compte-rendu d'un journaliste font peur car ils démasquent les criminels.   - Quel est votre regard sur l'actualité du pays '
Le changement total s'impose. Mais on ne doit en aucune manière prendre les exemples irakien et libyen comme référence. L'Algérie qui panse les plaies générées par la dernière décennie ne peut et ne doit faire sa mue, à  travers une guerre civile à  la libyenne. A l'instar de mes concitoyens, je rêve d'une Algérie démocratique, moderne, joyeuse, plurielle où la femme joue un rôle prépondérant dans la vie politique, économique, culturelle et sociale. Nos gouvernements ayant fait leur temps doivent se rendre à  l'évidence que le moment est venu pour passer le témoin.
- Quel message adressez-vous aux puissants de ce monde, à  l'occasion de la célébration du  3 mai, Journée internationale de la liberté de la presse '
Il est important de savoir que le journaliste est un messager de la paix. Il est aussi le trait d'union entre les peuples et les gouvernements.
Depuis mon retour à  Londres, je me bats pour libérer les journalistes emprisonnés en Libye et ailleurs.
Le 3 mai de cette année qui intervient   dans une conjoncture particulière est l'occasion idoine pour interpeller l'opinion internationale sur les dangers qui guettent le journaliste, l'ennemi juré des dictateurs et des despotes auteurs de nombreux massacres perpétrés à  huis clos. 


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