La Banque d'Algérie devrait mettre en
place le réseau des bureaux de change, la loi l'autorise à faire.
C'est une des solutions pour réduire
l'écart qui se creuse entre le taux officiel et le taux parallèle du dinar. Un
écart alimenté, selon Mohamed Ghernaout, expert financier, par les mesures de
contraintes sur les importations et le mouvement des capitaux engagées depuis
la LFC 2009.
Le dinar a piqué une crise de faiblesse
sur un marché parallèle de la devise où le volume des transactions a progressé.
A quoi pensez- vous que cette évolution est due ?
En absence d'enquête sur le sujet, il
n'existe que des hypothèses. La monnaie est une marchandise dont le prix est
commandé par les mêmes règles de l'offre et de la demande. Du côté de l'offre
de devises, je ne vois pas de grands chamboulements ces dernières années. Les
émigrés viennent toujours autant en Algérie et financent toujours par le
transfert des constructions et d'autres dépenses dans le pays. Par contre, et
là nous sommes un peu au-delà de l'hypothèse, la demande de devises a connu en
Algérie un appel d'air avec la LFC 2009 puis dans la foulée toutes les mesures
contraignantes pour le commerce extérieur et l'investissement. Ainsi par
exemple la mesure de décembre dernier de la Banque d'Algérie qui interdit aux
investisseurs étrangers de rapatrier les avances en trésorerie qu'ils ont
effectué au bénéfice de leurs filiales en Algérie. Elle les oblige à les
convertir en augmentation de capital. Conséquence, j'entends parler de clients
étrangers chez des collègues dans le conseil financier, qui se sont mis à la
valise. Ils changent leurs dinars excédentaires en euros et les font sortir du
pays par des voies détournées. Les empêchements qui sont faits pour rapatrier
les dividendes pour les investisseurs étrangers qui sont sur la place,
contribuent au même phénomène. Cela alimente la sortie des capitaux par
d'autres canaux. La demande en devise augmente et le taux du dinar s'affaisse
sur ce marché au noir. Une chose est certaine, c'est une demande de type
économique qui a provoqué cette évolution défavorable au dinar sur le marché
parallèle.
Pensez-vous que cette tendance à la
baisse du dinar et à la hausse des transactions sur le marché des devises au
noir va se poursuivre ?
Je pense qu'elle se poursuivra tant que
les raisons qui l'ont produite demeurent. Il y a un bruissement qui laisse
entendre que les autorités vont revenir sur ces mesures de la LFC 2009. Il
faudra voir. En attendant, le marché parallèle nous donne une très bonne
indication sur la parité du dinar. Pour moi, cela signifie qu'il est surévalué,
en l'état actuel des choses. L'écart considérable qui existe entre le taux de
change officiel et le taux de change parallèle le montre. Nous pouvons tourner
la question dans tous les sens, cela dénote un dinar surévalué. Maintenant cela
ne veut pas dire qu'il faille commencer par le dévaluer pour réduire cet écart.
Il y a des mesures qui peuvent contribuer à rendre le marché parallèle de la
devise moins contraint et réévaluer le dinar parallèle…
Il y a des économistes qui pensent que la
parité du dinar ne peut être connue tant qu'il n'y aura pas de convertibilité
totale. C'est votre point de vue ?
En théorie oui, seule la convertibilité
totale permet de situer sur un marché la valeur d'une monnaie. L'économie
algérienne a plus d'atouts avec ses excédents de réserves de change pour le
faire maintenant qu'il y a sept ou huit ans, lorsque le débat avait rebondi
avec notamment le plaidoyer de Ali Benouari pour la convertibilité. Mais
aujourd'hui, je pense d'abord à des mesures plus faciles à piloter pour réduire
cet écart colossal entre les deux taux de change du dinar.
Je ne sais pas pourquoi la Banque
d'Algérie n'a pas mis en Å“uvre le réseau de bureaux de change alors que la loi
l'y autorise depuis 1994. Cela va améliorer la disponibilité des devises sur un
marché secondaire sûr et réglementé. Bien sûr, les marges des cambistes vont
être plus limitées, mais c'est ainsi qu'il faudra opérer pour siphonner le
marché noir de la devise. De même les banques commerciales ne devront donner
l'allocation devises pour voyage qu'à leurs seuls clients. Les autres devront
ouvrir des comptes bancaires ou alors ils seront orientés vers le réseau des
bureaux de change, comme cela se fait dans les pays voisins.
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Posté Le : 05/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Samy Injar
Source : www.lequotidien-oran.com